Courses alimentaires avec les tickets-restaurant : la prolongation de la mesure validée par les députés en commission

Actualité
par Soizic BONVARLET, le Mercredi 22 novembre 2023 à 16:47, mis à jour le Mercredi 22 novembre 2023 à 17:38

La proposition de loi, présentée par les groupes de la majorité, afin de proroger d'un an le dispositif permettant d'utiliser les titres-restaurant pour acheter des produits alimentaires qui ne sont pas directement consommables (œufs, viande, poisson, riz, pâtes, etc.) a été approuvée en commission, mardi 21 novembre au soir. Le texte sera examiné jeudi 23 novembre dans l'hémicycle de l'Assemblée. 

Faire des courses alimentaires avec des tickets-restaurant : l'extinction, jusque-là prévue au 31 décembre, de cette possibilité offerte aux salariés depuis l'été 2022, a suscité inquiétudes et critiques ces dernières semaines. À tel point que, la semaine dernière, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, s'est dit "favorable" à sa prolongation dans le temps.

Restait à trouver une solution législative. Dès le vendredi 17 novembre, les groupes de la majorité présidentielle (Renaissance, Démocrate, Horizons) ont donc déposé, à l'Assemblée nationale, une proposition de loi "visant à prolonger en 2024 l’utilisation des titres-restaurant pour des achats alimentaires non directement consommables", qui a immédiatement été mise à l'ordre du jour par le président de la commission des affaires économiques, Guillaume Kasbarian (Renaissance). Résultat, le texte a passé le stade de la commission mardi 21 novembre au soir. 

Une mesure d'urgence avant une refonte globale

Défendue en commission par Anne-Laure Babault (Démocrate), la proposition de loi est constituée d'un article unique qui prolonge, jusqu'au 31 décembre 2024, la disposition dérogatoire prévue dans la loi du 16 août 2022 portant "mesures d'urgence pour le pouvoir d'achat". Prévoyant un usage élargi des titres-restaurant, cette dérogation permet à leurs détenteurs de s'en servir pour acheter des produits frais, des pâtes, du riz, des conserves, etc. 

"Les circonstances qui ont justifié la mise en place en 2022 persistent", a expliqué Guillaume Kasbarian, faisant référence à des prix qui restent élevés et qui pèsent sur le pouvoir d'achat des ménages, avant que la ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, Olivia Grégoire, ne fasse part de son "franc soutien, massif" au texte.

Évoquant une "mesure urgente qui doit appeler une réflexion plus profonde et structurelle sur le sujet", la ministre a confirmé souhaiter une réforme "structurante" du dispositif à mener avec les corps intermédiaires, sur les sujets notamment liés à la dématérialisation, aux dons de titres-restaurant aux associations, mais également à la liste de produits éligibles.

Alors que cet avantage social concerne 5,5 millions de salariés, la plupart des députés ont souligné son utilité redoublée pour faire face aux effets persistants de l'inflation, ainsi que dans un contexte de développement du télétravail. "En aucun cas il ne s'agit d'un chèque alimentaire ou d'une aide à la consommation", a cependant tenu à souligner la rapporteure, ajoutant que "cette proposition de loi (...) ne doit pas conduire à une mutation partielle du titre-restaurant".

Jamais on ne reviendra en arrière sur l'utilisation des tickets-restaurant, surtout dans la conjoncture économique et sociale que l'on connaît, donc faisons œuvre utile. Fabien Di Filippo (LR)

"La commission nationale des titres-restaurant estime que 500 millions d'euros se seraient détournés des restaurants et des commerces de bouche au profit de la grande distribution, sur un volume global de 9 milliards d'euros", a indiqué Anne-Laure Babault, évoquant un "effet de bord" conduisant à la prudence quant à toute évolution du périmètre du dispositif, et ce au nom de la préservation des TPE et PME.

Une préoccupation également relayée par Pascal Lavergne (Renaissance), qui s'est opposé à la pérennisation du dispositif, là où des amendements issus de tous les groupes d'opposition ont proposé de prolonger de deux ans, voire jusqu'en 2028, la mesure dérogatoire relative aux denrées dites brutes. "Jamais on ne reviendra en arrière sur l'utilisation des tickets-restaurant, surtout dans la conjoncture économique et sociale que l'on connaît, donc faisons œuvre utile", a ainsi déclaré Fabien Di Filippo (Les Républicains).

"Détresse" et "ségrégation" alimentaire

Plus globalement et tout en affichant son soutien à la proposition de loi, Julie Laernoes (Ecologiste) a appelé le gouvernement et sa majorité à aller plus loin et à "se saisir urgemment de la question de l'accès à l'alimentation, grande oubliée des politiques publiques", évoquant une "véritable ségrégation alimentaire dans la société française".

Sophia Chikirou (La France insoumise) a également souhaité alerter sur la "détresse alimentaire" qui touche nombre de salariés modestes, y compris ceux percevant des tickets-restaurant, dont la valeur moyenne par unité s'élève à 7,70 euros, ne permettant pas de manger "correctement".

La proposition de loi, votée à une large majorité en commission sera examinée dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale jeudi 23 novembre.