Une rentrée qui s'annonce studieuse pour les députés

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L'hémicycle de l'Assemblée nationale, le 28 juin 2022
L'hémicycle de l'Assemblée nationale, le 28 juin 2022 (Christophe ARCHAMBAULT / AFP)
par Soizic BONVARLET, le Vendredi 28 juillet 2023 à 16:17, mis à jour le Lundi 31 juillet 2023 à 18:32

Plein emploi, sécurisation du numérique, lois de finances... Alors que la première année de la XVIe législature vient de s'achever et que les travaux parlementaires ont été suspendus pendant la pause estivale, la rentrée des députés, qui devraient être convoqués dès le 25 septembre en session extraordinaire, s'annonce d'ores-et-déjà chargée.

La pause estivale sera finalement écourtée pour les députés, qui devraient rejoindre les bancs de l'Assemblée le lundi 25 septembre, alors que leur rentrée était initialement escomptée à la date du 2 octobre, qui signera l'ouverture de la session ordinaire pour 2023-2024 avec l'installation de son bureau. Selon les informations du Figaro dévoilées en début de semaine, le président de la République et la Première ministre vont en effet convoquer le Parlement en session extraordinaire, afin d'avancer sur plusieurs textes avant le début de "l'automne budgétaire".

Les députés examineront donc dans un premier temps le projet de loi de programmation des finances publiques, qui détaille la trajectoire budgétaire de la France d’ici à 2027 et que le gouvernement avait échoué à faire adopter en fin d'année dernière, puis le projet de loi "pour le plein emploi".

Objectif plein emploi

Alors que le Sénat l'a adopté le 12 juillet, le projet de loi "plein emploi" sera examiné à l'Assemblée dès cet automne. Le 2 mai dernier, le ministre du Travail Olivier Dussopt était venu présenter devant les députés de la commission des affaires sociales les grandes lignes du texte, qui fixe notamment les contours de la future agence "France Travail" et les conditions à venir pour le versement du revenu de solidarité active (RSA). Cette réforme doit participer à parvenir à l'objectif revendiqué par le gouvernement de plein emploi pour 2027.

Le projet de loi introduit notamment un "contrat d’engagement" afin d’harmoniser les droits et les devoirs des demandeurs d’emploi et allocataires du RSA. La mesure, à destination de ces derniers, introduite par la majorité sénatoriale afin de rendre obligatoire une durée minimale d'activité de 15 heures par semaine, n'a pas été soutenue par le gouvernement. Olivier Dussopt a défendu l'idée de l'instauration d'un cadre souple au moins dans un premier temps en "[laissant] la main aux organismes de référence", en vue de l'"atteinte progressive" de cet objectif de 15 à 20 heures d’activité hebdomadaires. Charge désormais aux députés de revenir ou non sur l'écriture du Sénat durant leur examen du texte.

Sécuriser et réguler l'espace numérique

Filtre anti-arnaque, lutte contre les deepfakes, bannissement des réseaux sociaux pour les cyber-harceleurs, blocage quasi-instantané des sites pornographiques accessibles aux mineurs : le projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique, dit SREN, a été adopté à l'unanimité en première lecture au Sénat, le 5 juillet dernier. Les députés devraient à leur tour se pencher sur le texte juste après l'examen du projet de loi sur le plein emploi, soit début octobre.

Le texte voté par les sénateurs élargit les pouvoirs de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) dans la lutte contre l’accès des mineurs aux contenus pornographiques. Elle pourra notamment ordonner le blocage, sans la décision d’un juge, des sites qui ne vérifient pas l’âge des internautes qui les consultent. La chambre haute a également adopté des amendements gouvernementaux sanctionnant spécifiquement les deepfakes ou "hypertrucages", qui désignent ces techniques de synthèse permettant de concevoir des vidéos ou images trompeuses générées par logiciels, notamment d'intelligence artificielle.

