L'Assemblée nationale a adopté, à l'unanimité, la proposition de loi "créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales". Le texte a été voté en première lecture lundi 16 janvier.
120 voix pour, aucune contre ; c'est à l'unanimité que les députés ont adopté en séance publique, lundi soir, la proposition de loi "créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales". Cette adoption en première lecture marque une étape décisive dans le parcours singulier de ce texte qui a d'abord été examiné et voté au Sénat, en octobre dernier, à l'initiative de Valérie Létard (Union centriste), présente dans les tribunes de l'hémicycle ce lundi et largement saluée par la majorité des orateurs.
En fin d'année dernière, le Rassemblement national avait ensuite tenté de le reprendre à son compte pour l'inscrire dans le cadre de sa journée de niche parlementaire, mais le texte avait finalement été soustrait de la "niche" parlementaire du RN pour être inscrit à l'ordre du jour d'une "semaine de l'Assemblée" de façon transpartisane. Le RN a toutefois réussi à imposer l'un de ses élus - Emmanuel Taché de la Pagerie - au poste de corapporteur, en compagnie de la députée Béatrice Descamps (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires). La proposition de loi ainsi adoptée va désormais être à nouveau transmise au Sénat, pour un examen en nouvelle lecture, car les deux Chambres n'ont, à ce stade, pas voté la même version.
Concrètement, le texte a pour ambition de permettre à la victime d'un compagnon violent à se mettre à l'abri le plus rapidement possible, en lui octroyant une aide financière d'urgence, à partir du moment où elle dépose plainte, où une ordonnance de protection est prononcée, ou un signalement effectué. Cette aide pourra prendre la forme d'un prêt à taux zéro, comme le prévoyait le texte voté au Sénat. Mais l'Assemblée nationale a modifié la proposition de loi, afin que l'aide puisse également être adressée sans contrepartie - sous forme de don - aux victimes les plus démunies, en prenant en compte la présence d'enfants à charge.
Quelle que soit la forme retenue, il sera tenu compte de la situation personnelle de la victime pour fixer le montant de l'aide accordée. Cette dernière devra être versée dans un délai maximal de trois jours ouvrés - cinq pour les non-allocataires. Les députés ont également voté la création dans le code pénal d'une peine complémentaire d'obligation de remboursement du prêt versé à la victime, à l'encontre des auteurs de violences au sein du couple, avec un plafond fixé à 5 000 euros.
Le dispositif entrera en vigueur neuf mois au plus tard à compter de la promulgation de la loi. La date précise sera fixée par décret. L'objectif est de permettre à la Caisse nationale des allocations familiales et à la Caisse centrale de mutualité sociale agricole de se préparer à la mise en œuvre du dispositif.
Même s'ils ont eux aussi voté la proposition de loi, les élus de la Nupes auraient préféré un texte plus ambitieux. C'est notamment le cas de Sandrine Rousseau (Écologiste) et Arthur Delaporte (Socialistes et apparentés) qui ont porté des amendements en séance pour étendre sa portée.
Arthur Delaporte aurait ainsi souhaité que l'aide financière puisse être versée aux victimes qui déposent une main courante, et pas uniquement à celles qui portent plainte. Sandrine Rousseau a pour sa part proposé que l'aide ne puisse pas prendre la forme d'un prêt, mais uniquement d'une aide sans contrepartie qui serait systématiquement remboursée par l'auteur des violences.
Les élus de la Nupes et de Libertés, indépendants, Outre-mer et Territoires ont obtenu plusieurs victoires. Alors que le texte excluait initialement du dispositif les étrangers en situation irrégulière sur le territoire du dispositif, les députés ont supprimé cette condition - le gouvernement ayant donné un avis de sagesse sur la question.
En outre, cette fois contre l'avis de l'exécutif, plusieurs modifications ont été apportées au dispositif. La condition de "difficultés financières immédiates" nécessaire pour obtenir l'aide d'urgence a été supprimée, afin de la rendre "véritablement universelle". La proposition de Sandrine Rousseau d'instituer une loi de "programmation pluriannuelle des financements visant à lutter contre les violences faites aux femmes", pour trois périodes successives de 5 ans, a également été votée. Sans que ces quelques modifications apportées n'entament la satisfaction de la ministre déléguée à l'Egalité entre les femmes et les hommes, Isabelle Rome, quant au travail transpartisan mené sur le texte.