La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté très largement mercredi une proposition de loi créant une infraction spécifique pour condamner les auteurs de prétendues thérapies censées "guérir" les personnes homosexuelles ou transgenres.
Un "sujet révoltant" conduisant à des "pratiques odieuses", dénoncées à travers des "témoignages glaçants" lors des auditions des parlementaires. Dans un large consensus, les députés de tout bord politique se sont prononcés pour l'interdiction des "thérapies de conversion" en votant mercredi matin la proposition de loi de leur collègue Laurence Vanceunebrock (LaREM). "Les personnes qui réalisent ces thérapies se basent sur le postulat que l'homosexualité et la transidentité sont des maladies à guérir, alors qu'il n'y a rien à guérir", a souligné la rapporteure, prônant une "réponse ferme de l'Assemblée" sur cette question.
Nous cherchons à condamner fermement ceux qui veulent contraindre une personne à renier son identité et qui utilisent pour cela des moyens souvent sournois, qui se basent sur leur homophobie ou leur transphobie. Laurence Vanceunebrock, le 29 septembre 2021
Concrètement, le texte inscrit dans le code pénal une nouvelle infraction qui punit "les pratiques, les comportements ou les propos répétés visant à modifier ou à réprimer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, vraie ou supposée, d’une personne et ayant pour effet une altération de sa santé physique ou mentale". Les peines encourues sont de deux ans de prison et de 30 000 euros d'amende et peuvent être portées à trois ans et 40 000 euros si la victime est mineure, les plus jeunes étant souvent la cible privilégiée des prétendus thérapeutes.
Du simple entretien aux prises d'hormones, en passant par le traitement par électrochoc ou le stage de conversion, ces pratiques peuvent conduire à "la dépression, l'isolement ou encore au suicide", selon les associations qui défendent les droits des personnes lesbiennes, gays, bi et trans (LGBT+).
La proposition de loi, qui a reçu l'appui de l'Ordre des médecins, doit permettre aussi de punir des mêmes peines les médecins qui prétendent "soigner" l’orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne. Ceux-ci risquent déjà des sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu'à la radiation.
Parmi les rares voix discordantes sur la proposition, le député Xavier Breton (LR) a fait valoir ses réserves sur la notion d'identité de genre, "un concept flou, non juridique et non scientifique" qui pose "un certain nombre de problèmes". Et d'apostropher la rapporteure et la majorité : "Puisque que vous savez la définir, combien y a-t-il d'identités de genre ? Si vous pouviez nous les lister..."
"Il y a autant d'identités de genre que d'individus, ce n'est pas binaire, c'est plus complexe, lui a répondu Pacôme Rupin (LaREM). Dénombrer les identités de genre n'a pas de sens (...) ce qui est important c'est de s'assurer dans la loi qu'on puisse s'identifier librement sans être inquiété." Maxime Minot, l'orateur du groupe Les Républicains, a plaidé lui en faveur du texte : "Si cette loi peut sauver ne serait-ce qu'une seule victime de ces pratiques, elle aura été utile."
Bien qu'il soit difficile de quantifier ce phénomène, la rapporteure espère envoyer un signal clair et surtout ouvrir aux victimes une nouvelle voie juridique pour porter plainte. Attendu pour le 5 octobre dans l'Hémicycle avant son examen au Sénat, le texte a reçu un soutien médiatique de plusieurs personnalités LGBT+, à l'instar des chanteur Eddy de Pretto et Hoshi, avec un mot d'ordre, "rien à guérir".