Les députés de la commission des finances ont achevé, ce samedi 19 octobre, l'examen de la partie "recettes" du budget 2025. Au fil des débats, engagés mais plutôt apaisés, la copie du gouvernement a été largement remaniée. Et le texte finalement... rejeté. Les groupes de gauche ont voté "pour", estimant que la commission avait fait œuvre de "justice sociale", tandis que tous les autres groupes ont voté "contre", le parti présidentiel dénonçant une "boucherie fiscale". A partir de lundi, c'est le projet de budget du gouvernement qui sera examiné dans l'hémicycle.
C'est un épisode qui augure d'un feuilleton budgétaire particulièrement inhabituel dans une Assemblée nationale sans véritable majorité... La commission des finances a rejeté, ce samedi 19 octobre, la partie "recettes" du projet de loi de finances (PLF) 2025 telle qu'elle l'avait amendée au fil de votes à géométrie variable, au cours desquels les voix des différents blocs se sont mêlées ou opposées, sans que le résultat final ne parvienne à obtenir une majorité.
Finalement, seuls les groupes du Nouveau front populaire ont voté "pour" la version du texte élaborée en commission. Depuis le coup d'envoi des débats, mercredi 16 octobre, les députés de gauche avaient réussi à faire adopter - tantôt en entente avec Les Démocrates, qui font partie du socle gouvernemental, tantôt avec le renfort du Rassemblement national - de nombreuses mesures fiscales chiffrées à "50 milliards de recettes supplémentaires" par rapport au texte initial, a indiqué le président de la commission, Eric Coquerel (La France insoumise).
Celui-ci s'est notamment félicité des mesures visant à pérenniser la contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR), à préserver le pouvoir d'achat des classes moyennes et populaires via la suppression de la hausse de la taxe sur l'électricité, ou encore à faciliter l'accès au logement par la fin des privilèges octroyés en matière de TVA aux meublés de tourisme.
Philippe Brun (Socialistes) s'est satisfait qu'au cours des débats, la commission ait envoyé le message qu'"il était inacceptable de redresser les comptes publics sur le dos des classes populaires et des classes moyennes, en rejetant l’ensemble des mesures qui les frappaient (…) et que le redressement des comptes, s’il devait avoir lieu, devait se faire en mettant à contribution les plus aisés".
Aurélien Le Coq (La France insoumise) a évoqué un budget initial de "violence sociale". "Nous avons pu faire la démonstration qu'autre chose était possible", a-t-il poursuivi, "un budget de justice sociale, un budget de justice fiscale". Eva Sas (Ecologiste et social) s'est réjouie d'"un grand nombre d’avancées dans le sens de la justice fiscale", constat autour duquel s'est retrouvé Emmanuel Maurel (Gauche démocrate et républicaine). "On a fait le job", a-t-il estimé.
Une vision qui n'a pas été partagée par les autres groupes politiques de l'Assemblée. "Le redressement des finances doit passer avant tout par la réduction des dépenses publiques", a martelé Véronique Louwagie (Droite républicaine), fustigeant dans la version amendée du texte "des taxes, toujours des taxes et encore des impôts". Et de dénoncer un "budget qui serait catastrophique pour la France".
"Cette commission s’est transformée en véritable carnaval fiscal", a pour sa part estimé David Amiel (Ensemble pour la République). "Cette boucherie fiscale ferait immédiatement basculer la France dans la récession et dans la crise", a-t-il considéré, pointant "l'alliance entre le Nouveau Front populaire et l’extrême droite" et indiquant que les membres de son groupe voteraient "contre" le texte de la commission qu'il a qualifié de "budget Frankenstein".
Sur la même ligne, Félicie Gérard (Horizons) a critiqué un budget "totalement dénaturé", quand Jean-Paul Matteï (Les Démocrates), à l'initiative de plusieurs amendements de recettes fiscales soutenus par la gauche, a déploré au final un manque d'"équilibre" qui ne serait pas "sain pour notre économie".
Un constat partagé par le rapporteur général de la commission des finances, Charles de Courson (LIOT), dont le groupe fait partie de l'opposition. "Le déséquilibre s’est accentué" au fil de l'examen du texte, a-t-il constaté, évoquant la répartition initiale entre hausse de recettes et baisse des dépenses, ce qui l'a amené à indiquer que son groupe voterait contre la nouvelle version du texte.
"Contre", c'est aussi le vote qui a été celui du groupe de Marine Le Pen et de son allié UDR. Jean-Philippe Tanguy (Rassemblement national) a expliqué que les élus de son groupe s'opposeraient à cette version de la première partie du budget qui ne comportait "pas de ligne", tout en affichant son opposition à la version initiale. Et de reprocher aux groupes du socle gouvernemental d'avoir "menti" car n'ayant pas emprunté, selon lui, le chemin du compromis au cours des discussions. Enfin, Gérault Verny (Union des droites pour la République) a fustigé dans la copie remaniée par la commission des finances un "concours Lépine de la taxe la plus stupide".
Le texte a finalement été rejeté par 29 voix contre 22. A partir de lundi, comme le veut la procédure législative pour le budget, c'est la version initiale de la partie "recettes" du projet de loi de finances, soit celle du gouvernement, qui sera débattue dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale.