Les députés ont examiné en deuxième lecture le projet de loi constitutionnelle visant à inscrire la préservation de l'environnement dans la Constitution. Comme lors de l'examen en commission, ils ont amendé le texte qui avait été adopté en première lecture, espérant convaincre les sénateurs de le voter les mêmes termes, afin d'ouvrir la voie à un éventuel référendum. Le vote sur le projet de loi aura lieu ce mardi 22 juin dans l'hémicycle.
"Faire un pas vers le Sénat". La formule a été répétée à l'envi, lors de l'examen en deuxième lecture du projet de loi constitutionnelle "complétant l’article 1er de la Constitution et relatif à la préservation de l’environnement", qui a eu lieu lundi 21 juin et qui doit être voté ce mardi 22 juin.
En choisissant de reformuler la version initiale de l'article unique du texte, la majorité comme le gouvernement ont insisté sur leur volonté de parvenir à un consensus, en vue d'aboutir à un référendum, comme s'y était engagé Emmanuel Macron devant les participants de la Convention citoyenne pour le climat. Pour pouvoir le déclencher, les deux chambres doivent aboutir à un texte identique.
Sans surprise, les députés ont achevé leur examen sur la même version que celle adoptée en commission la semaine dernière (comme il s'agit d'une révision constitutionnelle, la discussion en séance porte, en deuxième lecture, sur le texte transmis par l’autre Chambre et non sur celui de la commission).
Exit donc, la fin de la phrase retenue initialement par le gouvernement, qui impliquait la "lutte" contre le dérèglement climatique. L'Assemblée s'est accordée sur la version du Sénat, sur ce point précis, remplaçant le verbe "lutter" par le verbe "agir". En revanche, elle a rétabli la première partie de l'article, qui implique donc que la France "garantit la préservation de l'environnement".
"Garantir un droit, c'est lui donner la plénitude de ses effets", a insisté le garde des Sceaux. "La proposition du gouvernement aura des effets juridiques. Et c'est heureux", a précisé Éric Dupond-Moretti, rappelant que cette bataille, à première vue sémantique, emporte des conséquences juridiques. Il s'agit de créer une "quasi-obligation" de résultats en matière environnementale pour les pouvoirs publics, a plaidé le ministre de la Justice.
S'appuyant sur l'actualité et l'abstention historique lors du premier tour des élections régionales et départementales, Pieyre-Alexandre Anglade (LaREM) a assuré que la genèse du projet de loi représentait un "bel exemple de ce que pourrait être la démocratie représentative", et que sa réalisation pourrait redonner confiance aux citoyens en leurs capacités à faire bouger les choses. Le rapporteur du texte a également accompagné sa main tendue vers le Sénat de critiques virulentes visant la Chambre haute qui, selon lui, a préféré "torpiller le texte" du gouvernement, avec une proposition "hypocrite" et des ajouts "cosmétiques".
Les espoirs affichés de voir un consensus trouvé avec le Sénat, à majorité à droite, ont été accueillis avec des doutes franchement exprimés par Julien Aubert (LR). Le député de Vaucluse a fustigé une "fausse ouverture, fragile juridiquement et intenable politiquement", qui ne "fera pas florès auprès des sénateurs". "Vous ne voulez pas assumer l'échec [de la révision constitutionnelle]."
"Nous vous avions prévenu que le Sénat refuserait le texte", a-t-il également souligné, rejouant le match de l'examen en première lecture. Julien Aubert a raillé le comportement du gouvernement, coupable, d'après lui, de danser un "tango sur un seul pied". "Vous refusez de comprendre que pour qu'il y ait une révision constitutionnelle, vous avez besoin d'un accord."
Les autres députés de l'opposition présents dans l'hémicycle ont témoigné de leur inconfort d'être pris en étau dans ce jeu politique entre l'exécutif et la droite, alors que l'enjeu de la lutte contre le dérèglement climatique est majeur. Hubert Wulfranc (PCF) a qualifié cette séquence de "vaudeville législatif". "Vous êtes foncièrement incapable de répondre à la crise climatique autrement qu'en la précipitant", a lancé Mathilde Panot (LFI).
Cécile Untermaier (PS) a pour sa part déploré la faiblesse de la qualité du débat parlementaire, regrettant que les propositions de l'opposition ne soient pas suffisamment considérées. "Tout est figé, comme sur un vitrail", a-t-elle réagi, alors "qu'il est de l'intérêt de tous de voir l'environnement inscrit dans la Constitution". Une opinion partagée par Bertrand Pancher (Libertés et territoires), qui a critiqué "l'ersatz de compromis" présenté par la majorité présidentielle. L'élu a prédit un sort funeste à la révision constitutionnelle, faute d'accord entre les deux Chambres. "Chaque partie pourra alors accuser l'autre d'être à l'origine de cet échec", a-t-il regretté.