Budget de la Sécu : fait inédit, le PLFSS est transmis au Sénat sans avoir été adopté par l'Assemblée nationale

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La ministre déléguée chargée des Relations avec le Parlement, Nathalie Delattre, le 05 novembre 2024.
La ministre déléguée chargée des Relations avec le Parlement, Nathalie Delattre, le 05 novembre 2024. LCP
par Maxence Kagni, le Mercredi 6 novembre 2024 à 01:41, mis à jour le Jeudi 7 novembre 2024 à 09:01

L'examen en première lecture du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour l'année 2025 s'est arrêté, mardi 5 novembre à minuit, sans que les députés soient parvenus à son terme en raison de l'épuisement du délai prévu par la Constitution. Le texte va être transmis au Sénat sans avoir été adopté par l'Assemblée nationale, que ce soit par un vote ou par un recours au 49.3. Il s'agit d'un fait inédit. 

C'est une première. Le budget de la Sécurité sociale n'a pas été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale. Faute de temps, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour l'année 2025 n'a pas non plus été entièrement examiné par les députés, le délai de 20 jours prévu par la Constitution pour la première lecture au Palais-Bourbon étant arrivé à expiration mardi 5 novembre à minuit

Le texte va donc donc être transmis au Sénat dans des conditions inédites, sans qu'un vote ait eu lieu à l'Assemblée ou que le gouvernement ait eu recours au 49.3 pour faire adopter le PLFSS. "Le gouvernement décide de saisir le Sénat du texte qu'il a initialement présenté, modifié par un certain nombre d'amendements votés [par l'Assemblée nationale]" qui seront précisés ultérieurement, a indiqué à la fin de la séance, la ministre chargée des Relations avec le Parlement, Nathalie Delattre.

"Obstruction organisée"

Anticipant ce dénouement, les députés d'opposition avaient protesté, accusant le "bloc central" de vouloir faire traîner les débats : "En deux heures de séance, nous avons examiné seulement 30 amendements, c'est du jamais vu depuis le début de l'examen de ce PLFSS", a déploré en fin de journée Christophe Bentz (Rassemblement national). Le député a dénoncé "une forme de stratégie de la part des députés du bloc central qui vise à ralentir le débat pour ne pas arriver à l'article 23 sur la revalorisation des retraites".

"Le rapporteur et la ministre prennent un temps conséquent pour répondre à des sujets qui sont certes intéressants, mais le plus important quand même c'est d'aller au bout de ce PLFSS", a considéré Jérôme Guedj (Socialistes), qui a évoqué une "obstruction organisée". "Il n'y a aucun problème à discuter, le moment venu, de l'article 23", lui a répondu le président de la commission des affaires sociales, Frédéric Valletoux (Horizons), soulignant qu'"il n'y a pas que l'article 23 dans le PLFSS" et que tous les sujets méritaient d'être discutés. 

Dans ce contexte, les débats du soir ont été marquéé par une controverse sur l'issue d'un vote, proclamé par la présidente de séance, Nadège Abomangoli (La France insoumise). Un résultat contesté par plusieurs membres du socle gouvernemental, dont Frédéric Valletoux. Philippe Gosselin (Droite républicaine) a critiqué sur les réseaux sociaux une "interprétation libre du règlement de l'Assemblée nationale" par Nadège Abomangoli, tandis que Sarah Legrain (La France insoumise) a accusé le bloc central de "bordéliser" la séance

Jean-Philippe Tanguy (Rassemblement national) a, quant à lui, dénoncé le "cynisme" des membres de l'alliance gouvernementale qui ont, selon lui, "saboté le texte par [leur] absence", mais aussi "par [leur] tumulte permanent".

En fin de soirée, les groupes du NFP, ainsi que le groupe RN et le groupe LIOT ont demandé une prolongation de la séance au-delà de minuit. Une requête jugée "pas réaliste" par Stéphanie Rist (Ensemble pour la République) : "Il reste plus de 400 amendements (...) on finirait, si on continuait à débattre, demain matin, demain midi."

Délai constitutionnel 

Finalement, c'est la ministre déléguée chargée des Relations avec le Parlement, Nathalie Delattre, qui a mis un terme à la séance, alors que les députés examinaient les amendements situés après l'article 18 du texte. "Nous arrivons au terme du temps d'examen programmé pour la discussion du projet de loi", a-t-elle déclaré. La ministre, qui a rappelé que l'article 47-1 de la Constitution fixait aux députés un délai de 20 jours pour l'examen du PLFSS en première lecture, a indiqué ne pas vouloir "réduire le temps d'examen dont le Sénat doit disposer" en prolongeant les débats au Palais-Bourbon.

En outre, Nathalie Delattre a souligné que le gouvernement ne souhaitait "pas mettre en danger l'examen du projet de loi de finances pour 2025 sur lequel il reste environ 1500 amendements à examiner" à l'Assemblée nationale. Après la discussion inachevée sur le budget de la Sécurité sociale, les députés pourront donc reprendre l'examen du budget de l'Etat dans l'hémicycle dès ce mercredi 6 novembre.