Comme en commission, les députés ont supprimé l'article 6 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour l'année 2025. Défendu par le gouvernement, appuyé par la gauche, l'article prévoyait une refonte des dispositifs d'allègements de cotisations patronales. Une réforme à laquelle se sont opposés les députés de trois groupes du "socle commun" (Ensemble pour la république, Droite républicaine et Horizons) et du Rassemblement national. Ce vote en première lecture ne permet cependant pas de préjuger de la version finale du texte.
Bis repetita. Comme la semaine dernière, l'article 6 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, prévoyant une refonte des exonérations patronales concernant les salaires allant jusqu'à 3,5 Smic, a été supprimé en séance publique par les députés, lors de l'examen du texte en première lecture à l'Assemblée nationale.
L'article prévoyait de limiter et de répartir différemment les allègements de cotisations patronales, aujourd'hui fortement concentrés au niveau du SMIC, avec pour objectifs de réaliser 4 milliards d'euros d'économies et de lutter contre les "trappes à bas salaires". Les députés hostiles à cette réforme craignant, quant à eux, une hausse du coût du travail et une baisse de compétitivité des entreprises, avec à la clé des conséquences négatives sur l'emploi.
A l'encontre de la volonté du gouvernement qui, sur ce sujet, était soutenu par les groupes du Nouveau Front populaire, la suppression de l'article 6 a été votée par 170 voix "pour", 162 "contre". A l'exception des Démocrates, les groupes du "socle commun" de Michel Barnier (Ensemble pour la République, Droite républicaine, Horizons), ainsi que le Rassemblement national, ont en revanche voté en faveur de la suppression.
Justifiant la réforme d'exonérations patronales actuellement "trop coûteuses" (80 milliards d'euros) et la création d'un "dispositif unique" prévu par l'article, la ministre du Travail et de l'Emploi, Astrid Panosyan, a dénoncé "des effets pervers qui se sont construits entre les exonérations de charge d'un côté et la stimulation tout à fait nécessaire des bas salaires", ayant deux conséquences : des "trappes à bas salaire" et des "trappes à inactivité".
"J'entends les craintes" a-t-elle affirmé, appelant cependant à maintenir l'article dans le projet de loi et à l'améliorer à travers la navette parlementaire entre Assemblée nationale et Sénat. Astrid Panosyan a été appuyée par le ministre du Budget et des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, qui a pointé une "accélération très rapide sur ces quatre dernières années" des exonérations (+20 milliards d'euros). Et de plaider, lui aussi, pour le maintien de l'article, afin de proposer un "chemin de freinage de la dépense publique" et d'avancer sur la "désmicardisation" de l'économie française, alors que près de 17% de la population active française est rémunérée au niveau du Smic, selon une récente étude de la Dares, rattachée au ministère du Travail.
Malgré l'argumentation des ministres, la suppression de l'article a notamment été défendue par Gérald Darmanin (Ensemble pour la République) qui a critiqué une réforme qui entraînerait une augmentation du coût du travail, "au pire moment pour notre économie", tandis que le président de la Droite républicaine, Laurent Wauquiez, a considéré que l'allègement des charges "bénéficie au travail et aux salaires".
Comme en commission la semaine dernière, une alliance à front renversé s'est opérée dans l'hémicycle : le gouvernement a été soutenu dans sa volonté de réforme par les députés du Nouveau Front populaire, uni pour soutenir le maintien de l'article tout en dénonçant son insuffisance. "Les aides publiques ne sont pas attribuées à vie", a notamment affirmé le député communiste Yannick Monnet (Gauche démocrate et républicaine).
"Vous avez vos troupes qui se vengent d'une mesure totalement inefficace parce que brutale", a pointé Hervé de Lépinau (Rassemblement national) à l'adresse du gouvernement soulignant ainsi les divisions au sein du "socle commun". Sur le fond, le groupe de Marine Le Pen a soutenu la suppression de l'article, évoquant une réforme qui "menace directement l'emploi" et les TPE-PME, selon Laure Lavalette (RN).
La suppression de l'article 6 du PLFSS, en première lecture, ne permet cependant pas de préjuger du contenu de la version finale du texte, dont le parcours législatif ne fait que commencer.