Le dispositif sera précisé dans un décret en conseil d'Etat.
Les députés tentent d'endiguer les pénuries de médicaments. L'Assemblée nationale a adopté ce vendredi, à l'unanimité, l'article 34 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Celui-ci institue pour les industriels une obligation de constituer jusqu'à quatre mois de stock de médicaments.
Les modalités du dispositif seront précisées par un décret en conseil d'Etat.
"Les ruptures de stock se multiplient, elles concernent des médicaments de plus en plus courants", a expliqué vendredi matin le rapporteur du PLFSS, Olivier Véran (LaREM), qui a évoqué "la cortisone, les vaccins, les antibiotiques" aussi bien "en milieu hospitalier [qu']en pharmacie d'officine".
Entre 2008 et 2019, le nombre de signalements de tensions d'approvisionnement de médicaments dits d'intérêt thérapeutique majeur a été multiplié par 20.Exposé des motifs du projet de loi
La liste des médicaments concernés ainsi que la durée de stock pour chacun d'entre-eux sera déterminée par le décret. "Seront sortis de la liste (...) un certain nombre de produits parmi lesquels des médicaments biologiques", a précisé Olivier Véran.
En tout état de cause, "les laboratoires ne vont pas conserver quatre mois de stock dans un hangar", a expliqué l'élu La République en Marche de l'Isère, prônant un "stock tournant" qui devra être constitué sur le territoire européen.
En cas de non-respect de leurs obligations, les industriels seront sanctionnés financièrement. En septembre dernier, le gouvernement avait annoncé que la sanction pourrait aller, pour chaque jour de pénurie, jusqu'à un maximum de 30% du chiffre d'affaires journalier moyen réalisé en France, dans une limite de 10% du chiffres d'affaires annuel ou un million d'euros.
L'entreprise défaillante devra aussi prendre en charge une "obligation d'importation" pour les médicaments dits d'intérêt thérapeutique majeur (MITM).
La secrétaire d'Etat auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé, Christelle Dubos, a assuré que le décret sera "concerté et travaillé avant sa publication" et que "les industriels ont été informés directement par le Premier ministre".
Selon le député communiste Pierre Dharréville, ce dispositif "ne suffira pas". "En 2019, plus de 1.200 MITM ont été concernés par des tensions ou une rupture de l'approvisionnement", a déclaré l'élu, qui affirme que ce chiffre était de "800 l'année dernière" et de "44 dix ans plus tôt".
Le député des Bouches-du-Rhône propose donc un "programme public de fabrication des médicaments" mais aussi la création d'un "pôle public du médicament".
La députée Les Républicains Josiane Corneloup a évoqué pour sa part le "coût important [de la gestion des stocks] pour les entreprises, en particulier si aucune garantie d'écoulement n'est prévue".
L'élue de Saône-et-Loire aurait souhaité exclure les vaccins car il faut "anticiper trois à cinq ans à l'avance les futurs besoins, liés à l'évolution de la demande mondiale".
"L'introduction d'une telle mesure générerait une augmentation allant jusqu'à 30% des volumes de production de vaccins pour le marché français", a expliqué la députée. Cela pourrait, selon elle, "mettre en difficulté les sites de production concernés et pénaliser l'accès aux vaccins en France et dans les autres pays".
Josiane Corneloup estime qu'il aurait fallu attendre les conclusions "de la mission confiée à Jacques Biot visant à analyser les causes profondes de la situation, notamment en matière de choix industriels".
Cette mission, lancée en septembre 2019 à la demande du Premier ministre Edouard Philippe, doit rendre ses conclusions d'ici à décembre 2019.