La victoire de la dissidente socialiste Martine Froger face à l'insoumise Bénédicte Taurine, dimanche 2 avril dans la 1ère circonscription de l'Ariège, a ravivé les tensions au sein du PS et relancé le débat sur l'avenir de la Nupes.
Deux gauches irréconciliables ? Cette antienne portée en son temps par Manuel Valls, a semblé se révéler dans toute son acuité au soir du 2nd tour de l'élection législative partielle qui a eu lieu, dimanche 2 avril, dans la 1ère circonscription de l'Ariège. "C'est une victoire de la gauche réelle et républicaine face aux dérives populistes de l'extrême gauche", a ainsi réagi Martine Froger, élue avec 60% des suffrages, suite à la proclamation de sa victoire face à la sortante de La France insoumise Bénédicte Taurine. Cette dernière avait vu son élection annulée par le Conseil constitutionnel le 27 janvier dernier, en raison d'une erreur dans la distribution de certains bulletins de vote lors des législatives de l'an dernier.
Une réaction qui résume à elle seule la fracture au sein du Parti socialiste entre ceux qui assument, sous l'impulsion du premier secrétaire Olivier Faure, la stratégie d'alliance avec La France insoumise à l'intérieur de la Nupes, et ceux qui la contestent, à l'instar du numéro deux de la formation socialiste, Nicolas Mayer-Rossignol, et de la présidente de la région Occitanie, Carole Delga. Des personnalités qui aspirent à un PS indépendant, là où elles estiment que l'alliance conclue lors des dernières élections législatives a conduit leur parti à céder aux exigences et à la ligne de la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon.
Le triple candidat à l'élection présidentielle n'a d'ailleurs pas tardé à réagir, déplorant "une lamentable combine politicienne". "Voilà à quoi servent les 'dissidents du PS'. Refuge du vote Le Pen et Macron au 2ème tour pour battre l'opposition à la retraite à 64 ans", a aussi déploré Jean-Luc Mélenchon. Bénédicte Taurine, qui a recueilli un peu moins de 40% des suffrages, avait le soutien officiel du Parti socialiste dès le 1er tour, tandis qu'au 2nd tour, Martine Froger a notamment bénéficié du soutien de Renaissance, dont la candidate avait été éliminée le dimanche précédent.
"Être élue avec le soutien de toutes les droites, ça permet ce soir de gagner contre l’union de la gauche et des écologistes", a pour sa part réagi Olivier Faure. "Ça ne permettra pas de construire l’alternative dont le pays a besoin. C’est ce qu’on appelle une victoire à la Pyrrhus", a poursuivi le premier secrétaire du PS qui à ce stade, s'oppose à ce que la nouvelle députée siège au sein du groupe "Socialistes" de l'Assemblée.
Au contraire, l'ancienne présidente des députés socialistes et actuelle vice-présidente de l'Assemblée, Valérie Rabault, a adressé ses félicitations à sa nouvelle collègue. "Je souhaite que Martine rejoigne le groupe : elle est socialiste, elle y a toute sa place", a argué la vice-présidente de l'Assemblée, assumant son désaccord avec le numéro 1 du PS.
Carole Delga, soutien rapproché de Martine Froger durant toute la campagne et fer de lance de l'opposition à la Nupes, s'est réjouie d'une victoire incarnant selon elle "une alternative", "avec une gauche sociale, écologiste, laïque et européenne".
Celui qui avait été le concurrent d'Olivier Faure pour le poste de premier secrétaire lors du dernier congrès, Nicolas Mayer-Rossignol, y est également allé de sa réaction, se félicitant de "la victoire de la gauche du futur, du sérieux face à l'outrance : social-écologique, républicaine, laïque, féministe, européenne". "Oui, un autre rassemblement de la gauche, gagnant, est possible" a également estimé le maire de Rouen.
Martine Froger fera ses premiers pas à l'Assemblée nationale en début de semaine. Si elle ne siège pas au sein du groupe "Socialistes", elle pourrait rejoindre les rangs du groupe "Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires" (Liot), prêt à l'accueillir et au sein duquel siègent déjà quelques dissidents de la Nupes.
Au-delà du Parti socialiste, l'avenir de l'alliance électorale scellée dans le cadre des élections législatives de l'an dernier suscite des interrogations à gauche. Dans un entretien accordé à L'Express avant la victoire de Martine Froger, le secrétaire national du Parti communiste, Fabien Roussel, estime, par exemple, que la Nupes "est dépassée" et qu'il faut "rassembler bien au-delà", jusqu'à l'ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve. Après avoir quitté le PS, ce dernier avait dénoncé en septembre dernier une direction qui s'était laissée "toutouiser" par Jean-Luc Mélenchon.