De l'endométriose aux prix de l'énergie, en passant par la délinquance et l'immigration, les députés du Rassemblement national ont présenté, mardi 19 septembre, les propositions de loi au programme de leur journée d'initiative parlementaire, qui aura lieu le 12 octobre. Entre sujets transpartisans et marqueurs traditionnels, le groupe présidé par Marine Le Pen espère contraindre d'autres groupes à voter certains de ses textes.
Il s'agit, selon Jean-Philippe Tanguy (Rassemblement national), d'une "niche raisonnable qui ne vise pas à créer des polémiques stériles". Mardi 19 septembre, les députés du Rassemblement national ont présenté, lors d'une conférence de presse organisée à l'Assemblée nationale, les textes de leur journée d'initiative parlementaire, qui aura lieu jeudi 12 octobre.
Lors de cette journée, ce sont les élus du groupe présidé par Marine Le Pen qui fixeront l'ordre du jour dans l'hémicycle de l'Assemblée. Parmi les sept textes présenté mardi matin, plusieurs semblent avoir été taillés pour mettre en difficulté la majorité, ainsi que Les Républicains et les groupes de la Nupes. "Ce sont des textes qui sont susceptibles de faire consensus ou d'obtenir une majorité si les autres groupes politiques étaient cohérents avec les valeurs et les propositions qu'ils affichent", a expliqué Jean-Philippe Tanguy.
Le premier texte à l'ordre du jour de l'hémicycle le 12 octobre sera une proposition de loi visant à "soutenir les femmes qui souffrent d'endométriose". L'objectif du dispositif est de créer pour les femmes souffrant de cette maladie chronique un "statut d'affection longue durée exonérante"; mais aussi pour celles qui "en expriment le besoin", de leur reconnaître la qualité de "travailleuse handicapée". Le texte se situe dans la droite ligne de la proposition de résolution adoptée en janvier 2022 par l'Assemblée nationale, à l'initiative de La France insoumise. "Cette résolution n'a pas force de loi", a commenté le rapporteur de la proposition de loi du RN, Emmanuel Taché de la Pagerie.
Expliquant que "le gouvernement [n'a] jamais tiré de conséquences du vote unanime de la représentation nationale", le député affirme vouloir "dépasser les clivages partisans" pour légiférer sur le sujet. "Cette proposition de loi est une opération grossière", a d'ores et déjà dénoncé dans l'Obs l'auteure de la résolution adoptée en janvier 2022, Clémentine Autain (La France insoumise). Parlant d'un "écran de fumée", l'élue LFI espère que le nouveau ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, prendra un décret sur le sujet, afin de "couper l'herbe sous le pied du RN".
Une attitude dénoncée par Emmanuel Taché de la Pagerie, qui critique les "pudeurs de jeunes filles de certaines députées LFI" qui seraient, selon lui, "à jamais disqualifiées pour parler des femmes" puisque "personne n'a soutenu l'exclusion d'Adrien Quatennens de leur groupe". Il estime, par ailleurs, que si Aurélien Rousseau prenait un décret sur l'endométriose, alors "le RN aura servi d'accélérateur".
Le deuxième texte présenté par le Rassemblement national est une proposition de loi "visant à supprimer ou à suspendre les allocations familiales pour les parents d'enfants criminels ou délinquants" du député Bryan Masson. Il permettra, selon son auteur, de "donner l'occasion au gouvernement et à sa majorité de passer enfin des paroles aux actes" : "Je donne à la majorité la possibilité de donner une suite législative aux premières paroles du président de la République [après les émeutes de juin] qui envisageait des sanctions financières à destination des parents", explique le député RN.
Les députés Les Républicains sont également visés : "Cela permettrait aussi au groupe LR de sortir de sa posture idéologique pour se ranger derrière [ce texte] qui va dans le sens de ce qu'il propose." Le numéro deux du groupe de Marine Le Pen, Jean-Philippe Tanguy, a d'ailleurs profité de la conférence de presse pour moquer les députés du groupe présidé par Olivier Marleix : "Les Républicains ça n'existe plus, c'est de la poussière d'étoile", a estimé le député de la Somme. "Il y a autant de groupes Républicains que de députés, parfois même plusieurs groupes dans un même député."
Les députés RN défendront également une proposition de loi "visant à baisser la facture énergétique des Français et des entreprises sur le territoire national". Le texte propose de sortir du système européen de fixation des prix de l'électricité, en supprimant "la base légale mettant en œuvre le système de l'Arenh", mais aussi de rétablir les prix règlementés de vente du gaz naturel. Défendu par Alexandre Loubet, qui sera le directeur de campagne du parti pour les élections européennes, le texte vise aussi à poser les premiers jalons du RN en vue du scrutin de juin 2024.
Le Rassemblement national proposera également d'interdire l'écriture inclusive, qualifiée de "dinguerie linguistique", dans tous les actes administratifs, ainsi que dans la littérature liée à l'enseignement, mais aussi à travers deux autres textes de créer un "complément de revenu garanti par l'Etat pour les étudiants qui travaillent durant leurs études" ou encore d'accorder l'asile politique à Julian Assange.
Du côté de ses marqueurs traditionnels, le groupe RN a aussi inscrit à l'ordre du jour une proposition de loi visant à "renforcer le contrôle des déclaration de minorité des étrangers" par la généralisation des tests osseux. Déposé en septième position, il est cependant peu probable que les députés aient le temps d'examiner ce texte dans le temps imparti à une journée d'initiative parlementaire. "L'important c'est que ce soit étudié en commission", anticipe Jean-Philippe Tanguy, sachant que le projet de loi sur l'immigration permettra à son groupe de se faire entendre sur le sujet le moment venu.
La stratégie du RN sera-t-elle payante ou ses textes seront-ils rejetés en bloc par l'Assemblée nationale, comme cela avait été le cas en janvier 2023 ? "Nous pouvons craindre un nouveau sectarisme qui nous laisse songeur mais qui est sévèrement condamné par les Français dans tous les sondages", commente Jean-Philippe Tanguy, qui nie toutefois tout "isolement" du Rassemblement national au sein de l'hémicycle.