Le texte, qui doit "repenser en profondeur" un cadre législatif "dépassé", a notamment pour but d'assouplir les règles encadrant la publicité à la télé ou encore d'intégrer Netflix au modèle culturel français. Il est examiné cette semaine par la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale.
L'Assemblée a entamé lundi, en commission, l'examen des 1200 amendements déposés sur le projet de loi relatif "à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l’ère numérique".
Le texte, qui contient 82 articles, est qualifié d'"historique" par le ministre de la Culture, Franck Riester. Il vise à "repenser en profondeur" la loi relative à la liberté de communication de 1986, un cadre législatif désormais "dépassé" car "conçu pour une autre époque".
Le gouvernement souhaite en premier lieu intégrer au modèle culturel français les nouveaux acteurs du numérique, comme Netflix, Amazon ou encore Disney+. Le projet de loi devrait permettre, par exemple, d'imposer à ces derniers de financer des séries et des films français à hauteur de 25% de leur chiffre d'affaires réalisé en France.
En contrepartie, Franck Riester, mais aussi la rapporteure générale du texte, Aurore Bergé (LaREM), poussent les organisations professionnelles à conclure une réforme de la chronologie des médias.
Issue d'accords professionnels, cette chronologie impose pour l'instant à Netflix de ne proposer des films sur sa plateforme que 36 mois après leur sortie en salles, contre 6 à 8 mois pour Canal+.
Demain, si les acteurs américains acceptent de financer le cinéma français, ils pourraient donc diffuser des films sur leurs plateformes dans une fourchette de temps équivalente ou égale à celle dont dispose Canal+.
Alors que de plus en plus de Français sont abonnés à des services payants de vidéos à la demande, le gouvernement souhaite aussi permettre aux chaînes de télévisions traditionnelles de diffuser des films n'importe quel soir de la semaine.
Aujourd'hui, elles n'ont le droit de le faire, ni les mercredis et vendredis soirs, ni les dimanches avant 20h30, ni les samedis. Franck Riester a toutefois précisé que les chaînes ne pourront diffuser le samedi soir que des films coproduits ou des films d'art et d'essai.
Le projet de loi assouplit également les règles encadrant la diffusion de la publicité à la télévision : "Cet assouplissement donnera aux chaînes l'accès à de nouvelles ressources qui mécaniquement seront réinvesties dans la création et qui permettront de consolider nos champions français de l'audiovisuel", a précisé le ministre.
Les chaînes de télévision pourront prévoir une troisième coupure pub dans les films de plus de 120 minutes (hors programmes destinés à la jeunesse) ou diffuser de la publicité segmentée.
Pendant certaines manifestations sportives, les diffuseurs pourront partager l'écran entre la retransmission et un écran publicitaire : selon l'étude d'impact du projet de loi, les sports qui ne disposent pas de pause "naturelle" (une mi-temps par exemple) comme la Formule 1 ou le Tour de France pourraient être concernés.
Le projet de loi crée également un super régulateur né de la fusion entre la Hadopi et le CSA, nommé l'Arcom. "Il régulera non seulement les communications audiovisuelles mais aussi les communications numériques", a indiqué Franck Riester.
L'Arcom assurera la "protection des publics sur tous les écrans, agira contre les infox, contre la prolifération de contenus haineux, pour la protection des mineurs". Elle sera aussi "dotée de prérogatives renforcées pour lutter contre les sites pirates, y compris en ce qui concerne les compétitions sportives".
Le texte "transforme" également l'audiovisuel public en regroupant Radio France, l'Ina, France Télévisions et France Médias Monde au sein d'une même "holding" nommée France Médias.
D'autres sujets devraient émerger pendant les débats, comme la place réservée à l'Outre-mer dans les chaînes du service public avec la suppression annoncée de France Ô ou encore l'accessibilité des contenus aux personnes en situation de handicap.
Le président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, Bruno Studer (LaREM), espère intégrer au texte sa proposition de loi sur les enfants youtubeurs, tandis que le groupe La République en Marche proposera d'enrichir les missions de l'audiovisuel public en affirmant que celles-ci doivent "contribuer" à créer une "conscience civique européenne".
Les députés Les Républicains et communistes entendent notamment évoquer la question de la redevance tandis que les députés La France Insoumise relanceront le débat sur la création d’un "conseil national de déontologie des médias".