Auditionné par la commission des affaires sociales, le ministre du Travail a exposé les grandes lignes du projet de loi "portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise". Le texte vise notamment à étendre les dispositifs d'intéressement, de participation, ou de primes de partage de la valeur, à toutes les entreprises de 11 à 49 salariés considérées comme rentables.
"Relavoriser le travail" : c'est ainsi qu'Olivier Dussopt, auditionné lundi 19 juin par la commission des affaires sociales, a défini l'ambition du projet de loi relatif au partage de la valeur dans l’entreprise. Le ministre du Travail a revendiqué une "fidélité intégrale" à l'accord national interprofessionnel (ANI) auquel les partenaires sociaux - organisations patronales et syndicats de salariés, sans la CGT - étaient parvenus le 10 février dernier.
Véhicule de transcription dans la loi des dispositions de l’accord conclu à l'issue de négociations initiées en novembre dernier, le texte comporte 15 articles visant à "aller plus loin pour développer le partage de la valeur dans les petites entreprises, notamment dans celles de moins de 50 salariés, mais aussi généraliser et faciliter son usage dans toutes les entreprises", a aussi indiqué le ministre.
Trois dispositifs existent d'ores-et-déjà : l'intéressement, conditionné aux résultats de l'entreprise, la participation, obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés uniquement, ainsi que les mécanismes de primes ponctuelles. Le texte se propose notamment de rendre obligatoire pour les entreprises de 11 à 49 salariés, la mise en place d'un dispositif de partage de la valeur, dès lors qu'elles disposent d'un bénéfice net fiscal positif supérieur à 1% de leur chiffre d'affaire pendant trois années consécutives.
Le projet de loi vise également à faciliter l'usage de la prime de partage de la valeur, initialement baptisée "prime Macron", pour permettre aux entreprises d'octroyer jusqu'à deux primes par an, avec possibilité de versement sur un plan d'épargne salariale.
Si Olivier Dussopt a affirmé la nécessité de généraliser les dispositifs d’intéressement et de participation, il a également martelé le principe, cher aux partenaires sociaux, selon lequel ces mécanismes "ne se substitu[aient] pas aux salaires".
Au cours de l'audition du ministre, le rapporteur du texte, Louis Margueritte (Renaissance) a loué dans l'ANI "la preuve que la démocratie sociale se porte bien", tandis qu'Arthur Delaporte (Socialistes) a déploré dans la simple transposition proposée par le gouvernement une forme de déni du débat parlementaire.
Au-delà de la méthode, les différents orateurs des groupes ont pointé un "manque d'ambition" du texte, expression notamment employée par Stéphane Viry (Les Républicains), qui a regretté que l'actionnariat salarié constitue selon lui le "parent pauvre" du projet. Eva Sas (Ecologiste) a pour sa part évoqué un texte à la "portée très faible", "ne répond[ant] en rien aux problèmes de pouvoir d'achat des Français". Et Victor Catteau (Rassemblement national), sans remettre en cause les principes de l'ANI et du projet de loi, a pour sa part évoqué un "pansement", et déploré le manque de volontarisme du gouvernement en matière de hausse des salaires. Comme les députés de l'opposition, la CGT avait justifié son choix de ne pas signer l'ANI par le fait que le cycle de négociations l'ayant précédé n'ait pas été l'occasion d'évoquer la problématique salariale.
Vous instrumentalisez ce texte pour faire croire que vous faites quelque chose pour le pouvoir d’achat des Français, alors que vous ne faites rien pour augmenter les salaires ou baisser les prix. Matthias Tavel (La France insoumise)
"Vous êtes des hypocrites et tout le monde le sait", a pour sa part mis en cause Matthias Tavel (La France insoumise) à l'endroit du gouvernement et de la majorité présidentielle. "Vous vous cachez derrière cet ANI comme alibi de démocratie sociale, alors que vous venez d’écraser les syndicats, les manifestants et l’Assemblée nationale pour imposer la retraite à 64 ans", a poursuivi le député, avant d'accuser le texte "d'affaiblir la Sécurité sociale par des exonérations de cotisations", et de s'apparenter à des "miettes consenties à être lâchées par le Medef".
Après son examen et son adoption en commission lundi 19 juin, le projet de loi sera débattu par les députés dans l'hémicycle à partir du 26 juin.