Auditionné par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a détaillé les contours de la future agence "France Travail", vouée à se substituer à Pôle emploi, et expliqué les intentions du gouvernement à propos du RSA.
Tenter de tourner la page de la réforme des retraites en ouvrant d'autres chantiers... C'est la stratégie du gouvernement, illustrée par l'audition d'Olivier Dussopt devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale ce mardi 2 mai. Au cours de cette audition, le ministre du Travail a dévoilé les grandes lignes du projet de loi relatif à l'emploi que son ministère prépare actuellement, pour un examen au Parlement d'ici à l'été. Le texte fixera notamment les contours de la future agence "France Travail" et les nouvelles conditions que le gouvernement souhaite mettre en place pour le versement du revenu de solidarité active (RSA).
Olivier Dussopt est revenu sur les recommandations du rapport produit par le haut-commissaire à l'emploi, Thibaut Guilluy, qui l'accompagnait lors de son audition, fruit de huit mois de concertation avec l'ensemble des acteurs. Le ministre a fait part de son "soutien global" aux principes dégagés par le rapport, sans forcément reprendre l'intégralité de ses 99 propositions dans le projet de loi à venir. Parmi les grandes orientations du rapport soutenues par le gouvernement, le ministre du Travail a cité en premier lieu "la volonté de transformer et d'améliorer le service public de l'emploi".
Ce n'est pas un big bang institutionnel. Olivier Dussopt, ministre du Travail, du plein emploi et de l'insertion
Rappelant les chiffres du chômage, atteignant un taux de 7,1% au dernier trimestre 2022, Olivier Dussopt s'est néanmoins montré optimiste, considérant que le plein emploi était un "objectif atteignable", et faisant de France Travail l'un des outils majeurs au service de cette ambition.
"Ce n'est pas un big bang institutionnel", a-t-il voulu préciser à propos de l'émergence de France Travail en lieu et place de Pôle emploi. Décrivant ce nouvel opérateur comme "le coordinateur principal du réseau de l'emploi", il a indiqué que sa mission première résiderait dans "la coordination, le partage et l'orientation avec l'ensemble des acteurs", dont les missions locales, régions et départements. Concernant la gouvernance, le ministre a dit la volonté d'un "partage" entre l'Etat, les collectivités et les partenaires sociaux.
Parmi les nouvelles compétences dévolues à France Travail : l'accompagnement systématique des allocataires du RSA, point qui suscite à ce jour le plus de débats. Déplorant le fait que "seulement 40% des allocataires du RSA sont inscrits à Pôle emploi, et 17% suivis par aucune structure", Olivier Dussopt a indiqué que le gouvernement souhaitait que "le suivi professionnel soit la règle". "C'est la raison pour laquelle nous souhaitons qu'il puisse y avoir entre 15 et 20 heures d'activité par semaine", a-t-il aussi pousuivi, martelant qu'il ne s'agissait "ni de travail gratuit, ni de bénévolat obligatoire".
Insistant sur la notion d'accompagnement, le ministre du Travail a assumé l'idée d'un "contrat réciproque", dont il a considéré qu'elle présidait déjà à la création du revenu minimum d'insertion (RMI), en 1988. Rappelant que la radiation d'un allocataire est déjà possible, Olivier Dussopt a indiqué qu'un autre type de sanction sera instaurée, consistant à "suspendre" les droits des bénéficiaires si ces derniers ne répondent pas à leurs obligations nouvelles, une mesure "très facilement reversible" et "à la main de celles et ceux qui accompagnent", a-t-il souligné.
Notre crainte c'est qu'avec vous la protection sociale ne soit plus un droit, mais qu'elle doive se mériter. Marie-Charlotte Garin (Ecologiste)
Présent en commission des affaires sociales, François Ruffin (La France insoumise) a fustigé un "RSA sous conditions" quand Arthur Delaporte (Socialistes) a dénoncé une logique selon laquelle les allocataires "seraient responsables de leur précarité", avant de déplorer qu'ils soient "les prochains à passer sur le billard de la table de dissection de notre modèle social au nom du sacro-saint plein emploi". "Notre crainte c'est qu'avec vous la protection sociale ne soit plus un droit, mais qu'elle doive se mériter", a pour sa part déclaré Marie-Charlotte Garin (Ecologiste). Du côté de la majorité et de la droite, c'est sur les questions liées à la gouvernance de France Travail que des inquiétudes se sont faites jour, Nicolas Turquois (Démocrate), rejoint notamment par Stéphane Viry (Les Républicains), pointant les risques liés à la concurrence entre les différentes structures et échelles territoriales.