Retraites : un an après la réforme, que proposent les principales forces politiques en présence aux législatives ?

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Retraites
par Maxence Kagni, le Mardi 18 juin 2024 à 18:50, mis à jour le Mercredi 19 juin 2024 à 20:33

Statu quo ou abrogation ? Selon quel calendrier ? Le Nouveau Front populaire et le Rassemblement national veulent abroger la réforme des retraites de 2023. Mais pas avec le même calendrier et les mêmes propositions. Défendant la réforme menée par le gouvernement Borne, la coalition présidentielle dénonce "l'irresponsabilité" de ses principaux concurrents aux élections législatives. 

Faut-il, ou non, revenir sur la réforme des retraites ? Et si oui, selon quel calendrier et pour faire quoi ? Promulguée en avril 2023, après des discussions enflammées à l'Assemblée nationale et malgré de nombreuses manifestations, la réforme prévoyant le report à 64 ans de l'âge légal de départ à la retraite fait à nouveau débat. Le Nouveau Front populaire propose en effet d'abroger la réforme dès son éventuelle arrivée au pouvoir, tandis que le Rassemblement national envisage de l'abroger à partir de l'automne. De son côté, la majorité présidentielle sortante assume d'avoir effectué cette réforme et fustige "l'irresponsabilité" de ses principaux rivaux aux élections législatives. 

Le Nouveau Front Populaire veut abroger "immédiatement" la réforme 

Jean-Luc Mélenchon l'a affirmé ce dimanche, sur France 3 : en cas de victoire électorale du Nouveau Front Populaire et "si vous avez plus de 62 ans, dans 15 jours vous partez à la retraite". L'alliance de gauche promet dans son programme d'abroger "immédiatement" les décrets d'application de la réforme des retraites de 2023.

"Plus on va vite, plus c'est facile parce que la réforme a à peine commencé à être appliquée", a expliqué lundi, sur BFMTV, le président sortant de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Eric Coquerel (La France insoumise). Selon lui, la réforme coûterait en 2032 "à peu près 20 milliards d'euros" et pourrait être financée par une hausse des cotisations patronales et sociales de "0,8 points", ainsi que par une taxation des dividendes. Il estime, en outre, que la réforme permettra de nouvelles rentrées d'argent et des économies, notamment en faisant baisser le chômage des seniors, qui partiront à la retraite, et en augmentant le taux d'emploi des plus jeunes, qui remplaceront leurs aînés.

Dans son programme, le Nouveau Front Populaire réaffirme aussi "l'objectif commun du droit à la retraite à 60 ans", sans plus de précision, alors que le périmètre de cette mesure fait débat à gauche. En 2022, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, émettait des doutes sur le retour à 60 ans pour tous et chiffrait la proposition de LFI à 72 milliards. Selon Eric Coquerel, cette réforme qui serait progressive coûterait environ 50 milliards d'euros et serait notamment amortie par "les entrées de cotisations, le cercle vertueux et le choc de la demande".

Le Rassemblement national évoque une abrogation "à l'automne"

Le calendrier proposé par le Nouveau Front populaire ne convainc pas le Rassemblement national : "Aucun gouvernement ne peut arriver en place en plein pendant les JO et abroger une réforme en mettant la pagaille dans l'administration", a déclaré, lundi 17 juin, le député sortant Jean-Philippe Tanguy. C'est la raison pour laquelle le Rassemblement national propose d'abroger la réforme "à l'automne", "après consultation des partenaires sociaux et économiques". Le député, qui siégeait à la commission des finances de l'Assemblée, dénonce par ailleurs les "coûts cachés" de la réforme de 2023, notamment en termes "de handicap, de pensions d'invalidité, de maladies chroniques" : "Quand vous augmentez l'âge de la retraite, vous avez des gens qui s'abîment au travail". 

Interrogé par BFMTV le 14 juin, Jordan Bardella n'avait pas fait de l'abrogation de la réforme des retraites l'une de ses priorités et avait semblé vouloir se laisser du temps en parlant d'un "audit" des comptes publics. Le président du RN avait néanmoins promis une nouvelle réforme "dans un second temps", après avoir "réglé le temps des urgences". Concrètement, le Rassemblement national promet aux personnes "qui ont commencé à travailler avant 20 ans" de partir à la retraite à 60 ans, s'ils ont cumulé "40 annuités de cotisation". Dans un entretien accordé au Parisien, lundi 17 juin, il parle désormais, comme Jean-Philippe Tanguy d'une abrogation "à partir de l'automne". 

Au-delà de l'abrogation, le Rassemblement national propose que ceux qui ont commencé à travailler après 20 ans pourront partir à la retraite entre 60 et 62 ans, en fonction du nombre d'années travaillées. Tandis que ceux qui n'auront pas suffisamment cotisé avant pourront obtenir une retraite à taux plein à 65 ans. "Notre réforme coûte 9 milliards d'euros", a affirmé Jean-Philippe Tanguy. Celle-ci serait financée en partie par le développement des carrières longues puisque, selon lui, les "jeunes" seraient "encouragés" à travailler plus tôt dans l'espoir de pouvoir bénéficier d'une retraite à 60 ans. Le Rassemblement national souhaite également augmenter la productivité, c'est-à-dire "la richesse que l'on crée par une heure de travail".

La coalition présidentielle critique "l'irresponsabilité" de ses rivaux

Le gouvernement et les responsables de la coalition présidentielle fustigent "l'irresponsabilité" des propositions "irréalistes" et "irréalisables" formulées par le Nouveau Front Populaire et par le Rassemblement national. Lundi 17 juin, sur RTL, le Premier ministre, Gabriel Attal, a dénoncé l'idée portée par l'alliance de gauche d'un "retour à la retraite à 60 ans, qui coûte quasiment 100 milliards d'euros, qui serait quasiment impossible à financer et qui se traduirait par une baisse des pensions". Ce mardi 18 juin, sur FranceInfo, le chef du gouvernement a aussi vivement critiqué le RN, sur les retraites et plus largement : "Il y a beaucoup de flou, beaucoup d'approximations, beaucoup de reniements, c'est pour ça qu'il y a beaucoup d'inquiétudes, notamment du monde économique"

"On a deux démagogies qui s'opposent, une irresponsabilité dès le mois de juillet et une irresponsabilité en octobre" a, quant à lui, mis en cause le ministre délégué chargé de l'Industrie et de l'Energie, Roland Lescure, en évoquant les calendriers d'abrogation prévus par le NFP et le RN. Et de tacler, "les magiciens de l'extrême droite et de l'extrême gauche". "Pour financer la hausse de l'espérance de vie, dont on est tous très heureux, il faut travailler davantage", a-t-il expliqué.

Par ailleurs, après Emmanuel Macron la semaine dernière, Gabriel Attal a réitéré samedi 15 juin sur France 2, l'engagement de "revaloriser les retraites du montant de l'inflation". Cette indexation est prévue par le code de la Sécurité sociale, mais le gouvernement peut choisir d’y déroger ou de sous-indexer, via le projet de loi de financement de la budget de la Sécurité sociale. Une hypothèse qui avait circulée ces derniers mois, mais à laquelle le président de la République a mis fin lors de sa conférence de presse du 12 juin.