La mission d’information sur les "problématiques de sécurité associées à la présence sur le territoire de mineurs non accompagnés", a présenté son rapport en commission des lois mercredi 10 mars. Le rapport de cette mission, menée par les députés Antoine Savignat (LR) et Jean-François Eliaou (LaREM), formulent 18 recommandations. Les questions liées à la délinquance de certains de ces mineurs ainsi que les difficultés rencontrées pour évaluer leur âge ont retenu l’attention des députés.
A Paris, dans le quartier de la Goutte-d’Or, mais aussi à Marseille, Bordeaux, Toulouse ou Montpellier, près de 17 000 mineurs isolés seraient arrivés en France en 2019. Les mineurs non accompagnés sont des jeunes âgés de moins de 18 ans, de nationalité étrangère, qui se trouvent sur le territoire national sans adulte responsable. Particulièrement fragiles, ils ont pour la plupart vécu des traumatismes dans leurs pays d’origine, un parcours migratoire presque toujours chaotique et sont souvent polytoxicomanes. Les profils délinquants ne représentent qu’une faible minorité de ces mineurs isolés, 10% selon le rapport.
Après six mois de travaux, une quarantaine d’auditions et un déplacement au tribunal de Bobigny, la mission d’information dégage 18 propositions afin de garantir un "continuum de protection" pour accompagner ces mineurs le plus tôt possible et leur éviter de tomber dans la délinquance. Les propositions ainsi formulées tendent : à identifier ces mineurs, à renforcer la coopération européenne et internationale en matière d’état civil et à adapter leur prise en charge ainsi que la réponse pénale en cas d’infraction.
Bien que les données statistiques soient insuffisantes, la mission d’information pointe une tendance à la hausse des actes de délinquance qui nourrissent "un sentiment d'impuissance de la part des forces de l'ordre et des magistrats, démunis face à cette forme de délinquance" et sur les réponses à y apporter, soulignent les rapporteurs. Pour appréhender plus précisément et endiguer le phénomène, ils proposent d’uniformiser et de systématiser le recueil de données statistiques.
Le rapport prévoit également de rendre obligatoire le recours au fichier d’appui à l’évaluation de la minorité (AEM) pour tous les départements. "La possibilité de suivre ces individus permettrait d'évaluer leur âge et de savoir s'ils utilisent des alias", explique Jean-François Eliaou.
Aujourd’hui, 17 départements n’y participent pas ou refusent d’y participer. Rendre la prise d’empreintes digitales obligatoire, ou renforcer les sanctions en cas de refus de s’y soumettre lors d’une interpellation, participe de cette volonté.
Le renforcement de la coopération européenne et internationale, notamment en matière d’état civil est un levier à mettre en oeuvre. L’accord conclu avec le Maroc en novembre 2020 va dans ce sens "mais les échanges ne sont pas assez rapides", estime le co-rapporteur de La République en Marche.
L'accent est également mis sur la prise en charge des mineurs. En effet, la nécessité d’accroitre le nombre de places d’hébergement dans les structures de l’aide sociale à l’enfance été soulignée, tandis que le rapport pointe le recours trop systématique à l’hébergement hôtelier qui ne permet pas un suivi socio-éducatif suffisant.
Le rapport d'Antoine Savignat et de Jean-François Eliaou recommande que les mineurs isolés délinquants bénéficient d’un accompagnement pluridisciplinaire et de longue durée dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance. Ce qui permettrait une meilleure adhésion des jeunes au dispositif d’accompagnement.
Enfin, le rapport souligne l’échec régulier des mesures éducatives actuellement mises en oeuvre comme alternatives aux poursuites. Souvent victimes de réseaux de traite d’êtres humains ou de délinquance, les mineurs non accompagnés doivent faire l’objet d’un traitement spécifique. L’une des propositions évoque la généralisation des brigades pluridisciplinaires, spécialisées en matière de recel, de traite et de réseaux de délinquance.
La garantie d’une prise en charge éducative dès la première infraction ou la désignation systématique d’un représentant légal pour chaque mineur faisant l’objet de poursuites pénales font partie des propositions mises en avant pour améliorer l'accompagnement et le suivi de ces jeunes.