Les députés de la commission des affaires sociales ont poursuivi l'examen de la proposition de loi relative à "la fin de vie", mercredi 30 avril, avant les débats dans l'hémicycle qui débuteront le 12 mai. Au coeur des échanges de mercredi, les modalités d'administration de la substance létale dans la cadre de l'aide à mourir.
Quelles seront les modalités concrètes du déroulement d'une "aide à mourir", si la loi est votée, au moment précis de la prise de la substance létale par le patient, tel est l'objet de l'article 9 de la proposition de loi relative à "la fin de vie", qui a été examiné et adopté, mercredi 30 avril, par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale.
Une fois la demande d'aide à mourir acceptée par le collège de soignants constitué pour l'étudier, une date est fixée pour l’administration de la substance létale. La pharmacie hospitalière réalise alors la préparation "et la transmet à la pharmacie d’officine désignée par le médecin ou l’infirmier chargé d’accompagner la personne en accord avec celle‑ci. La pharmacie d’officine délivre la préparation magistrale létale au médecin ou à l’infirmier". Alors que la question du mode d'administration de la substance - par voie orale ou intraveineuse - sera débattue à l'article 16 du texte et que les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) sont attendues sur le sujet, ce sont les conditions de la présence d'un professionnel de santé qui ont été longuement débattues par les députés.
La proposition de loi portée par Olivier Falorni (Les Démocrates) dispose que "lorsqu’il n’administre pas la substance létale, la présence du professionnel de santé aux côtés de la personne n’est pas obligatoire". Le médecin ou l'infirmier aurait pu dans ces conditions délivrer la dose létale au patient ayant requis et obtenu l'accès à l'aide à mourir, avant de se retirer. Le texte initial précise que ce dernier "doit toutefois se trouver à une proximité suffisante pour pouvoir intervenir en cas de difficulté".
Afin de ne pas laisser le patient et ses proches démunis face à d'éventuelles complications liées à l'absorption de la substance létale, Jérôme Guedj (Socialistes) et Ségolène Amiot (La France insoumise) ont porté des amendements visant à rendre obligatoire la présence d'un professionnel de santé, et ce y compris en cas d'auto-administration.
"Je suis d'accord avec vous", a indiqué Olivier Falorni, avant de demander aux députés de retirer leurs amendements au profit de celui de Stéphane Delautrette (Socialistes), rapporteur thématique sur la partie du texte concernée. Celui-ci distingue deux phases : celle de l'administration, durant laquelle la présence du professionnel de santé serait obligatoire dans tous les cas, et celle qui a lieu dans les minutes qui suivent la prise de la substance létale et précédant la mort, au cours de laquelle cette présence sera facultative, en fonction de la demande du patient. Une manière de ne pas contrevenir à l'intimité de la personne avec d'éventuels proches et si cette dernière en a manifesté le souhait. L'amendement, qui a été adopté, précise que le professionnel de santé devra se situer à une proximité suffisante pour être en capacité d'intervenir à tout moment en cas de besoin.
Annie Vidal (Ensemble pour la République) a tenté d'apporter une précision à cette notion de "proximité", en ajoutant les termes "en vision directe", souhaitant ainsi que le professionnel de santé puisse rester "en retrait, mais dans la même pièce, avec la discrétion qui s'impose". Malgré les avis favorables de Stéphane Delautrette et Olivier Falorni, l'amendement n'a pas été retenu.
Afin d'éviter que les héritiers ou ayant droits du patient qui a eu recours à l'aide à mourir n'aient pas à subir les éventuelles conséquences découlant de son décès, si celui-ci venait à être juridiquement considéré comme une forme de suicide, Danielle Simonnet (La France insoumise) a proposé qu'il soit "réputé de mort naturelle".
Son amendement développe l'argument selon lequel "le recours à l’aide à mourir est une conséquence directe de l’affection dont souffre la personne", qui décède par conséquent "des suites de son affection".
Un amendement jugé "hallucinant" par Julien Odoul (Rassemblement national), qui a fustigé ce qu'il a qualifié de "volonté d'atténuer la portée de l'acte". "On parle de la mort administrée, qui par définition n'est pas la mort naturelle", a-t-il fait valoir. Et de conclure : "Ce qui provoque la mort est évidemment la substance létale qui va être administrée, et non pas la maladie du patient en fin de vie". Un raisonnement partagé par Justine Gruet (Droite Républicaine), qui a estimé qu'un "mensonge" allait par cette écriture être introduit dans le texte. L'amendement a cependant été adopté.
Faute d'avoir pu achever l'examen du texte dans la nuit de mercredi à jeudi, les députés de la commission des affaires sociales siégeront vendredi 2 mai pour continuer leurs travaux. Le coup d'envoi des débats sur les soins palliatifs et l'aide à mourir dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale aura lieu le 12 mai.