Quelque 217 candidats ont décidé de se retirer des législatives, alors qu'ils étaient qualifiés pour le second tour. Objectif : tenter d'empêcher une victoire du Rassemblement national dans leur circonscription. Des désistements essentiellement opérés par des candidats issus de la gauche et de la coalition présidentielle. Quelques candidats, notamment issus des Républicains, ont en revanche décidé de se maintenir en triangulaire dans des circonscriptions où le RN est sorti du premier tour en position de force.
130 désistements pour le Nouveau Front Populaire, 81 pour Ensemble qui regroupe les partis de la coalition présidentielle... Déterminés à empêcher la victoire du Rassemblement national dans leur circonscription et ainsi barrer la route du pouvoir au parti présidé par Jordan Bardella, de nombreux candidats qualifiés pour le second tour des élections législatives ont choisi de se retirer.
Une décision essentiellement prise par des candidats arrivés en troisième position lors du premier tour et qui ont estimé que leur maintien dans une triangulaire aurait favorisé la formation de Marine Le Pen.
Gabriel Attal l'a répété ce mercredi 3 juillet, au micro de France Inter : "Le premier enjeu de ce second tour, c'est de tout faire pour que l'extrême droite ne dispose pas d'une majorité absolue." Dans un communiqué de presse publié mardi 2 juillet, la coalition présidentielle Ensemble pour la République a indiqué que 81 de ses candidats s'étaient désistés entre les deux tours du scrutin. Parmi eux, 60 sont issus du parti présidentiel, Renaissance.
Le Premier ministre - qui estime que "ni La France insoumise, ni le Nouveau Front Populaire ne peuvent avoir une majorité absolue" - entend "faire barrage" aux candidats du Rassemblement national. "Désistement ne veut pas dire ralliement", ni au NFP en général, ni à LFI en particulier, a-t-il cependant aussi dit et répété ces derniers jours.
Dans 90 % des situations, que ce soit de notre côté ou de celui du Nouveau Front Populaire, les candidats se sont retirés. Gabriel Attal
Cinq membres du gouvernement ont ainsi été amenées à se désister. Une décision prise rapidement par Fadila Khattabi (3ème circonscription de Côte-d'Or), Marie Guévenoux (9ème de l'Essonne), Sabrina Agresti-Roubache (1ère des Bouches-du-Rhône). Ou plus tardivement en ce qui concerne Dominique Faure (10ème de Haute-Garonne) et Patricia Mirallès (1ère de l'Hérault).
Plusieurs figures de la majorité présidentielle sortante ont fait de même. C'est notamment le cas de Bruno Millienne (9ème des Yvelines), Caroline Janvier (2ème du Loiret), Frédéric Descrozaille (1ère du Val-de-Marne), ou encore Quentin Bataillon (1ère de la Loire).
Quelques candidats d'Ensemble arrivés troisièmes ont, en revanche, décidé de se maintenir : "Vous avez, ici ou là, quelques candidats qui considèrent qu'en se maintenant ils limitent le risque de la victoire de l'extrême droite", a expliqué mercredi matin Gabriel Attal. C'est le cas du porte-parole de Renaissance, Loïc Signor (23,77 % des suffrages), arrivé derrière le député de La France insoumise sortant, Louis Boyard (42,17 %), et le candidat Rassemblement national Arnaud Barbotin (27,31 %), dans la 3ème circonscription du Val-de-Marne.
Arrivée troisième dans la 1ère circonscription du Val-d'Oise, Emilie Chandler (25,46 %) a, elle aussi, refusé de se désister : "Le Rassemblement national, si je me désiste, il gagne, on en est sûr", a déclaré la députée sortante sur BFMTV. Une attitude jugée "irresponsable et dangereuse" par Maximilien Jules-Arthur, son concurrent du NFP arrivé en deuxième position (30,80 %) derrière la candidate RN Anne Sicard (33,65 %).
Même situation dans la 14ème circonscription des Bouches-du-Rhône, où Anne-Laurence Petel (28,91 %), est également critiqué par la gauche. Arrivée troisième derrière le candidat LR-RN Gérault Verny (31,65%) et celui du NFP Jean-David Ciot (29,48 %), la députée sortante espère bénéficier du report des voix du candidat LR Gaëtan Muselet (5,63 %). En tout, 12 candidats de la coalition présidentielle ont refusé de se désister après être arrivés en troisième position au soir du premier tour.
Conformément à la consigne édictée par les leaders de l'alliance de gauche, la plupart des candidats du Nouveau Front populaire arrivés en troisième position dans une circonscription où le Rassemblement nationale est en situation de l’emporter se sont désistés pour éviter une triangulaire.
Parmi les cas les plus emblématiques, le retrait Noé Gauchard (23,16 %) dans la 6ème circonscription du Calvados, celle de l'ex-Première ministre, Elisabeth Borne, arrivée en deuxième position (28,93 %), derrière le candidat du Rassemblement national Nicolas Calbrix (36,36 %). Autre cas emblématique, dans la 10ème circonscription du Nord, où le ministre de l'Interieur, Gérald Darmanin (36,03 %) est arrivé en tête, mais suivi de peu par le candidat RN Bastien Verbrugghe (34,31 %). Dans cette circonscription, c'est Leslie Mortreux (24,82 %), en troisième position à l'issue premier tour, qui s'est retirée.
De même, deux figures des Républicains, Laurent Wauquiez dans la 1ère circonscription de Haute-Loire et Olivier Marleix dans la 2ème Eure-et-Loir affronteront respectivement en duel les candidats du Rassemblement national Alexandre Heuzey et Olivier Dubois suite aux désistements de Celline Gacon et Nadia Faveris.
