Les députés ont adopté jeudi, en commission des lois, le projet de loi "autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire". Ils ont supprimé l'article 3 du texte afin qu'un nouveau débat parlementaire qui sera organisé au printemps permette de choisir le dispositif le plus adapté à l'évolution de l'épidémie de Covid-19.
L'état d'urgence sanitaire devait s'achever le 16 février : il s'achèvera, au mieux, le 1er juin. Les députés de la commission des lois ont adopté jeudi le projet de loi "autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire".
En vigueur depuis le 17 octobre 2020, ce régime d'exception permet au gouvernement de lutter contre l'épidémie de Covid-19 et l'apparition de ses "variants" plus contagieux : il lui permet notamment de limiter les déplacements des personnes, de limiter les rassemblements ainsi que l'accès aux établissements recevant du public.
"Cette prorogation [de l'état d'urgence sanitaire] est indispensable", a prévenu, mercredi lors de son audition, le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran. "Une sortie pure et simple du régime de l'état d'urgence sanitaire dès le 17 février serait particulièrement non acceptable et même dangereuse", a lui aussi justifié le rapporteur Jean-Pierre Pont (La République en marche).
Les députés ont donc prolongé l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 1er juin. Ils ont également repoussé au 31 décembre la date à partir de laquelle le gouvernement ne pourra plus solliciter la mise en oeuvre de ce régime d'exception.
"On navigue à vue", a regretté le député La France Insoumise Ugo Bernalicis. A l'instar de plusieurs de ses collègues de l'opposition, le député LFI a mis en cause le timing de l'examen du texte, présenté mercredi en Conseil des ministres et examiné ce jeudi. L'élu a également critiqué le gouvernement "qui fait systématiquement n'importe quoi", soulignant la nécessité "resserrer le contrôle" sur celui-ci.
"Il nous semble impossible de traverser toute l'année 2021 avec pour seuls outils des mesures restrictives de liberté dans l'attente d'un succès du vaccin", a quant à elle jugé Agnès Firmin Le Bodo (Agir ensemble). "Nous craignons que le niveau d'acceptabilité des mesures de privation de liberté s'érode un peu plus chaque jour", a ajouté la députée qui siège au sein de la majorité.
De son côté, Philippe Gosselin (Les Républicains) a évoqué la nécessité d'insérer dans le texte une "clause de revoyure" permettant au Parlement d'être plus souvent consulté. La socialiste Marietta Karamanli a elle aussi tenté de "limiter autant que cela se peut la durée de l'état d'urgence".
De mars 2020 à décembre 2021, ça fait long quand même, ça fait très long. Paul Molac (Libertés et Territoires)
Finalement, les députés ont adopté des amendements identiques, issus de plusieurs groupes (La République en marche, Les Républicains, La France insoumise, Libertés et Territoires), pour supprimer l'article 3 du texte.
Celui-ci prévoyait d'instaurer un régime transitoire de "sortie de l'état d'urgence sanitaire" après le 1er juin 2021. Ce régime, qui devait durer jusqu'au 30 septembre 2021, devait permettre au gouvernement de "continuer à disposer de facultés d’intervention à l’issue de l’état d’urgence sanitaire".
Cette suppression permettra "de refaire un point sur la situation sanitaire à l'horizon avril-mai 2021", a précisé Guillaume Gouffier-Cha (LaREM). Ainsi, le Parlement sera à nouveau consulté : il pourra décider de voter une prolongation de l'état d'urgence, la mise en oeuvre d'un régime transitoire ou une sortie de l'état d'urgence.
"L'idée c'est d'éviter d'avoir, à tout prix, un long tunnel sans rendez-vous parlementaire", s'est félicité Philippe Gosselin. L'élu, auteur d'un rapport sur le régime juridique de l'état d'urgence sanitaire, a également proposé de limiter les prorogations de l'état d'urgence sanitaire à trois mois.
Si l'amendement n'a pas été adopté, le rapporteur du texte Jean-Pierre Pont (LaREM) n'a pas fermé la porte à cette proposition. Elle sera examinée à nouveau en séance publique, le mercredi 20 janvier.