Automne budgétaire

Comme chaque année, l'automne budgétaire dédié à l'examen du projet de loi de finances (PLF) et du projet de loi financement de la sécurité sociale (PLFSS) constituera un moment-phare du dernier trimestre 2023.

Pour ce qui est du budget pour 2024, il est d'ores-et-déjà acquis que les dépenses de l’État diminueront de 4,2 milliards d’euros par rapport au budget 2023. Les fonctions régaliennes, l’Éducation nationale et la transition écologique devraient cependant voir leurs budgets confortés, voire augmentés. Le volet "recettes" du projet de loi de finances sera élaboré après l’été.

Constituant également un moment-phare en termes de manifestation des antagonismes politiques qui s'exercent à l'Assemblée, les oppositions devraient sans surprise s'opposer au budget proposé par le gouvernement. Dans un contexte de majorité relative, il est fort à parier que, comme ce fut le cas pour le PLF et le PLFSS pour 2023, le gouvernement ait à engager sa responsabilité et fasse usage de l'article 49.3 de la Constitution à plusieurs reprises durant l'automne budgétaire. L'attitude du groupe Les Républicains sera particulièrement scrutée à cette occasion, même si c'est sur un autre texte d'envergure que le gouvernement nourrit les plus grands espoirs de rallier le groupe d'opposition.

Immigration : le projet de loi finalement examiné

Plusieurs fois repoussé, le projet de loi sur l'immigration devrait être soumis au Parlement cet automne, à l'issue des élections sénatoriales qui se tiendront le 24 septembre.

Si l'hypothèse avait été un temps évoquée que le gouvernement puisse élaborer un nouveau texte qu'il aurait présenté en conseil des ministres durant le mois de juillet, et ce afin d'y intégrer les demandes des Républicains, dont l'appui s'avérerait indispensable pour son adoption, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait finalement indiqué qu'il le reprendrait "tel qu'il avait été discuté et amendé par la commission des Lois du Sénat".

L'examen du projet de loi au Palais du Luxembourg avait alors été interrompu en raison de la réforme des retraites. Cette version aurait pu satisfaire le groupe Les Républicains de l'Assemblée nationale, s'agissant de la copie rendue par le Sénat dont la majorité est issue du même parti. Mais c'était sans compter les révoltes urbaines survenues à la suite de la mort à Nanterre du jeune Nahel, en juin dernier.

Certains parlementaires LR ayant opéré un lien direct entre les dégradations et la question de l'immigration - le député LR Eric Pauget évoquant notamment "des Français d'origine de vagues migratoires" -, le pas visant à demander plus de fermeté au sein du projet de loi a vite été franchi. Le gouvernement a pour le moment opposé une fin de non-recevoir quant à la possibilité de durcir davantage le texte. Par ailleurs, au vu du calendrier du Sénat et de l'automne budgétaire, le projet de loi a peu de chances d'être examiné à l'Assemblée avant le mois de décembre, voire le début de l'année 2024.

Fin de vie : nouvelle phase de concertation en septembre

Alors que la ministre déléguée auprès du ministre de la Santé, Agnès Firmin Le Bodo, chargée de plancher sur une évolution de la législation actuelle en matière de fin de vie, a indiqué sa volonté de co-construire le projet de loi à venir, et qu'une première phase de discussions avec des parlementaires et des soignants s'est achevée le 20 juillet, de nouvelles réunions devraient avoir lieu les 6 et 7 septembre.

Le projet de loi, que le président de la République, suite aux travaux de la Convention citoyenne réunie sur le sujet, avait souhaité voir émerger "d’ici à la fin de l’été", devrait comporter trois volets. Un premier sur les modalités d'instauration d'une aide active à mourir, ou d'une "mort choisie" selon les termes de la ministre, un autre qui concernera les soins palliatifs, et enfin, un dernier relatif aux droits des patients. Là encore, l'examen du texte au Parlement n'est pas attendu avant la fin de l'année 2023 ou le début de l'année 2024.