Configuration différente, dans la 6ème de l'Essonne, c'est une candidate de gauche qui se désiste au profit d'un candidat de gauche. Hella Kribi-Romdhane (Génération.s, soutenue par LFI) s'est en effet retirée pour favoriser l'élection du député socialiste sortant Jérôme Guedj. Dans cette circonscription attribuée au PS dans le cadre de l'alliance de gauche, Jérôme Guedj avait décliné l'étiquette NFP en raison de ses divergences avec LFI, tout en conservant l'appui de son parti. Ce qui avait suscité la candidature concurrente d'Hella Kribi-Romdhane, qui s'est donc finalement désistée laissant le député sortant affronter en duel la candidate du RN Natacha Goupy.
Enfin, cas particulier dans la 5ème du Maine-et-Loire, où le candidat LR-RN Gilles Bourdouleix (30,54 %), arrivé en 2ème position juste derrière le député sortant de la coalition présidentielle Denis Masséglia (33,70 %) avait annoncé se désister avant de... maintenir sa candidature au dernier moment. Cela dans l’objectif de provoquer une triangulaire, puisque la candidate du Nouveau Front populaire France Moreau, arrivée troisième (21,33 %), avait maintenu sa candidature dans ce qu’elle pensait être un duel face à Denis Masséglia. "J’ai décidé de ne pas maintenir ma candidature en faisant retirer mes bulletins et mes professions de foi sur la 5ème circonscription du Maine-et-Loire", a-t-elle indiqué après avoir appris le maintien de Gilles Bourdouleix.
En revanche, dans la 10ème circonscription des Yvelines, le candidat du NFP Cédric Briolais (LFI) a décidé de se maintenir, malgré sa troisième position au soir du premier tour avec 22,40% des voix, refusant ainsi d'éviter une triangulaire à la ministre déléguée, Aurore Bergé arrivée en première position avec 33,59% des suffrages, devant le candidat RN Thomas Du Chalard avec 28,22%.
Dans 7 circonscriptions, des candidats Les Républicains ont décidé de se maintenir, bien qu'ils soient arrivés en troisième position et malgré la présence de candidats du Rassemblement national le plus souvent arrivés en tête au premier tour. "Le danger qui guette notre pays aujourd'hui, c'est l'extrême gauche", a affirmé sur TF1 l'eurodéputé et vice-président exécutif de LR, François-Xavier Bellamy.
Dans l'Allier (2ème circonscription), Romain Lefebvre (19,7 %) a ainsi choisi de rester candidat au second tour , face à la candidate de La France insoumise Louise Héritier (24,1 %) et celui du Rassemblement national Jorys Bovet (34,3 %). Configuration similaire en Ardèche (3ème), où le député sortant Fabrice Brun (26,5 %) s'est maintenu face à la candidate LFI Florence Pallot (28,3 %) et au candidat RN Cyrille Grangier (31,9 %).
Dans la Drôme (4ème), c'est la députée sortante Emmanuelle Anthoine (24 %) qui n'a pas souhaité se désister. Elle affrontera donc en triangulaire le candidat du Rassemblement national Thibault Monnier (38,4 %), arrivé en tête du premier tour, et la candidat du Parti socialiste Isabelle Pagani (26,3 %), arrivée deuxième.
Le danger qui guette notre pays aujourd'hui, c'est l'extrême gauche. François-Xavier Bellamy, vice-président exécutif des Républicains
Dans l'unique circonscription de la Creuse, la présidente LR du Conseil départemental, Valérie Simonet (étiquetée divers droite aux législatives) s'est également maintenue (22,1 %) face à la députée LFI sortante Catherine Couturier (23,5 %) et le candidat RN Bartolomé Lenoir (33,4 %) arrivé en tête dimanche 30 juin.
Dans le Rhône (8ème), c'est une rare quadrangulaire qui était sur le point d'avoir lieu, la députée sortante Nathalie Serre, arrivée quatrième avec 20,7 %, ayant décidé de confirmer sa candidature. Après le retrait de dernière minute de Dominique Despras (Ensemble), ce sera finalement une triangulaire. Dans cette circonscription, Jonathan Gery (RN) est arrivé en tête avec 33,5 %, devant Anne Reymbaut (PS) avec 21,2 % des suffrages. Enfin, dans l'Oise (7ème), le sortant Maxime Minot (21,5 %) s'étant lui aussi maintenu, le second tour se jouera entre lui, le candidat issu du PCF Loïc Pen (27,2 %) et celui du RN David Magnier (40,4 %), arrivé largement en tête au premier.
A noter qu'en Corrèze (1ère), le député sortant Francis Dubois (28,64 %) a également décidé de rester en lice face à l'ancien président de la République, François Hollande (37,63 %), en première position dimanche dernier. Dans cette circonscription, le candidat du Rassemblement national Maïtey Pouget (30,89 %) n'est cependant arrivée qu'à la deuxième place.
Inversement, dans trois circonscriptions des candidats Les Républicains ont décidé de se retirer pour barrer la route à la formation de Marine le Pen. En Seine-et-Marne (6ème), Régis Sarazin a jeté l'éponge, laissant Amal Bentounsi (LFI) affronter la députée sortante Béatrice Roullaud (RN). Situation similaire en Saône-et-Loire (4ème), où la sortante socialiste Cécile Untermaier affrontera seule Eric Michoux (LR-RN), après le retrait d'Anthony Vadot.
Enfin, à Paris (14ème), dans l'unique circonscription de la capitale où un candidat soutenu par le Rassemblement national s'est qualifié au second tour, Patrick Dray a, lui aussi, renoncé à être candidat au second tour. Dans cette circonscription, le député Renaissance sortant Benjamin Haddad (47,71 %) semblait cependant, quoi qu'il arrive, avoir fait largement la différence face au candidat LR-RN Louis Piquet (17,56 %).