Energies renouvelables : débats parfois électriques, mais vents favorables pour le projet de loi

Actualité
par Léonard DERMARKARIANSoizic BONVARLET, le Mercredi 7 décembre 2022 à 20:10, mis à jour le Vendredi 6 janvier 2023 à 15:05

Depuis lundi 5 décembre, le projet de loi visant à accélérer la production d'énergies renouvelables fait l'objet d'intenses débats, notamment sur les éoliennes. Les Républicains et le Rassemblement national sont vent debout. Des vents contraires apparaissent au sein de la Nupes. Mais, bien que chahutés, le gouvernement et la majorité n'ont jusque-là pas essuyé de recul significatif. 

Le mot "éolien" ne figure pas dans le titre du projet de loi, mais il est omniprésent dans les débats, depuis lundi, à l'Assemblée nationale. L'énergie éolienne, terrestre en particulier, a largement monopolisé le temps de parole des députés au cours des trois premiers jours de l'examen du texte. 

L'acceptabilité des éoliennes débattue

Parmi les principales préoccupations des députés : la "saturation visuelle" des paysages et la distance entre les éoliennes et les habitations. En l’état, il existe une distance minimale de 500 mètres devant séparer les éoliennes des habitations. De nombreux députés, de différents bords, ont argué des évolutions techniques augmentant la taille des éoliennes et leur puissance, et souligné le ressentiment croissant à l’échelle locale, pour plaider en faveur d’un éloignement plus important des éoliennes par rapport aux habitations. Les Républicains ont notamment multiplié les amendements, se posant en défenseurs de la ruralité et de ses habitants. En réponse, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher, a demandé aux députés Les Républicains, ainsi qu'à ceux du Rassemblement national, très offensifs aussi sur ce sujet, d'assumer leur "refus" de développer les énergies renouvelables.

 

Si la majorité relative de l'exécutif a pu être mise en danger sur différents amendements, elle n'a jusqu'à présent essuyé aucun recul sur le projet de loi. A ce stade de l'examen du texte, tous les articles examinés ont été adoptés conformément aux souhaits du gouvernement, un seul ayant été en revanche maintenu contre son avis. 

Les premiers jours d'examen du projet ont permis de percevoir les différentes sensibilités pouvant exister au sein de chaque famille politique. Ainsi, quelques députés de la majorité, Xavier Batut (Renaissance), Thierry Benoist et Loïc Kervran (Horizons et apparentés), ont déposé des amendements visant à défendre les "habitants de la ruralité" face à la proximité et aux nuisances des éoliennes. Au sein de la Nupes, le communiste Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine) s'est, quant à lui, montré critique vis-à-vis des groupes Socialistes et La France insoumise qu'il trouve trop complaisants à propos de ce texte. 

Une situation dont le gouvernement et les rapporteurs ont parfois profité pour se poser en arbitre des débats, distribuant parfois bons et mauvais points. Pierre Cazeneuve (Renaissance) a ainsi manié l'ironie, soulignant que certains amendements des Républicains visaient à supprimer des dispositions de leurs collègues du Sénat. 

La planification, point clé du texte

Considéré comme essentiel, l'article 3 - relatif à la définition par les collectivités locales de "zones d’accélération pour le développement des énergies renouvelables" - a été appelé en priorité et son examen a commencé mercredi soir.

Cet article visant à mettre en œuvre une planification territorialisée en matière d'EnR, a fait émerger des interrogations sur la réalité du rôle et du pouvoir des maires en la matière et la nécessité d'assurer qu'ils ne seront pas pas concurrencés, voire doublés, par d'autres instances, notamment les intercommunalités. "Il est clair que les territoires sont au cœur du dispositif", a réaffirmé le rapporteur, Henri Alfandari (Horizons), évoquant la planification comme un moyen, pour les communes en particulier, de ne plus "subir" les projets d'EnR, mais bien de les "choisir". "On laisse réellement les clés du camion aux élus locaux", a renchéri le président de la commission des affaires économiques, Guillaume Kasbarian (Renaissance).

Des amendements visant à préciser que les zones d'accélération seront strictement exclusives, afin qu'aucun projet d'EnR ne puisse être mis en œuvre en dehors de celles-ci, ont été portés par la plupart des groupes d'opposition, à l'exception notable du groupe Socialistes. Le gouvernement et le rapporteur se sont opposés à la mesure, au nom d'un risque accru de contentieux et d'une faisabilité complexe, et ont défendu le dispositif tripartite comprenant des zones d'accélération, des zones d'exclusion (d'ores-et-déjà mises en place par la loi 3DS), et enfin, des zones neutres, dont le statut pourra évoluer au gré des différentes programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE). La démonstration du gouvernement a su convaincre le groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, qui a finalement retiré son amendement. Les amendements des autres groupes d'opposition n'ont pour leur part pas été adoptés.
Un amendement de Sébastien Jumel (GDR), destiné à ce que les zones d'accélération ne concernent que les EnR terrestres, et que les EnR en mer fassent l'objet d'un document de planification spécifique, a en revanche été adopté avec le soutien du rapporteur.