Auditionné par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, Xavier Piechaczyk, président de RTE, est revenu ce mercredi 27 octobre 2017 sur le rapport de son entreprise sur l'avenir de l'électricité en France à l'horizon 2050. Il s'est notamment exprimé sur le coût du nucléaire.
Nucléaire, stop ou encore ? Avec la récente hausse des prix de l'électricité et du gaz, la question du prix de l'énergie s'est imposée dans le débat de la pré-campagne présidentielle. Dans ce contexte, les défenseurs de l'atome pourraient avoir un avantage dans la bataille du pouvoir d'achat. C'est en résumé ce qu'a estimé Xavier Piechaczyk, président de RTE (pour Réseau de transport d'électricité) devant les députés ce mercredi. Pour lui : "Construire de nouveaux réacteurs nucléaires est pertinent" économiquement. Son entreprise a publié lundi un épais rapport contenant ses principales conclusions sur l'avenir du système à l'horizon 2050.
Le gestionnaire du réseau électrique français a simulé six scénarios – allant du 100% renouvelable à un développement "volontariste" du nucléaire – pour atteindre la neutralité carbone dans la production d'électricité d'ici 2050. Résultat : si tous "garantissent la sécurité d'approvisionnement" du système électrique français", le distinguo pourrait se faire sur la question des coûts. Avec en ligne de mire une problématique : "La France consommera plus d’électricité en 2050, il faudra [donc] qu'elle en produise plus".
À ce titre, estime le patron de RTE : "Les coûts de production des différents mix sont approximativement équivalents, dans les scénarios avec ou sans nouveaux nucléaires". Sitôt posé ce constat, Xavier Piechaczyk le nuance néanmoins. "On voit que les besoins de flexibilité sont déterminants sur le coût complet des scénarios", explique-t-il, soulignant que plus le mix énergétique est composé d'énergies renouvelables, "plus cette production diffuse sur le territoire, [et donc] elle nécessite plus de réseaux de distribution et de transports pour le pilotage du système électrique et pour acheminer l'électricité aux lieux de consommations."
Ce raisonnement pousse Xavier Piechaczyk à dire devant les députés que "l'évaluation économique des coûts de production conduisent à rendre les scénarios avec du nouveau nucléaire, moins coûteux à l’échéance 2050, avec un écart de l'ordre de dix milliards d'euros entre les scénarios M23 et le scénario N2." "Construire de nouveaux réacteurs nucléaires est pertinent du point de vue économique", affirme donc le président de Réseau de transport d'électricité.
Toutefois, tout n'est pas perdu pour les défenseurs des éoliennes et des énergies renouvelables. D'abord, parce qu'aucun scénario n'exclut les énergies renouvelables. Ensuite parce que ces dernières "sont devenues des solutions compétitives", explique Xavier Piechaczyk. Mais surtout "parce qu'il est impossible d'atteindre la neutralité carbone en 2050 sans un développement significatif des énergies renouvelables", assure le patron de RTE.
Dans le détail, il faudrait, a minima, multiplier par sept la capacité de production solaire installée en France, multiplier par 2,5 le nombre d'éoliennes terrestres et commencer à installer des éoliennes "offshores" (en mer). Outre l'aspect évident pour l’environnement et la souveraineté du pays, atteindre la neutralité carbone dès 2050 aura un impact bénéfique sur les ménages : "Les protéger du yoyo des prix des énergies fossiles sur les marchés mondiaux, comme on peut le constater avec le gaz aujourd'hui."
Interrogée la veille par les députés de la commission des affaires économiques, la ministre de la Transition écologique a estimé que, concernant l'éolien, "on doit pousser tous les curseurs." Sur les énergies renouvelables, "Il faut qu'on arrête avec les guerres de religion", a-t-elle déclaré, rappelant qu'il "n'y a pas d'alternative."
Pour "décarboner son économie" à court et moyen terme, la France ne peut "que s'appuyer sur les énergies renouvelables". "Les travaux de @rte_france le confirment : il n'y a pas d'alternative", souligne @barbarapompili. #DirectAN #RTE pic.twitter.com/OhihVatG8O
— LCP (@LCP) October 26, 2021
Les différentes simulations de RTE anticipent aussi une évolution des comportements individuels : "La consommation d'énergie va baisser mais celle d'électricité va augmenter pour se substituer au fossile, dans tous les scénarios", souligne Xavier Piechaczyk. "Agir sur la consommation grâce à l'efficacité énergétique voire la sobriété est indispensable pour atteindre les objectifs climatiques", avance également le patron de RTE, qui a évoqué plusieurs pistes : développement du télétravail, utilisation des transports en commun... Il a par ailleurs rappelé que "tout raisonnement sur le pouvoir d'achat des ménages doit prendre en compte que les dépenses d'énergie fossile des ménages seront nulles en 2050."
Le patron de RTE a enfin rappelé à la représentation nationale l'indépendance de ses équipes, mise en cause notamment par Yannick Jadot, candidat à l'élection présidentielle pour EELV. "Nous n'avons pas vocation à prescrire un modèle de société française", a assuré Xavier Piechaczyk, soulignant que le rôle de RTE était de "documenter" l’état énergétique du pays afin d'éclairer au mieux les responsables politiques. "RTE étudie des chemins possibles pour la France. Ils sont tous possibles. Ils ont tous des atouts, et ils ont tous des limites. La France devra faire ses choix de chemin. (...) Ce sont des choix politiques parce que ce sont des choix de société", résume-t-il.