Poursuivant dans l'hémicycle l'examen du projet de loi sur la fin de vie, les députés ont validé, mercredi 29 mai, l'article additionnel introduit en commission visant à instaurer un droit "opposable" aux soins palliatifs. Le gouvernement et les responsables du texte appartenant à la majorité ont tenté, sans succès, de revenir sur cette mesure jugée peu applicable. Le principe d'une loi de programmation pluriannuelle des soins palliatifs a également été adopté.
Si le rythme de l'examen du projet de loi relatif à "l'accompagnement des malades et de la fin de vie" ne s'est toujours pas accéléré au troisième jour des discussions, les députés n'ayant pas encore atteint l'article 2 du texte, les débats ont donné lieu à plusieurs revers pour le gouvernement. Alors que la partie du texte consacrée à "l'aide à mourir" n'a pas encore été abordée, celle consacrée aux soins d'accompagnement, qui englobent les soins palliatifs, a fait l'objet de discussions intenses, mercredi 29 mai.
Au-delà de l'objectif partagé lié au développement des soins palliatifs, les oppositions ont affiché la volonté de pousser le gouvernement à aller plus vite et plus fort que le plan décennal qu'il a annoncé en la matière, afin de rendre tangible l'intention de garantir l'accès à ces soins aux malades qui en ont besoin.
Alors que mercredi après-midi, les députés avaient adopté l'article 1er consacré aux soins d'accompagnement, les débats ont ensuite largement tourné autour de la mise en place d'un droit "opposable" aux soins palliatifs. Ce principe avait été introduit en commission spéciale par l'adoption d'un amendement porté par Thibault Bazin (Les Républicains), créant un article additionnel au texte du gouvernement. Cet amendement dispose que "la personne dont l’état de santé le requiert, qui a demandé à bénéficier de soins palliatifs et qui n’a pas reçu, dans un délai déterminé par décret, une offre de prise en charge palliative, peut introduire un recours devant la juridiction administrative afin que soit ordonnée sa prise en charge". Alors que les oppositions ont argué qu'il s'agissait par cette écriture de concrétiser la promesse de l’article 1er, la ministre de la Santé, Catherine Vautrin, ainsi que les responsables du projet de loi de la majorité, ne l'ont pas jugée pertinente.
Ce n'est pas raisonnable, ce n'est pas applicable. Agnès Firmin Le Bodo, présidente de la commission spéciale (Horizons)
"Je vous laisse imaginer dans quelle situation des personnes en fin de vie [...] vont pouvoir saisir des tribunaux, sachant que les délais sont de huit mois à deux ans et demi", a ainsi fait valoir le rapporteur de la partie du texte concernée, Didier Martin (Renaissance), qui a également argué du bilan peu opérant du droit opposable au logement (Dalo). "On est dans une procédure juridictionnelle longue pour répondre à des patients dont l'état pathologique nécessite l'urgence", a abondé Catherine Vautrin. Malgré le soutien du gouvernement et de la commission, l'amendement de suppression défendu par Nicolas Turquois (Démocrate), a été rejeté essentiellement par les oppositions, mais aussi par une partie du groupe Renaissance qui s'est divisé lors du scrutin..
Un autre amendement, déposé par Michel Lauzzana (Renaissance), visant à évacuer la notion de droit opposable au profit de la référence à la stratégie décennale en faveur des soins d'accompagnement, n'a pas récolté plus de succès. Et l'article 1er bis a finalement été adopté, la majorité présidentielle, à quelques exceptions près, votant contre cet article.
Autre mesure votée contre l'avis du gouvernement et de la majorité : celle visant à inscrire le principe d'une loi de programmation pour les soins palliatifs, afin d'en faire une "priorité nationale". "Nous l'avons fait sur la Défense, l'Intérieur, la Justice, nous devons le faire pour les soins palliatifs", a estimé l'auteur de l'amendement, Thibault Bazin (Les Républicains). Ledit amendement précise que cette loi de programmation, qui a pour visée d'assurer la montée en puissance des soins palliatifs en fixant des objectifs et en allouant les moyens financiers adéquats, est adoptée par le Parlement pour une durée de cinq ans. Là encore, les promoteurs de la mesure ont indiqué vouloir garantir le développement "effectif" de l’offre de soins palliatifs.
"Il est quand même très intéressant de noter que celles et ceux qui n'ont pas voté l'article 1, qui donc ne veulent pas augmenter la stratégie de soins palliatifs, sont celles et ceux qui maintenant nous demandent une loi de programmation", a fait remarquer la ministre de la Santé dans une allusion au vote des Républicains et du Rassemblement national sur cet article. Un peu plus tard, un amendement à l'objectif similaire, cette fois porté par Jérôme Guedj (Socialistes), a également été adopté.
Ce jeudi 30 mai étant consacré à la journée d'initiative parlementaire du groupe Gauche démocrate et républicaine à l'Assemblée nationale, les débats sur la fin de vie reprendront vendredi.