Adopté en commission, le projet de loi "Industrie verte" est débattu à partir du lundi 17 juillet dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Si le gouvernement et la majorité vantent un texte pour "faciliter, favoriser et financer" le développement d'une industrie décarbonée en France, les oppositions dénoncent une "vision court-termiste" de l'industrie et un "petit texte d'urbanisme".
Une division par deux. En trente ans, la part de l'industrie dans la production de richesses n'a cessé de se réduire, passant de 22% à 11% du PIB annuel de la France et entraînant la suppression de plus de 2,5 millions d'emplois industriels.
Face à cette désindustrialisation et à la suite du plan France 2030 prévoyant 54 milliards d'euros pour relancer ou implanter de nouvelles activités technologiques et industrielles sur le territoire français d'ici la fin de la décennie, le gouvernement a présenté un projet de loi visant à "faciliter, favoriser et financer" le développement d'une industrie décarbonée en France, selon l'exposé des motifs du texte (disponible ici).
Déjà adopté largement par le Sénat en première lecture, le texte a également été adopté lors de son examen en commission spéciale à l'Assemblée nationale, début juillet. Avant son examen en séance publique à compter de ce lundi 17 juillet, les débats en commission ont reflété des appréciations divergentes du texte selon les groupes parlementaires.
Pour le ministre délégué chargé de l'industrie, Roland Lescure, le texte conjointement défendu avec le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, et le secrétaire d'Etat à la Transition écologique, Christophe Béchu, est un "véritable tournant pour notre économie", permettant de réparer la "faute économique, sociale, écologique" de la désindustrialisation.
Le texte, composé de trois titres, contient des mesures pour "accélérer les implantations industrielles et réhabiliter les friches", notamment en inscrivant des "objectifs de développement industriel" dans le schéma d'aménagement régional du territoire (Sraddet) et en créant une "commission régionale pour la gestion des friches", une demande souhaitée par les députés communistes à travers un amendement.
Le texte comporte également plusieurs dispositions de simplification administrative pour réduire par deux les délais de procédure (de 17 mois actuellement à 9 mois espérés à termes), ainsi que des mesures relatives à la commande publique et au financement des projets industriels, via la transposition en droit français de nouveaux fonds européens (les ELTIF 2.0) et la création d"un "Plan épargne avenir climat". Un milliard d'euros d'encours est attendu par la création de ce livret d'ici 2027, selon le rapporteur des mesures de financement, Damien Adam (Renaissance).
Lors des débats en commission, les prises de parole des oppositions se sont succédées pour pointer un texte insuffisant : "vision court-termiste" de l'industrie selon Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine), "petit texte d'urbanisme" pour Raphaël Schellenberger (Les Républicains), absence de "stratégie pluriannuelle" pour Gérard Leseul (Socialistes). Benjamin Saint-Huile (Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires) a, quant à lui, appelé le gouvernement à "arrêter les éléments de communication" et dit craindre, par l'accélération des procédures administratives, une "accélération du risque de contentieux."
Pressés par les oppositions de fournir une définition de l'industrie verte dans le projet de loi, le ministre délégué chargé de l'Industrie Roland Lescure et le rapporteur général du texte, Guillaume Kasbarian (Renaissance), ont estimé que cette demande risquait d'amener à "exclure un certain nombre d'industries de la trajectoire de décarbonation qu'on essaye de mettre en place" et appelé à "laisser de la flexibilité."
Plusieurs évolutions ont cependant été actées en commission, avec l'adoption de 256 amendements, "sans surprise particulière", selon Guillaume Kasbarian.
Des dispositions relatives aux énergies renouvelables (article 2 bis) et aux objectifs "zéro artificialisation nette" des sols ont ainsi été modifiées. La traçabilité des résidus de production dans le cadre du développement de l'économie circulaire en France a également été renforcée (article 4). Un amendement du groupe Ecologiste a été adopté pour supprimer le poste de préfet coordinateur des projets industriels., tandis qu'un amendement des Républicains a été adopté pour supprimer les "projets territoriaux d'industrie circulaire".
Lors du vote du texte au terme de l'examen par la commission spéciale, les groupes de la majorité (Renaissance, Démocate, Horizons) et Les Républicains ont voté pour, tandis que les groupes La France insoumise et Ecologistes ont voté contre - ces derniers proposeront d'ailleurs, selon nos informations, un "manifeste écologiste" à paraître ce lundi sur la question de l'industrie. Enfin, les groupes Socialistes et du Rassemblement national se sont abstenus, tandis que les députés Gauche démocrate et républicaine et Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires, n'ont pas pris par au vote à ce stade.
Comme en commission, les débats dans l'hémicycle devraient s'articuler autour du consensus apparent sur l'objectif de réindustralisation décarbonée du pays et des divergences stratégiques pour y parvenir.