Les députés ont adopté, jeudi 3 février, une proposition de résolution "pour une représentation plus juste des Français à l’Assemblée nationale". Ce texte, sans portée contraignante, présenté dans le cadre de la journée d'initiative parlementaire du groupe MoDem, invite le gouvernement "à conduire une réflexion sur la réforme du mode de scrutin des élections législatives".
"Si le Parlement est contesté, c'est parce que sa composition est trop éloignée du pays." C'est ainsi qu'Isabelle Florennes (MoDem) a justifié la nécessité de réformer le mode de scrutin des élections législatives, portée par une proposition de résolution de son groupe. Le texte, qui n'est pas contraignant, a été adopté à l'unanimité (65 voix pour et 2 abstentions), jeudi 3 février, au cours de la journée d'initiative parlementaire du MoDem.
Dans les faits, cette proposition de résolution invite le gouvernement à réfléchir à une réforme, pour rendre le Parlement "davantage représentatif des préférences partisanes de chaque électeur". Concrètement, l'exposé des motifs du texte explique que "l’instauration d’un scrutin proportionnel, avec par exemple un seuil fixé à 5 % des voix, paraît être une voie envisageable". Une idée porté de longue date par le président du Mouvement démocrate, François Bayrou. Une idée "de plus en plus partagée par les Français", a souligné Isabelle Florennes.
Pour l'élue MoDem, cette réforme contribuerait à répondre à la crise de la démocratie et à la défiance envers les élus qui s'expriment notamment à travers la hausse de l'abstention. "Cela apporterait une légitimité indéniable aux candidats élus et donc à notre Assemblée", a-t-elle indiqué. "Faire évoluer notre mode de scrutin serait un gage fort pour une réappropriation de l'espace civique par les citoyens", a complété Isabelle Florennes. Déminant à l'avance les critiques portant sur le scrutin proportionnel, elle assuré que celles-ci étaient "infondées", qu'elles touchent aussi bien au risque d'instabilité politique qu'à la prétendue perte d'influence du président de la République qu'elle entraînerait, par rapport au Premier ministre.
La proposition de résolution a été favorablement accueillie par la ministre déléguée à la Citoyenneté, Marlène Schiappa, qui a rappelé que des projets de réforme avaient été menés durant le quinquennat, sans succès. L'affaire Benalla, puis la crise sanitaire, ayant notamment bouleversé l'agenda parlementaire. "Cette réflexion devra se poursuivre au-delà des échéances électorales à venir", a affirmé Marlène Schiappa. Une telle réforme permettrait de "répondre à la défiance croissante des citoyens", a complété Jean-Michel Mis (LaREM).
Tout en soutenant le texte, les députés de l'opposition se sont montrés critiques. "L'introduction d'une dose de proportionnelle était un engagement formel du président de la République", a rappelé Bertrand Pancher (Libertés et territoires). "Cinq ans plus tard, nous débattons d'une proposition de résolution non contraignante, à deux mois de l'élection présidentielle", s'est-il étonné, y voyant la "démonstration de l'impuissance [du MoDem] à peser sur la majorité et le gouvernement]". Et de remarquer que le groupe centriste n'a "même pas osé" passer par une proposition de loi au cours de cette journée d'initiative parlementaire.
Dans une veine similaire, Jean-Christophe Lagarde (UDI et indépendants) a fustigé la "promesse trahie" d'Emmanuel Macron. Pour lui, la représentation est "faussée" par le mode de scrutin actuel, qui ne vise pas à assurer une juste représentation des Français mais à dégager une majorité au service de l'Exécutif. Ainsi, la majorité a obtenu quelque 32 % des voix aux élections législatives de 2017, mais occupe environ 60 % des sièges à l'Assemblée. "Ça peut éloigner nos concitoyens de l'envie de voter lorsqu'ils ne sont pas dans le côté binaire de la Vème République. [...] Cela lamine beaucoup de nuances."
Gérard Leseul (Socialistes et apparentés) a, pour sa part, pointé l'intitulé "particulièrement flou" de la proposition du MoDem, qui ne précise pas les contours de la réforme souhaitée mais se contente d'ouvrir des pistes de réflexion. Mais Christophe Euzet (Agir ensemble) a souligné que l'essentiel était "d'ouvrir le débat" et a alerté contre le risque de "l'émiettement de l'offre politique" que pourrait provoquer le passage à un scrutin proportionnel. Cette réforme est un "véritable serpent de mer institutionnel", a pointé Stéphane Peu (Gauche démocrate et républicaine). L'élu communiste a toutefois fait part de son souhait de la voir un jour votée et mise en oeuvre : "Avec la proportionnelle, cela en serait fini de l'arrogance et des logiques monarchiques qui exaspèrent tant nos concitoyens", a-t-il estimé.