La commission des affaires sociales de l'Assemblée a examiné, mercredi 12 avril, une proposition de loi visant à abroger l'obligation vaccinale contre le Covid pour les soignants et à réintégrer les professionnels non vaccinés. Rejeté en commission, le texte sera au programme de l'hémicycle lors de la journée d'initiative parlementaire du groupe "Gauche démocrate et républicaine", le 4 mai prochain.
"Un sujet qui, à sa seule évocation, soulève les réactions les plus extrêmes". Jean-Victor Castor (Gauche démocrate et républicaine) avait conscience en défendant sa proposition de loi devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, mercredi 12 avril, du risque de réactiver les débats passionnels qui ont eu lieu sur le sujet lors de la crise sanitaire liée au Covid 19. "Portant abrogation de l'obligation vaccinale contre la covid-19 dans les secteurs médicaux, paramédicaux et d'aide à la personne et visant à la réintégration des professionnels et étudiants suspendus", la proposition de loi n'est en tout cas pas parvenue à "favoriser l'apaisement" que son rapporteur appelait de ses vœux.
La plupart des députés ayant pris part au débat en commission ont estimé souhaitable de suivre l'avis de la Haute autorité de santé (HAS) rendu le 30 mars dernier, préconisant de "faire évoluer le cadre juridique actuel" et "de lever l’obligation de vaccination contre la Covid-19" des professionnels. Mais c'est aussi et largement sur une question de méthode que partisans et adversaires du texte se sont opposés.
Alors que le ministre de la Santé, François Braun, a annoncé qu'il suivrait l'avis de la HAS concernant la levée de l'obligation de vaccination contre le Covid en publiant prochainement un décret et que des concertations auraient lieu en vue de la réintégration des soignants non vaccinés, Jean-Victor Castor a souligné que le décret évoqué par le ministre ne ferait que suspendre, et non abroger, la loi du 5 aout 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire qu'il a jugée "incohérente dans son périmètre".
"Aujourd’hui nous ne sommes plus dans une situation d’urgence", a plaidé le député de Guyane, situation qui avait, selon lui, "affaibli le Parlement".
Abroger la loi signifie que l’on redonne au Parlement toute la place qui lui revient. Jean-Victor Castor (GDR)
Rappelant que la France était l’un des derniers pays, avec la Hongrie, à ne pas avoir mis fin à l’obligation vaccinale contre le Covid pour les professionnels de santé, le rapporteur a également estimé que l'abrogation de la mesure permettrait "d’éviter l’aggravation sur le long terme d’une désertification médicale". Évoquant la situation particulière du territoire où il est élu, la Guyane, Jean-Victor Castor a dit constater que l'obligation vaccinale pouvait s'avérer dissuasive pour des jeunes qui souhaiteraient intégrer les secteurs liés au soin.
Au contraire, Jean-François Rousset (Renaissance) a considéré utile de ne pas se priver d’"un outil législatif qui permettrait une réactivité très importante". Il a donc plaidé pour un décret suspensif, et non une loi abrogeant le dispositif actuel. Une position soutenue par le groupe "Socialistes" qui, par la voix d'Arthur Delaporte, a apporté son soutien à "une évolution du cadre juridique", selon les termes de l'avis de la HAS, "et non son abrogation".
Frédéric Valletoux (Horizons) a dénoncé derrière la proposition de loi et certaines prises de parole "des ambiguïtés". "On veut pousser et satisfaire ce sentiment 'antivax' qui a traversé le pays, sans le dire et sans l’assumer, et ça c’est profondément malsain", a-t-il aussi estimé, avant d'accuser ses collègues de la Gauche démocrate et républicaine de participer à une forme de "populisme" dans "le pays de Pasteur".
Inversement, Frédéric Falcon (Rassemblement national) a accusé les députés de la majorité de "politiser la science", et de nourrir un "narratif irrationnel" en plus d'un "discours dogmatique". Dans un climat parfois tendu, les groupes de la Nupes - à l'exception du groupe "Socialistes" qui s'est abstenu -, ainsi que les groupes "Rassemblement national", "Les Républicains" et "Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires" ont soutenu le texte qui a cependant été rejeté par le vote d'amendements de suppression des articles par la majorité présidentielle.
La proposition de loi sera cependant au programme de l'hémicycle lors de la journée d'initiative parlementaire du groupe "Gauche démocrate et républicaine", le 4 mai prochain.