La proposition de loi du Rassemblement national "visant à soutenir les femmes qui souffrent d’endométriose", a été rejetée en commission à l'Assemblée. La Nupes n'a eu de cesse de dénoncer une "instrumentalisation", tandis que la majorité a jugé les dispositions du texte inadéquates. Celui-ci sera cependant examiné dans l'hémicycle le 12 octobre, lors de la journée d'initiative parlementaire du groupe RN.
Si le Rassemblement national avait choisi un thème consensuel parmi ceux défendus dans le cadre de sa "niche" parlementaire, la grande majorité des députés a montré ce mercredi 4 octobre qu'elle n'était pas prête à le rejoindre dans les solutions qu'il propose. En effet, si le constat d'une prise en charge insuffisante de l'endométriose a été partagé par tous les groupes qui composent l'Assemblée nationale, la Nupes a refusé de faire cause commune avec les députés du RN, dont elle a dénoncé le cynisme politique. Les différentes composantes de la majorité présidentielle pointant, quant à elles, le manque d'efficience de la proposition de loi.
Rapporteur du texte, Emmanuel Taché de la Pagerie (Rassemblement national) a initié son exposé en rappelant que l'endométriose est une affection chronique et inflammatoire touchant "au moins 2 millions de femmes en France", l'apparentant à "un poison dont la réalité est largement minimisée ou niée" et s'avérant être "la première cause d'infertilité en France". "L'objectif de cette proposition de loi est en partie de rendre visible un invisible qui pourrit la vie de millions de femmes", a aussi indiqué le député.
Le texte propose donc la reconnaissance automatique de l'endométriose en tant qu'affection de longue durée (ALD) au caractère exonérant, permettant la prise en charge à 100% des frais de santé. Dans un deuxième temps, il propose aussi aux femmes dont le quotidien est manifestement dégradé - et qui le souhaiteraient -, de pouvoir être reconnues comme travailleuses handicapées (RQTH).
Lorsque j'entends certains parler d'opportunisme, je leur répond opportunité. Opportunité avec ce texte de faire concrètement avancer la cause des femmes. Emmanuel Taché de La Pagerie
Indiquant que son groupe voterait en défaveur de la proposition de loi, Stéphanie Rist (Renaissance) a souhaité rappeler que le gouvernement avait initié une stratégie nationale de lutte contre l'endométriose qu'elle a qualifié d'"ambitieuse", avant de faire valoir que les femmes souffrant d'endométriose pouvaient déjà demander une inscription au titre des ALD 31 dites "hors liste" et "effectuer une demande de reconnaissance de travailleur handicapé". "Ce que vous proposez est donc satisfait lorsque cela est nécessaire", a-t-elle aussi fait valoir.
Sandrine Josso (Démocrate) a également fait part de l'intention de son groupe de rejeter le texte "qui ne répond pas à ses objectifs", avant de regretter qu'il n'aborde pas le sujet de la santé mentale en lien avec l'endométriose. "Cette proposition de loi rate sa cible", a également estimé Frédéric Valletoux (Horizons), considérant que les deux mesures proposées étaient déjà en vigueur.
"Cynisme, opportunisme, mauvais plagiat du travail des autres. Décidément rien ne vous arrête", a pour sa part déploré Clémentine Autain (La France insoumise). À l'origine d'une proposition de résolution "visant à reconnaître l’endométriose comme une affection de longue durée", votée à l'unanimité en janvier 2022 mais non contraignante sur le plan législatif, la députée a estimé que l'objectif du RN était de "faire oublier son mépris du droit des femmes", rappelant notamment la frilosité des prises de position d'un certain nombre de ses représentants quant à l'extension du droit à l'IVG.
"Madame Autain (...) si j'étais vous j'agirais avec un peu plus d'humilité, parce que si je prends un couteau et que je m'amuse à écarter la plaie, je trouverais Monsieur Quatennens et le manque de réaction de certains sur vos bancs quand il s'est agi de violences conjugales", a répliqué le rapporteur à la députée LFI, avant de dénoncer plus largement de la part de la Nupes "des propos d'estrade et des procès d'intention".
"Je regrette que le gouvernement ait tellement tardé que vous puissiez instrumentaliser cette cause", a déclaré Arthur Delaporte (Socialistes) après que sa collègue de groupe Marie-Noelle Battistel ait indiqué que l'inscription d'une pathologie en tant qu'ALD devait être opérée par décret. Sandrine Rousseau (Ecologiste), a pour sa part comparé le Rassemblement national au coucou "qui jette les œufs et les combats par-dessus bord, et essaye de reprendre le nid pour sa propre progéniture".
En commission, seuls Les Républicains n'ont pas rejeté en bloc la proposition de loi. Isabelle Valentin a aussi évoqué un "sujet qui devrait faire l'unanimité", regrettant qu'à ce jour, seules les formes les plus sévères d'endométriose puissent être reconnues en ALD 31. La députée a cependant fait part de son désaccord avec l'article 2 du texte, qui "n'a pas lieu d'être", la demande de statut de travailleur handicapé étant déjà possible. Elle a cependant indiqué que son groupe serait prêt à voter le texte "en fonction des discussions et des avancées".
Hormis ceux du rapporteur, Les Républicains ont donc été les seuls à proposer des amendements, dont la sensibilisation de l'ensemble des acteurs médicaux durant leur formation, une tolérance pour les absences de jeunes filles en milieu scolaire sur foi d'un certificat médical, ou encore le télétravail facilité durant les phases de crise. Tous ont été rejetés, au même titre que les articles du texte.
Après cet examen en commission des affaires sociales, la proposition de loi sera débattue dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale le 12 octobre, lors de la journée d'initiative parlementaire du groupe présidé par Marine Le Pen.