Un hommage a été rendu mercredi à l’ancien président de la République Jacques Chirac à l’Assemblée nationale. Une plaque à son nom a été apposée au siège 99 de l’hémicycle, qu’il a occupé comme député. Avant Jacques Chirac, 64 autres anciens élus du Palais Bourbon ont vu leur nom ainsi honoré.
Presque un an après le décès de Jacques Chirac, le 26 septembre 2019, une plaque commémorative a été fixée mercredi sur le siège que l’ancien président de la République occupait lors de son passage au Palais Bourbon de 1988 à 1995. Ce geste en l’honneur de l'ancien chef de l'État avait été annoncé par le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, lors du discours dans lequel il avait rendu hommage au "vieux lion", le 1er octobre 2019.
C'est la cinquième plaque commémorative inaugurée depuis 2017 et la 65e de l’histoire de l’Assemblée. Les dernières en date rendaient hommage à Jean Jaurès et Georges Clemenceau, et avaient été apposées quelques jours avant le centenaire de l’Armistice, en novembre 2018.
- @RichardFerrand rend hommage aux "coups d'audace", "coups de gueule" et "coups de fourchette" de Jacques Chirac. Il annonce qu'il proposera d'apposer une plaque commémorative au siège 99 de l'Assemblée nationale, en l'honneur de l'ancien président de la République.#DirectAN pic.twitter.com/82rqKAvEwM
— LCP (@LCP) October 1, 2019
"À l’origine, les plaques commémoratives sont apparues en 1920 pour honorer les députés morts pour la France", explique l’historien Bruno Fuligni, spécialiste de l’histoire du Palais Bourbon. Pendant la Grande Guerre, 17 députés sont morts au combat ou tués lors d’une mission de contrôle sur le front.
Jusqu’aux législatives de novembre 1919, les premières après l’Armistice, leurs sièges étaient voilés de crêpe noir et ornés de leur écharpe tricolore. L’année suivante, 16 de ces 17 députés ont eu leurs noms gravés sur le monument aux morts de la salle des Quatre-Colonnes et des plaques commémoratives ont été apposées aux sièges qu’ils occupaient.
En 1945, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le Bureau de l’Assemblée nationale constituante décide que de nouvelles plaques commémoratives doivent voir le jour pour rendre hommage aux députés morts pour la France, raconte Bruno Fuligni. "Outre les députés combattants ou résistants, elles honorent les députés assassinés par les collaborateurs, comme Georges Mandel", précise l’historien.
Quarante-cinq plaques sont donc apposées. Cette pratique s’interrompt ensuite jusqu’en 1994. Pourquoi ? “Je ne saurais pas l’expliquer, répond Bruno Fuligni. Sans doute après la guerre, les députés voulaient réserver ce symbole à leurs collègues morts pour le pays."
"Depuis 1994, la tradition a été étendue à nos éminents prédécesseurs disparus, qui avaient également occupé les fonctions de président de la République, président du Conseil ou Premier ministre", expliquait en 2016 le président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone. Au total, 64 plaques ont été apposées.
En 2016, les plaques de Marie-Claude Vaillant-Couturier, Marie-Madeleine Dienesch et Rachel Lempereur, élues députées en 1945, sont installées dans l’hémicycle de l’Assemblée. Ce sont, à ce jour, les trois seules femmes à avoir une plaque à leur nom dans la salle des séances du palais Bourbon. Jusqu’il y a quatre ans et l’inauguration du buste d’Olympe de Gouges dans la Salle des Quatre-Colonnes, il n’y avait d’ailleurs aucune femme célèbre représentée dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
"Aucune femme n’a été élue avant 1945", souligne Bruno Fuligni, qui rappelle les critères jusque-là retenus pour l’installation des plaques commémoratives : "Il faut avoir été élu député, être décédé, et avoir joué un rôle particulier dans les institutions de la République ou dans les institutions parlementaires. Le 'député de base' n’a pas forcément droit à sa plaque même s’il a siégé longtemps et il y a encore plein d’anciens présidents du Conseil ou d’anciens Premiers ministres qui n’ont pas leur plaque."
Aujourd’hui, Georges Pompidou, François Mitterrand, Pierre Mendès France, Léon Blum, Michel Debré, Jacques Chaban-Delmas ou encore Pierre Mauroy ont une plaque adossée aux sièges qu’ils occupaient lors de leurs mandats. Qui choisit de mettre une plaque ? "Le Bureau de l’Assemblée nationale", répond Bruno Fuligni.
À partir de ce mercredi, l’ancien député de la Corrèze Jacques Chirac siégera donc éternellement au Palais Bourbon, au siège 99. "L’histoire fait qu’il va se retrouver sur le même rang que l’ancien Premier ministre gaulliste Michel Debré", note Bruno Fuligni.
L’ancien président de la République, comme de très nombreux députés, a eu plusieurs sièges, mais c’est celui-ci qui a été retenu, car c’est le dernier que Jacques Chirac a occupé avant de rejoindre l’Élysée. Aussi, le siège 99 est bien placé, "il est à côté d’un micro et au cœur des travées de la droite parlementaire" :
Jacques Chirac jouait un rôle important à l’Assemblée nationale en étant le leader de l’opposition de droite jusqu'à sa victoire à la présidentielle de 1995 Bruno Fuligni, le 21 septembre 2020
La plaque de Jacques Chirac, qui "honore l’ancien député mais aussi l’ancien président de la République", est la vingtième mise en place depuis 1994. Quinze d’entre elles l’auront été après juin 2012. "Je ne crois pas qu’il y ait une volonté d’en mettre en permanence, précise Bruno Fuligni, Il y en a surtout eu beaucoup entre 2012 et 2017 (dix, ndlr)."
Lors de la cérémonie, Claude Chirac, mais aussi de nombreuses personnalités qui ont marqué la vie politique française en général et celle de la droite en particulier, comme l’ancien Premier ministre Alain Juppé ou l’ancien président de l’Assemblée nationale Jean-Louis Debré, étaient présentes, ainsi que plusieurs ex-collaborateurs de Jacques Chirac.