Auditionné mercredi à l'Assemblée nationale, le directeur général de la Santé a dit sa "très grande crainte" de "voir de très nombreuses personnes succomber" à la nouvelle flambée de l'épidémie de Covid-19.
La deuxième vague est bien là et, de l'avis du directeur général de la Santé, elle pourrait être encore plus violente que la première. Mercredi, à quelques heures de l'allocution du président de la République Emmanuel Macron, Jérôme Salomon était auditionné par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la gestion de l'épidémie de Covid-19. Le constat qu'il a dressé est alarmant.
"Nous ne sommes pas encore, loin de là, arrivés au pic de la deuxième vague", a expliqué le numéro 2 du ministère de la Santé. Pour lui, "Les personnes âgées, fragiles, obèses, qui sont positives aujourd'hui ont une probabilité très importante d'aller à l'hôpital voire de passer en réanimation (...) dans plusieurs jours".
La courbe va augmenter mathématiquement, mécaniquement, quoiqu'on fasse. Jérôme Salomon.
Et le directeur général de la Santé de s'inquiéter d'une "augmentation exponentielle du nombre de cas", 60% ces derniers jours. "Le nombre de cas a atteint un record dimanche à 52.000 cas quotidiens", a-t-il déclaré.
En tout, la deuxième vague a provoqué depuis le 1er septembre 40.000 hospitalisations et 4.000 décès. Depuis le début de l'épidémie, ce sont 35.541 personnes qui sont mortes du virus dans le pays.
À ce titre, si l'Europe est "le nouvel épicentre de l'épidémie", la France, avec 1,2 million de cas confirmés, est désormais le pays du continent qui compte le plus de porteurs du virus. Le directeur général de la Santé a d'ailleurs réfuté toute distinction entre les métropoles et les territoires ruraux.
Toutes les régions sont touchées, tous les départements sont touchés. Jérôme Salomon
"Je dois partager avec vous une très grande crainte", a expliqué Jérôme Salomon, qui redoute de "voir de très nombreuses personnes" être "très fortement affectées (...) voire succomber à cette maladie".
Est-il encore possible de l'éviter ? Au sujet des lits de réanimation, le directeur général de la Santé a souligné qu'en avoir "trois ou quatre fois plus" ne règlerait pas le problème, expliquant qu'il s'agissait plutôt d'éviter au maximum que les patient développent des formes graves nécessitant une hospitalisation dans ces services. "C'est ma hantise", a-t-il déclaré, rappelant que la mortalité en réanimation est supérieure à 30%.
"Il faut l'avouer, nous avons encore beaucoup d'inconnues sur ce virus", a par ailleurs reconnu Jérôme Salomon, qui a profité de son audition pour redonner quelques conseils à la population : limitation au maximum des contacts sociaux et respect des gestes barrières.
Selon lui, les lieux à éviter sont les "lieux bondés, clos, denses et où l'on reste longtemps". "Les moments sans mesures barrières sont des moments à haut risque", a-t-il ajouté, pointant aussi du doigt les réunions en famille ou entre amis.
Du côté des questions des députés, c'est, une nouvelle fois, celle des stocks stratégiques de l’État, notamment de masques, qui a cristallisé l’attention des membres de la commission d'enquête. Répondant à une question du rapporteur Éric Ciotti (Les Républicains), Jérôme Salomon a justifié la politique de gestion en la matière. Il a expliqué que pour éviter de conserver des masques inutilisés et périmés, il était apparu pertinent de privilégier la régularité dans les commandes de l'État, plutôt que la quantité. Il a ainsi évoqué des "stocks tournants", "dynamiques", "agiles", tout en assurant : "ce n'était pas un changement de doctrine".
Le député de la Meuse Bertrand Pancher (Libertés et Territoires), lui a répondu en ces termes : "la notion de stocks tournants, c'est une formule habile pour dire 'on a destocké parce que ça coûte cher'". David Habib (Socialistes et apparentés) s'est lui interrogé sur le fait qu'il n'y ait eu aucune commande de masques réalisée entre le 30 octobre 2018 et le 31 janvier 2020.
Pour finir, Jérôme Salomon est revenu sur ceux, "nombreux, qui ont dit, 'il n'y a plus d'épidémie, il n'y aura pas de deuxième vague, ce virus a disparu'". Une référence, notamment, aux propos du professeur Raoult, qui avait déclaré dès le mois d'avril dernier qu'il se pourrait que le virus disparaisse purement et simplement, et que l'hypothèse d'une deuxième vague n'avait pas de précédent relevant des cas d'infections respiratoires.
Des prédictions largement démenties par les faits a-t-il regretté.