Mazarine Pingeot reçoit Jocelyne Porcher, sociologue à l'Institut national de la recherche agronomique (Inra).
Engagée pour la défense de l'élevage paysan, Jocelyne Porcher refuse de confondre industrie et élevage, qui n'ont selon elle aucune continuité historique ou technique. Auparavant éleveuse dans les porcheries industrielles, son expérience lui a permis de poser des hypothèses nouvelles sur les relations affectives entre éleveurs et animaux et sur le croisement et la contagion des souffrances entre humains et animaux dans les systèmes industriels. La notion de travail est au coeur de sa réflexion sur l'élevage, les rapports de domestication étant construits par le travail, la question des conditions de travail est inévitable. Elle observe que dans de bonnes conditions les animaux sont curieux et s'investissent dans le travail, tandis que dans des conditions dégradées, ils sont aliénés, perdus pour eux même, avec une existence dénuée de sens. Dans cet entretien, la sociologue s'exprime également sur la question de la mise à mort, qu'elle considère impliquer une réflexion plus générale sur le droit de faire circuler la vie.
Également interrogée sur le mouvement de libération animale, initié dans les années 1970 aux États-Unis et porté par le philosophe Peter Singer, Jocelyne Porcher l'analyse comme une réaction des citoyens à la rupture par l'industrialisation du cycle du don entretenu avec les animaux depuis près de 10 000 ans, et se désole que ce mouvement se débarrasse du problème moral en se débarrassant des animaux.
Face à une crise d'ordre politique et climatique, il est urgent d'interroger notre vision du monde.
Le vivant étant devenu une notion politique, cette nouvelle saison inédite des Grands Entretiens insuffle enfin l'esprit revigorant de la philosophie universitaire dans l'espace publique.
Mazarine Mitterrand Pingeot reçoit les grands penseurs des enjeux liés à la démocratie, à la préservation de la vie ou du réchauffement climatique.