A l'unanimité, l'Assemblée nationale a adopté, en première lecture, une proposition de loi visant à "renforcer le principe de continuité territoriale en Outre-mer", qui prévoit une série de mesures pour renforcer les aides à la mobilité des Ultramarins, notamment les actifs et les parents contraints de voyager vers l'Hexagone pour soigner un enfant.
Un rare moment de concorde. Lors de la journée d'initiative parlementaire du groupe centriste Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires (Liot), jeudi 8 juin, l'Assemblée nationale a adopté, à l’unanimité (178 voix pour), une proposition visant à "renforcer le principe de continuité territoriale en Outre-mer."
Alors que plusieurs milliers de kilomètres séparent les collectivités d'Outre-mer de l'Hexagone, la mobilité des ultramarins est particulièrement affectée par le renchérissement des tarifs du transport aérien pour les liaisons entre l'Hexagone et les Outre-mer (+38% en un an), selon une note du Baromètre du transport aérien réalisé par le ministère des Transports, entravant parfois la capacité à chercher un emploi, obtenir des soins ou maintenir des liens familiaux et affectifs.
La politique de continuité territoriale en France est un dispositif réglementé par le Code des transports. En introduction des débats, le rapporteur de la proposition de loi, Olivier Serva (Liot), a déploré par des exemples concrets l'insuffisance des moyens dévolus à cette politique, menant à "une distorsion du principe d'égalité qui est le fait générateur du sentiment d'abandon des populations" ultramarines - une idée corroborée par un récent rapport du Sénat.
Pour répondre à ce "sentiment d'abandon", le texte porté par le député de Guadeloupe propose notamment des dispositions pour favoriser la mobilité et les déplacements des personnes actives, ainsi que des familles confrontées à la maladie d'un enfant. Les parents qui doivent faire face à cette situation pourront cumuler l'allocation journalière de présence parentale avec le complément et la majoration de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, et plus seulement avec son montant de base.
Parmi les autres mesures prévues : une augmentation des montants de l’aide à la continuité territoriale pour l’achat de billets d'avions, en fonction de l’éloignement du territoire et du prix moyen du billet, ou encore une aide à l’achat d’un billet d’avion pour les actifs inscrits dans un programme de formation continue qui ne peut être suivi dans un territoire d’Outre-mer.
Le dispositif serait aussi étendu aux actifs qui veulent retourner en Outre-mer et qui peuvent justifier d’une création d’activité ou d’une promesse d’embauche sur leur territoire d’origine. Les critères et les montants des différentes aides sont renvoyés à un futur arrêté ministériel.
Dès le début de la discussion générale sur le texte, les députés des tous les bancs ont fait part de leur soutien à une initiative parlementaire jugée nécessaire. Pour Marcellin Nadeau (Gauche démocrate et républicaine), la proposition de loi "réduit un grave déficit d'égalité républicaine".
Plus globalement, comme d'autres députés, l'élu de Martinique a critiqué, les moyens trop faibles consacrés, depuis longtemps, aux Outre-mer : "La France débourse 16€ par habitant pour ses Outre-mer, quand l'Espagne débourse 223€ pour les îles Canaries, pourtant proches du continent, et le Portugal 34€ par habitant pour Madère et les Açores."
A l'issue de l'examen de la proposition de loi, les députés de l'ensemble des groupes de l'Assemblée nationale ont voté en faveur de son adoption.
Le texte a été considérée par beaucoup comme un pas salutaire pour améliorer les conditions de vie des Ultramarins et complémentaire de la commission d'enquête sur la vie chère dans les Outre-mer créée par l'Assemblée à la demande des députés du groupe Socialistes.
Pour faciliter son adoption, Olivier Serva a consenti à un certain nombre de modifications, en acceptant par exemple un amendement du gouvernement au sujet de l'article 1er. Alors que les dispositions initiales en faveur du renforcement de la mobilité devaient être inscrites dans la loi, elles feront finalement l'objet de mesures réglementaires. Le ministre chargé des Outre-mer, Jean-François Carenco, s'est engagé à ce que cela soit fait à l'issue des travaux du Comité interministériel des Outre-mer, qui débutera lundi 12 juin et dont les résultats sont attendus pour le mois prochain.
Par ailleurs, la proposition de loi a été enrichie en séance par plusieurs amendements posant, par des demandes de rapport, des jalons pour de futures dispositions, concernant notamment la prise en charge du billet d'avion des victimes de violences intrafamiliales pour leur mise en sécurité dans l'Hexagone, ou en matière de fret de marchandises.
Après son adoption par l'Assemblée nationale en première lecture, le texte doit maintenant être examiné au Sénat, afin de poursuivre son parcours législatif.