Les députés s'apprêtent à examiner dans l'hémicycle le projet de loi 3DS, qui révise la relation entre collectivités territoriales et État dans divers domaines. Le gouvernement a déposé plusieurs amendements en vue de la séance, dont l'un sur la réforme de la métropole d'Aix-Marseille. En commission, les députés ont détricoté plusieurs ajouts opérés par le Sénat qui a examiné le texte en juilletdernier.
C'est une version largement revisitée qui arrive dans l'Hémicycle lundi 6 décembre après-midi. En commission, les députés ont procédé à de nombreuses modifications du projet de loi "3DS" ("relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale"). Le texte, qui était passé de 84 à 217 articles lors de son examen au Sénat, est redescendu à 192 articles. Selon les rapporteurs, il vient concrétiser les attentes des citoyens et des élus locaux entrevus durant le "Grand Débat national".
À [l'occasion du Grand débat], se sont manifestées une attente très forte pour renforcer l’action publique de proximité ; une aspiration à une meilleure prise en compte des particularités locales et à une organisation territoriale des politiques publiques
moins rigide ; [...] et une forme de fatigue à l’égard des réformes institutionnelles incessantes. Rapport sur le projet de loi 3DS
Exit les mesures les plus controversées que les sénateurs avaient ajoutées : droit de veto du maire sur l'installation d'éoliennes, conditionnement de ressources pour le versement du RSA, abattage de loups dans les zones de protection renforcée... De la même manière, les députés ont à nouveau confié aux préfets de région la présidence des Agences régionales de santé, dont le rôle a été mis en lumière lors de la survenue de l'épidémie de Covid-19. Les sénateurs avaient pour leur part privilégié les présidents des conseils régionaux.
Pour aboutir à un accord en commission mixte paritaire - espéré, car il serait symbolique sur un texte touchant à la relation entre État et collectivités territoriales - députés et sénateurs devront parvenir à s'entendre sur les quotas et conditions de construction des logements sociaux. Alors que le projet de loi 3DS prévoit de prolonger la loi SRU, le Sénat a largement adouci les conditions prévues pour moins pénaliser les quelque 500 communes qui n'atteindraient pas le taux de logements sociaux prévu par le texte. En commission, avant de le faire dans l'Hémicycle, la majorité est déjà revenue à l'esprit initial du projet de loi.
De manière similaire, les députés sont revenus sur le système de "transfert à la carte" de certaines compétences aux communes, privilégiant une prime à l'intercommunalité. C'est le cas concernant la compétence en matière de gestion de l'eau et d'assainissement, serpent de mer entre les tenants des deux camps. Signe de l'inflexibilité de la majorité présidentielle en la matière : une proposition de loi communiste qui tentait elle aussi redonner la main aux communes a récemment été écartée.
Des débats engagés sont également attendus sur l'expérimentation de la recentralisation du RSA, l'une des mesures phares de la réforme, le transfert de certaines routes aux départements et régions qui en font la demande et sur le transfert de la médecine scolaire aux collectivités. Les groupes parlementaires devront toutefois soigneusement choisir leurs batailles : un temps législatif programmé de 40 heures est prévu, réparti en fonction du nombre de députés de chaque groupe représenté au Palais Bourbon.
Autre point à surveiller au cours de l'examen en séance publique : 49 amendements gouvernementaux, dont certains d'importance, ont été déposés sur le texte. Plusieurs amendements autorisent notamment le gouvernement à légiférer par ordonnance. En particulier au sujet du bail réel solidaire (un dispositif qui permet de faire baisser le prix des logements) ou pour les conditions d'indemnisation du retrait-gonflement des argiles (qui fait des ravages sur les logements individuels et dont l'indemnisation reste limitée).
D'autres amendements classiques n'en portent pas moins des réformes d'envergure. C'est le cas de la refonte du statut de la métropole Aix-Marseille-Provence, promise par Emmanuel Macron dans le cadre du plan "Marseille en grand". Le gouvernement propose de réécrire complètement la version adoptée au Sénat, en prévoyant d'y adjoindre la suppression des conseils de territoire, mais aussi de transférer certaines compétences aux communes composant la métropole. C'est le cas de la voirie, mais pas du ramassage des ordures. Cette refonte s'inscrit en outre dans un climat politique tendu : la vice-présidente de la métropole, Sophie Joissains (UDI), a présenté sa démission, faisant part de ses craintes sur les évolutions des règles de financement pour les communes, également prévues par l'amendement.
Parmi les autres propositions du gouvernement, figurent la clarification des attributions des acteurs du Grand Paris, la prolongation du délai de planification pour les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols, une expérimentation pour renforcer la lutte contre le non-recours aux droits sociaux, ou encore la simplification de la procédure de déclaration d’utilité publique de travaux. De nombreux sujets qui occuperont l'Assemblée au cours des deux semaines à venir. La fin de l'examen de ce texte technique, mais que le gouvernement présente aussi comme "concret", est prévue pour le 17 décembre.