Une proposition de loi rédigée par deux députés de la majorité, Pierre-Yves Bournazel (Agir ensemble) et Christophe Blanchet (MoDem), a été adoptée mercredi 17 novembre par la commission des lois de l'Assemblée. Elle permet de sanctionner par une amende forfaitaire la détention de produits contrefaits. Une expérimentation pour lutter contre la vente de tabac à la sauvette a aussi été votée.
Cigarettes, parfums, produits de luxe mais aussi jouets ou médicaments, pas une marchandise n'est aujourd'hui à l'abri de la contrefaçon. Déjà auteurs d'un rapport sur le sujet, Pierre-Yves Bournazel (Agir ensemble) et Christophe Blanchet (MoDem) sont passés mercredi en commission des lois à la vitesse supérieure en faisant adopter une proposition loi de modernisation de la lutte contre la contrefaçon. Un sujet d'importance, puisque selon les deux rapporteurs, la contrefaçon obérerait les recettes fiscales de l'État de 10 milliards d'euros par an et détruirait 40.000 emplois chaque année.
Plus que les ports, les aéroports sont désormais le lieu privilégié de l'arrivée massive de produits contrefaits, dopée par les ventes sur Internet : "À Roissy, ce sont six colis par seconde qui arrivent de Chine. Pas d'Asie, juste de Chine !", alerte Christophe Blanchet.
"Sous la Rome antique, on sanctionnait déjà l'usurpation de marque", a rappelé Philippe Gosselin (LR) en soutien au texte de ses collègues. Pour avancer sur ce sujet qui n'est pas nouveau, la proposition de loi crée une amende forfaitaire de 150 à 400 euros en cas de "délit de détention sans motif légitime des marchandises présentées sous une marque contrefaisante". La lutte contre la contrefaçon va donc changer de dimension, puisque cette amende s'appliquera aussi aux acheteurs de produits contrefaits : "On veut responsabiliser les acheteurs : si on est puni d'une amende de 200 euros après avoir acheté une paire de baskets qui en vaut 90, ça fait réfléchir", explique Christophe Blanchet à LCP.fr.
Dans les faits, l'amende devrait d'abord s'appliquer pour les flagrants délits, même si les achats sur Internet seront, en bout de chaîne, concernés au cas par cas : "Si vous sortez avec vos baskets contrefaites dans la rue, alors la sanction sera possible", ajoute l'élu MoDem. La personne qui ignorait acheter une marque contrefaite devra, le cas échéant, prouver sa bonne foi.
Cette amendement a été inspiré par la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) lors des auditions, afin de permettre de sanctionner plus rapidement ce type de commerce sans passer par la case justice.
Les deux députés auraient également souhaité créer un délégué interministériel à la contrefaçon, afin de mieux coordonner les pouvoirs publics, mais cette possibilité n'est pas de niveau législatif.
En revanche, le texte autorise la police municipale et les gardes champêtres à agir contre la vente de tabac à la sauvette, une prérogative jusque-là réservée à la police nationale. Cette nouveauté sera testée à titre expérimentale pendant cinq ans. "La police municipale, sur le terrain, est beaucoup plus réactive. (...) Le travail de la police nationale est de remonter les filières et les réseaux", a justifié Pierre-Yves Bournazel, prenant l'exemple du trafic quotidien de cigarettes à Barbès (Paris), dans sa circonscription.
Sans s'opposer aux textes, les élus de gauche ont déploré cette ouverture, insistant sur la spécificité de chaque type de police. "Faites un tour aux Quatre Routes, à la Courneuve. Il faut une police nationale formée prête à affronter des trafiquants très nombreux, déterminés et parfois très violents, y compris entre eux", a mis en garde Marie-George Buffet (Gauche démocrate et républicaine).
Le texte sera examiné dans l'Hémicycle, jeudi 25 novembre, lors de la journée d'initiative parlementaire réservée au groupe Agir ensemble.