Dans sa décision rendue ce jeudi 25 janvier, le Conseil constitutionnel a censuré 35 articles des 86 articles de la loi immigration adopté en décembre dernier. Parmi ces articles censurés, 32 l'ont été pour des raisons de procédure, car ils n'avaient pas de lien suffisant avec le texte initial, et 3 l'ont été pour des raisons de non conformité, sur le fond, avec la Constitution. Si à l'Assemblée, la gauche évoque "un camouflet" pour le gouvernement, la droite s'insurge contre cette décision.
C'était une décision attendue de pied ferme. Ce jeudi 25 janvier, le Conseil constitutionnel a largement censuré le projet de loi immigration, voté définitivement à l'Assemblée nationale et au Sénat le 19 décembre dernier. Comme anticipé par le gouvernement, nombre de mesures introduites à la demande des Républicains ont été censurées par les Sages de la rue Montpensier.
Les députés Renaissance, plutôt favorables à l'équilibre du projet de loi d'origine tel que présenté par le gouvernement, se sont empressés, à l'instar du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, de relativiser la censure en soulignant qu'elle ne concernait pas le contenu initial de la loi "pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration".
"Nous sommes satisfaits de voir que la totalité des dispositions que portait le gouvernement à l'origine dans le processus parlementaire a été considérée comme conforme à la Constitution", a ainsi réagi Constance Le Grip (Renaissance).
Le président de la commission des Lois, Sacha Houlié (Renaissance), hostile au texte dans sa version durcie sous l'impulsion de la droite, a pris acte de la décision du Conseil constitutionnel, tout en soulignant la validation du "projet de loi initial du gouvernement qui peut désormais expulser les délinquants, régulariser les travailleurs et mettre en oeuvre les procédures simplifiées".
Dans le même esprit, Erwan Balanant (Démocrate) a estimé que la décision des Sages constituait "un camouflet pour les forces d'extrême droite de notre pays".
A gauche de l'hémicycle, le président du groupe Socialistes, Boris Vallaud, a qualifié cette décision de "claque" pour le gouvernement. "Emmanuel Macron aura donc eu le déshonneur et la censure", écrit-il sur X (ex-Twitter), avant demander à nouveau le retrait du texte.
"C'est un camouflet pour le gouvernement et il me semble qu'il serait mieux de carrément retirer cette loi", a également estimé Antoine Léaument (La France insoumise), quand sa présidente de groupe a considéré sur X que les destinataires de ce "camouflet" étaient "Macron-Darmanin-Le Pen". "Le racisme n’est pas constitutionnel", s'est félicitée Mathilde Panot avant de réclamer à son tour le retrait du projet de loi.
Du côté des Ecologistes, la présidente du groupe, Cyrielle Chatelain, a fait part de son "soulagement", quand son collègue Benjamin Lucas a évoqué une "victoire juridique" qui va "empêcher un certain nombre de drames", sans pour autant "effacer" ce qu'il a qualifié de "point de bascule du quinquennat du 19 décembre 2023".
Le communiste Stéphane Peu (Gauche démocrate et républicaine) a opéré un constat similaire, soulignant la "responsabilité immense" du gouvernement dans le "point idéologique [donné] au Rassemblement national", tout en qualifiant la décision du Conseil constitutionnel de "sanction lourde sur le fond et la forme" à l'encontre du même gouvernement.
Très utilisé, le mot "camouflet" est aussi présent dans la réaction du groupe centriste Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, via son port-parole, Benjamin Saint-Huile (LIOT), qui déplore que le projet de loi immigration ait constitué une "validation des idéologies nauséabondes".
A droite de l'hémicycle, Les Républicains n'ont pas caché leur insatisfaction de voir censurées de nombreuses mesures qu'ils avaient réussi à imposer, au gré du parcours chachuté de la loi immigration. Pierre-Henri Dumont a ainsi considéré que le président de la République avait fait preuve de "duplicité". "La réforme constitutionnelle que nous appelons de nos vœux depuis de très nombreuses années est plus que jamais nécessaire" a-t-il estimé, avant de réclamer une "loi immigration 2".
"N’en déplaise aux juges, l’immigration appelle un sursaut" a, quant à lui, écrit sur X le président du groupe LR de l'Assemblée, Olivier Marleix, appelant également à la réintroduction des mesures censurées "dans un projet de loi immigration 2".
Enfin, du côté du Rassemblement national, Jean-Philippe Tanguy a dénoncé tout à la fois "l'amateurisme" et une "manipulation politique du gouvernement sur l'immigration". Et la présidente des députés RN, Marine Le Pen, a estimé par communiqué que la "très large censure, de fond et de forme", des Sages, "souligne que seule une réforme de la Constitution permettra de répondre aux enjeux migratoires qui touchent de plein fouet notre pays".