Logements sociaux : les députés prolongent et consolident la loi SRU

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Des logements sociaux à Marseille, en novembre 2021
Des logements sociaux à Marseille, en novembre 2021 (Magali Cohen / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP)
par Raphaël Marchal, le Jeudi 9 décembre 2021 à 15:34, mis à jour le Vendredi 10 décembre 2021 à 07:25

Dans le cadre de l'examen du projet de loi sur la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et la simplification de l'action publique locale (3DS), les députés ont validé, jeudi 9 décembre, la prolongation de la loi SRU qui prévoit notamment l'obligation pour certaines communes d'atteindre un taux minimal de 20% ou 25% de logements sociaux sur leur territoire.  

"Il y aura un avant et un après 3DS." Mickaël Nogal (LaREM), l'un des rapporteurs du projet de loi, n'a pas caché son enthousiasme au moment d'entamer l'examen des articles relatifs au logement. Et, plus particulièrement, au logement social. Il s'agit là d'une des dispositions majeures du projet de loi : prolonger la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU) du 13 décembre 2000, qui arrivait à échéance en 2025. Tout en tirant les conséquences de son application.

Il y aura un avant et un après 3DS. Mickaël Nogal, député LaREM et rapporteur du projet de loi

Concrètement, la loi SRU demande à certaines communes, situées dans le périmètre d'agglomérations, d'atteindre un seuil de logements sociaux de 20% ou 25% par rapport à l'ensemble de leur parc. "50 % des logements sociaux depuis la loi ont été construits dans les villes qui y étaient soumise", s'est félicité Stéphane Peu (GDR), fervent défenseur de cette loi. Lors du passage du texte 3DS au Palais du Luxembourg, les sénateurs, s'ils n'ont pas touché au socle du dispositif, ont tout de même ajouté bon nombre d'exemptions et d'exceptions afin de ne pas trop pénaliser les mauvais élèves. Des modifications supprimées en commission par les députés qui ont confirmé leur volonté de revenir à l'esprit initial du projet de loi dans l'Hémicycle. 

Rattraper le retard

Concrètement, le projet de loi 3DS fait évoluer le dispositif : exit le calendrier qui était prévu alors que la loi SRU, votée en 2000, devait arriver à échéance en 2025. Les communes en retard devront tenter de rattraper leur retard sur des périodes triennales. Avec en outre la possibilité de signer un "contrat de mixité sociale", destiné à éviter un phénomène de ghettoïsation observé par le passé : afin de répondre à l'objectif fixé par la loi, certaines communes ont consacré l'intégralité de certains quartiers au logement social. Ce qui a notamment pu générer des problèmes de mixité de la carte scolaire a indiqué Olivier Becht (Agir ensemble).

Afin d'"assurer une répartition équilibrée et diversifiée de l’offre de logements" à Paris, Lyon et Marseille, les députés ont donc adopté un dispositif spécifique à ces trois villes par voie d'amendement. Dans les contrats de mixité sociale de ces communes, les objectifs de réalisation de logements sociaux seront fixés "au niveau de l'arrondissement". Toutefois, la procédure de carence ne pourra être "engagée que sur le seul fondement des résultats obtenus à l'échelle communale".

Environ 70 % de la population française est éligible à divers degrés pour occuper un logement social. Et le besoin se fait sentir : 2,2 millions de demandes sont en attente, faute de place. La pénurie se fait particulièrement criante en région Provence-Alpes-Côte d'Azur et en Île-de-France, où les délais peuvent atteindre 10 ans. "Si tout le monde respectait la loi, on aurait 600.000 logements sociaux de plus", a regretté Sylvia Pinel (Libertés et territoires), appelant à faire preuve de davantage de fermeté. Rappelant que des exemptions sont déjà prévues par le texte originel, l'ancienne ministre du Logement a jugé que tout amendement tendant à assouplir le dispositif était le signe de "résurgence d'égoïsmes locaux".

Des contraintes

A contrario, les députés de droite ont mis en avant les nombreuses contraintes pesant sur les communes concernées pour atteindre le seuil. Baisse de la dotation globale de fonctionnement, hausse du prix du foncier, baisse de la taxe foncière... La marge de manœuvre des communes s'est "considérablement réduite", a reconnu Olivier Becht. Et d'ajouter que certaines communes carencées ont "mal vécu les amendes" au vu des contraintes existantes.

"La loi SRU n'a pas eu que des effets heureux", a estimé Thibault Bazin (LR), qui a notamment pointé l'absence de mixité comme effet pervers du texte. Il a appelé à faire évoluer la loi, notamment pour prendre en compte les communes qui ont un fort taux d'inconstructibilité sur leur territoire. Une opinion partagée par Raphaël Schellenberger (LR), pour qui la hausse du prix du foncier, particulièrement du fait de la lutte contre l'artificialisation des sols, pousse certaines communes à devoir choisir entre faire du logement social ou de l'investissement public. 

Les députés ont finalement limité les effets de la loi SRU pour certaines communes présentant des "contraintes de constructibilité importantes" : elles auront droit à "une possibilité accrue d’adaptation du rythme de rattrapage de leur déficit en logement social". 

L'Assemblée nationale a également adopté, contre l'avis du rapporteur et du gouvernement, un amendement du député communiste Stéphane Peu qui interdit la vente de logements sociaux dans les communes qui font l'objet d'un arrêté de carence ou qui sont engagées dans un contrat de mixité sociale.