La présidente de l'Assemblée nationale constate une "levée de l'omerta" au sein de l'institution concernant les violences sexuelles et sexistes. Interrogée par FranceInfo sur fond d'affaires Quatennens et Bayou, Yaël Braun-Pivet indique que "40 cas" ont été "signalés", depuis 2021, à la cellule de lutte contre le harcèlement mise en place à l'Assemblée. "Ce ne sont pas que des cas de harcèlement sexuel, il y a aussi du harcèlement moral, de la pression", précise-t-elle.
Le message est clair : plus question d'ignorer ou d'étouffer des comportements sexistes ou des violences sexuelles à l'Assemblée nationale. "On ne laisse rien passer", a affirmé Yaël Braun-Pivet, jeudi 22 septembre, au micro de FranceInfo. La députée (Renaissance) des Yvelines était interrogée sur fond d'affaires Quatennens et Bayou, qui se sont mis en retrait de leurs responsabilités politiques et parlementaires, l'un pour des violences conjugales qu'il a reconnu, l'autre après des accusations de comportements inappropriés à l'égard d'une ex-compagne.
Yaël Braun-Pivet a rappelé que, ni l'élu de La France insoumise, ni l'élu d'Europe Ecologie-Les Verts, n'ont été condamnés par la justice, et que, de fait, rien ne les force à démissionner de leur mandat de député. "Quand on est élu, on est un responsable politique. C'est à chacun d'apprécier si on peut exercer son mandat", a-t-elle précisé.
"Juridiquement, vous pouvez continuer à exercer votre mandat. [...] C'est une appréciation personnelle. Dans tous les cas, le soupçon ne doit pas entraîner une conséquence aussi importante que la démission d'un parlementaire", estime la présidente de l'Assemblée qui ajoute qu'en cas de condamnation, "la situation aura évolué et on en tirera les conséquences".
Interrogée plus spécifiquement sur les faits de harcèlement commis au sein de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet s'est félicitée de la mise en place d'une cellule de lutte contre le harcèlement, en 2020 au sein de l'institution, ouverte à l'ensemble des personnels du Palais-Bourbon, députés, collaborateurs de députés et de groupes, victimes ou témoins. Cette cellule, qui couvre les faits de harcèlement au sens large (sexuel, moral, pression), a reçu 24 signalements en 2021 et 16 au cours du premier semestre 2022, a révélé Yaël Braun-Pivet.
À l’Assemblée, on ne laisse rien passer !
— Yaël Braun-Pivet (@YaelBRAUNPIVET) September 22, 2022
Nous encourageons les victimes à dénoncer systématiquement les faits pour les protéger. Depuis 3 ans, une cellule d’écoute 24h/24 existe contre le harcèlement : 40 cas signalés depuis 2021
#8h30franceinfopic.twitter.com/AgxYSfYsLf
L'année dernière, la moitié des personnes qui ont effectué un signalement ont accepté la levée de leur anonymat, afin que l'alerte soit transmise au déontologue de l'Assemblée. Deux signalements ont été identifiés comme relevant du harcèlement sexuel et sexiste, dont un a été signalé à la justice au titre de l'article 40 du code de procédure pénale. "Nous encourageons les personnes victimes à le signaler systématiquement", a insisté la présidente de l'Assemblée.
Si elle a révélé avoir été confrontée à des comportements sexistes de la part de certains de ses collègues lors de ses premiers pas à l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet a souligné qu'il y en avait "de moins en moins", notamment du fait du nombre important de députées et de la "prise de conscience" des hommes. L'attribution de postes à haute responsabilité à des femmes joue également, a souligné la députée des Yvelines. De fait, outre Yaël Braun-Pivet, première présidente de l'histoire du Palais-Bourbon, cinq des vice-présidents sont des femmes. Le poste de premier questeur est également revenu à Marie Guévenoux (Renaissance).
Pour autant, pas question de lever le pied. "Dès qu'il y aura un comportement sexiste je le sanctionnerai, parce que c'est intolérable", a assuré Yaël Braun-Pivet. Il faut remonter à 2021 pour voir un comportement sexiste sanctionné. Le député Pierre Henriet (LaREM) avait été rappelé à l'ordre pour avoir traité Mathilde Panot de "poissonnière". Il avait par la suite nié toute dimension sexiste dans cette expression.