Des députés habillés avec des couleurs évoquant celles de la Palestine, d'autres députés ceints de leur écharpe aux couleurs de la France, Rachel Keke (La France insoumise) brandissant un drapeau palestinien... Ce sont quelques images vues, ce mardi 4 juin, lors de la séance de Questions au gouvernement. Que dit le règlement de l'Assemblée nationale sur tous ces sujets ? Explications sur les règles et les sanctions en vigueur au Palais-Bourbon.
"Dans l'hémicycle, l'expression est exclusivement orale". Il s'agit de la première phrase de l'article 9 de l'instruction générale du Bureau de l'Assemblée nationale intitulé "Tenue en séance". Un document, qui figure en annexe du règlement de l'institution, indispensable pour savoir ce qui est, ou pas, permis dans l'hémicycle.
"L'hémicycle de l'Assemblée nationale est le lieu du débat démocratique et l'expression des parlementaires s'effectue exclusivement à l'oral"... C'est justement ce qu'a rappelé la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, au début de la séance des Questions au gouvernement, ce mardi 4 juin, alors que des députés des groupes Ecologiste, La France insoumise et Gauche démocrate et républicaine avaient décidé de s'habiller avec des couleurs rappelant celles de la Palestine, ce qui a entraîné une réaction sur d'autres bancs de l'Assemblée, des députés Les Républicains et Rassemblement national décidant de ceindre leur écharpe tricolore.
"L’utilisation, notamment pendant les questions au Gouvernement, à l’appui d’un propos, de graphiques, de pancartes, de documents, d’objets ou instruments divers est interdite. Instruction générale du Bureau de l'Assemblée nationale
Quelques minutes, alors que la séance se déroulait normalement, Rachel Keke (La France insoumise) a brandi un drapeau palestiniens, imitant ainsi son collègue Sébastien Delogu (LFI) qui avait fait de même la semaine précédente, ce genre de geste étant interdit dans l'hémicycle.
L'article 9 de l'instruction générale du Bureau proscrit en effet le recours à tout type d'objet en séance : "L’utilisation, notamment pendant les questions au Gouvernement, à l’appui d’un propos, de graphiques, de pancartes, de documents, d’objets ou instruments divers est interdite", indique le document qui précise les règles fixées au fil des années par le Bureau de l'Assemblée, la plus haute instance dirigeante de l'institution au sein de laquelle tous les groupes politiques du Palais-Bourbon sont représentés.
"Nous sommes à l'Assemblée nationale pour représenter les Français (...). Nous ne sommes pas dans un match de foot, nous ne sommes pas dans un meeting, nous ne sommes pas dans un théâtre. Nous sommes à l'Assemblée nationale. L'expression des parlementaires est entièrement libre et elle est sacrée", a souligné Yaël Braun-Pivet à l'issue des Questions au gouvernement, répétant néanmoins que "cette liberté d'expression, selon nos règles (...) doit être exclusivement orale".
La tenue vestimentaire ne saurait être le prétexte à la manifestation de l’expression d’une quelconque opinion. Instruction générale du Bureau de l'Assemblée nationale
L'instruction générale du Bureau fixe également des règles en matière de tenue vestimentaire : "La tenue vestimentaire ne saurait être (...) le prétexte à la manifestation de l’expression d’une quelconque opinion : est ainsi notamment prohibé le port de tout signe religieux ostensible, d’un uniforme, de logos ou messages commerciaux ou de slogans de nature politique", peut-on ainsi lire.
Un ensemble de principes et de règles que la vice-présidente de l'Assemblée, Elodie Jacquier-Laforge (Démocrate) a rappelé et expliqué, avant les Questions au gouvernement de ce mardi, au micro de LCP.
Outre les faits qui peuvent valoir ce que le règlement de l'Assemblée nationale appelle des "peines disciplinaires" aux députés qui enfreignent les règles, les sanctions prononcées dépendent aussi en partie du degré de perturbation de la séance que telle ou telle infraction au règlement a provoqué. Le régime des sanctions en vigueur au Palis-Bourbon est fixé par les articles 70 à 73 du règlement de l'institution :
Les deux premières sanctions peuvent être prises par la présidence de la séance, tandis que les deux sanctions les plus lourdes doivent être proposées par le Bureau, c'est-à-dire de façon collective, et être approuvées par un vote de l'Assemblée nationale. C'est à l'issue de ce processus que Sébastien Delogu (LFI) a été exclu pour 15 jours de séance mardi 28 mai, le Bureau ayant considéré qu'il s'était livré à une "manifestation troublant l'ordre" et s'était "rendu coupable de provocation envers l'Assemblée" (voir les motifs de sanctions plus bas).
Une sanction prononcée en raison de "l'impossibilité absolue de reprendre nos travaux du fait du tumulte" provoqué par le geste du député et parce que celui-ci avait par ailleurs "déjà été sanctionné à trois reprises", a expliqué la présidente de l'Assemblée nationale dans une vidéo publiée le week-end dernier.
Ce mardi 4 juin, la séance ayant pu reprendre assez rapidement Rachel Keke (LFI) n'a été sanctionnée que d'un "rappel à l'ordre avec inscription au procès-verbal", ce qui privera la députée du quart de son indemnité parlementaire pendant un mois. Cependant, une réunion du Bureau aura lieu ultérieurement pour décider si cette sanction doit être aggravée.
Le règlement de l'Assemblée nationale indique que peuvent faire l'objet de "peines disciplinaires" tout député :