Les dirigeants du premier constructeur français de voitures ont détaillé mercredi 7 juillet les enjeux du plan "Renaulution" aux députés. Censée recentrer les activités d'avenir du groupe dans l'Hexagone, cette feuille de route fait, sur le papier, la part belle à la voiture électrique et au recyclage.
Opération patriotisme économique à l'Assemblée nationale pour les patrons de Renault. Un an après la reprise en main de l'entreprise par l'Italien Luca de Meo, la marque au losange affiche de grandes ambitions pour produire les véhicules de demain à travers son plan "Renaulution" :
Le fil rouge de Renaulution, c'est de remettre la France au coeur de la stratégie de Renault. Luca De Meo, le 7 juillet 2021
Alors qu'aujourd'hui seulement trois des dix voitures les plus vendues par le constructeur sont produites en France, le choix d'investir à l'intérieur des frontières du pays n'est pas qu'un choix patriotique : "On croit que c'est un choix rationnel, on capitalise sur notre tissu industriel et nos compétences", a fait valoir le directeur général de l'entreprise. Selon lui, Renaulution injectera à terme "8 milliards d'euros par an" dans le PIB tricolore.
Parmi les grands chantiers initiés par le constructeur figure la production de véhicules électriques, qui devrait passer la vitesse supérieure grâce au projet Renault ElectriCity. Ce pôle électrique doit voir le jour le 1er janvier 2022 sur le site de Douai, qui regroupera les activités déjà présentes dans les Hauts-de-France à Maubeuge et Ruitz. Il s'agit de créer "une des plus grandes usines si ce n'est la plus grande usine" européenne de voitures électriques, avec une production espérée de 400 000 unités par an.
Deuxième chantier, la conversion intégrale du site historique de Flins, dans les Yvelines, en "la plus grande usine d'économie circulaire au monde". Au-delà des superlatifs, il s'agira de reconditionner environ 130 000 véhicules d'occasion par an et d'y recycler les batteries. Luca de Meo se donne jusqu'en 2030 pour y arriver, avec à la clé un chiffre d'affaires d'un milliard d'euros par an.
Enfin, Renault compte "fabriquer un jour la pile à combustible du futur", en misant sur les technologies liées à l'hydrogène. Quatre sites hexagonaux seront censés couvrir toute la chaîne de valeur, de la recherche et développement jusqu'à la commercialisation. L'enjeu pour le constructeur est de tenir à l'avenir les objectifs de décarbonation imposés par l'Union européenne, en produisant de l'hydrogène avec le moins d'émission de gaz à effet de serre possible.
Des voitures moins polluantes, produites en moins grandes quantités - l'entreprise a baissé ses objectifs de production de 4 à 3,1 millions d'unités d'ici à 2025 - et... à des prix plus élevés. Le président de Renault, Jean-Dominique Sénard, a reconnu que l'inflation sera quasi inévitable :
Il est très difficile d'imaginer un avenir sans hausse de prix. Jean-Dominique Sénard, le 7 juillet 2021
Le PDG a mis en avant les tensions en cours sur les matières premières, à commencer par les composants électroniques, dont la teneur en métaux rares renchérit les coûts, mais aussi les nouvelles normes techniques et environnementales imposées à l'industrie. L'occasion aussi pour Luca de Meo de se plaindre du "coût de la main d'oeuvre" en France, "un handicap structurel" qui serait "34% supérieur" à la moyenne européenne du secteur.
Plusieurs députés se sont inquiétés de l'avenir des 5200 emplois des fonderies d'aluminium en France, dont les constructeurs automobiles sont parmi les premiers clients. Un sujet qui a été l'occasion d'une vive passe d'armes entre le président de la commission des affaires économiques Roland Lescure (LaREM) et de François Ruffin (LFI), qui estimait ne pas avoir eu de réponse claire à sa question :
A la fin des questions de leurs collègues, @RolandLescure redonne la parole à @Francois_Ruffin sur l'avenir des fonderies en France. "Il faut assurer la compétitivité des sites qui existent, Renault fait son devoir, ce ne sont pas des paroles en l'air", répond @jdsenard #DirectAN pic.twitter.com/qftBojDGqU
— LCP (@LCP) July 7, 2021
Finalement, le député insoumis a pu renouveler sa demande. Jean-Dominique Sénard a pointé "le manque de compétitivité" des sites en danger, tout en assurant ne pas avoir délocalisé sa demande. "Cela fait partie des efforts que Renault fait pour supporter cette filière", a-t-il assuré. L'entreprise s'est par ailleurs engagée à rembourser l'intégralité du prêt garanti par l'État, consenti pour un montant de 4 milliards d'euros en 2020.