Projet de loi sur le numérique : la majorité défend un texte de "protection", tandis que certaines oppositions s'inquiètent

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par Léonard DERMARKARIAN, le Jeudi 5 octobre 2023 à 01:17, mis à jour le Jeudi 5 octobre 2023 à 10:33

Les députés ont débuté, mercredi 4 octobre, l'examen dans l'hémicycle du projet de loi "visant à réguler et sécuriser l'espace numérique". Le gouvernement et la majorité défendent un texte de "protection", tandis que certaines oppositions craignent un risque pour les libertés. 

"L’insécurité que nos concitoyens rencontrent sur Internet sapent leur confiance dans la transition numérique". C'est par ces mots que Jean-Noël Barrot, ministre chargé du Numérique et des Télécommunications, a ouvert l'examen du projet de loi visant à "réguler et sécuriser l'espace numérique" (SREN), mercredi 4 octobre, à l'Assemblée nationale.

Le texte, voté en première lecture par le Sénat au début de l'été, comporte un large panel de mesures pour lutter contre l'exposition des mineurs à la pornographie, combattre le cyberharcèlement et la haine en ligne, ainsi que la désinformation et les arnaques via le numérique.

Il vise également à réguler certaines activités comme la location de meublés touristiques, ou encore à soutenir l'émergence d'une industrie française du cloud, et à transposer le contenu de deux règlements récemment adoptés par l'Union européenne qui veut, elle aussi, réguler l'espace numérique via le Digital Markets Act et le Digital Services Act.

Pour le gouvernement, un texte de "protection"

Lors de la présentation liminaire, Jean-Noël Barrot a mis en avant "trois affluents" ayant irrigué le texte : les règlements européens DMA et DSA, les récents travaux parlementaires (du Sénat sur la pornographie en ligne, de l'Assemblée sur les influenceurs, le harcèlement, la majorité numérique) ainsi que les résultats du Conseil national de la Refondation (CNR) sur le Numérique. Pour le ministre chargé du Numérique et des Télécommunications, le résultat est un texte de "protection de nos concitoyens, de nos enfants, de nos entreprises et collectivités dans l'espace numérique".

Au diapason du ministre, le rapporteur général du projet de loi, Paul Midy (Renaissance), a appelé à "rendre notre espace numérique aussi civilisé que l’espace public", alors que certains passent désormais, chaque semaine, "plus de temps" dans le premier que dans le second et que 50% des arnaques et des phénomènes de harcèlement ont lieu en ligne, selon le député.

Pour certaines oppositions, un risque pour les libertés

Sur ce texte défendu par le gouvernement et la majorité comme une nécessité et un progrès, les groupes d'oppositions sont partagés : si le groupe Libertés, Indépendants et Outre-mer et territoires (Liot), juge, par la voix de Christophe Naegelen, que le texte va "dans le bon sens", ce dernier suscite cependant de vives critiques au sein de plusieurs groupes d'oppositions, dont le Rassemblement national et la France insoumise. 

Critiquant un texte ressemblant à un "gloubi-boulga indigeste, aussi bien pour les enfants qui ne seront pas plus protégés avant qu’après cette loi, et pour les adultes qui risquent de voir leurs libertés individuelles mises en péril", Sophia Chikirou (LFI) voit notamment dans le filtre anti-arnaques proposé par l'article 6 un risque de "censure d’État". Selon la députée, le texte pourrait à terme ouvrir la voie à une "surveillance généralisée" d'Internet.

Le premier groupe d'opposition de gauche a d'ailleurs déposé une motion de rejet préalable du texte, qui n'a pas été adoptée (32 voix "pour", 172 "contre", 2 abstentions). Réagissant avant le vote à cette motion de rejet préalable, le ministre Jean-Noël Barrot a critiqué la stratégie de LFI, dépeinte à travers une anaphore comme "La France insouciante".

Du côté du RN, si Aurélien Lopez-Liguori a salué de "bonnes mesures" contenues par le projet de loi (lutte contre la pornographie en ligne, cloud, filtre anti-arnaques), le député a cependant critiqué les tentatives de la majorité, notamment du rapporteur général Paul Midy, d'amender le texte pour lever l'anonymat en ligne - une disposition "liberticide", selon l'élu du groupe de Marine Le Pen. 

Dans la soirée de mercredi, les députés ont débuté l'examen de l'article 1er du projet de loi. Le débat sur le texte se poursuivra ce jeudi 5 octobre et la semaine prochaine à l'Assemblée nationale.