Budget 2024 : les grandes lignes du projet de loi de finances définitivement adopté

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Montage photo de l'Assemblée nationale (à gauche) et du Ministère de l'Economie et des Finances (à droite). Crédits photo : Wikipédia (licence Creative Commons)
par Ludovic FAU, le Vendredi 22 décembre 2023 à 14:40, mis à jour le Vendredi 22 décembre 2023 à 16:00

La loi de finances 2024 a été définitivement adoptée à l'Assemblée nationale jeudi 21 décembre. Régalien, énergie, écologie, logement... Tour d'horizon des grandes lignes du budget de l'Etat pour l'année prochaine, alors que le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, estime que "la crise inflationniste" est "derrière nous". 

Des moyens pour supplémentaires pour la justice, la sécurité et la défense, ainsi que pour la transition écologique, une sortie progressive des boucliers anti-inflation, quelques mesures face à la crise du logement... Voici les grandes lignes de la loi de finances pour l'année prochaine, qui vient d'être définitivement adoptée par l'Assemblée nationale, après le rejet d'une ultime motion de censure présentée par la gauche, jeudi 21 décembre. 

Comme l'an dernier, l'adoption du budget de l'Etat a nécessité - au fil de son parcours législatif - cinq recours à l'article 49.3 de la Constitution par le gouvernement, privé de majorité absolue au Palais-Bourbon.  

Vers la fin de la "crise inflationniste", selon Bruno Le Maire

Pour bâtir la loi de finances, le gouvernement anticipe une croissance de 1,4% dans un contexte international incertain. Un "pari", a estimé en septembre le Haut Conseil des Finances publiques, qui juge la prévision "élevée mais pas inatteignable".

Autre paramètre de ce budget, l'inflation. Le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, estime que "la crise inflationniste" est "derrière nous", et que l'inflation sera "sous les 3% en 2024" et devrait à terme tourner "autour de 2%", sans retrouver toutefois les niveaux d'avant-crise. L'Insee anticipe une inflation à 2,6% sur un an en juin prochain, contre 3,7% fin 2023. Le ministre, qui s'exprimait jeudi 21 décembre sur Europe 1 note cependant que "cela reste très dur pour beaucoup de nos compatriotes et que la question des salaires et des prix est une priorité parce qu’il y a encore beaucoup trop de gens pour lesquels cela reste difficile". 

Le gouvernement en profite pour éteindre certaines mesures anti-inflation, ce qui constitue l'essentiel des économies prévues sur l'exercice budgétaire à venir, avec une fin prévue du bouclier tarifaire mi-2024. Il est cependant prévu que l'indemnité carburant de 100 euros soit être élargie à 1,6 million de bénéficiaires supplémentaires, pour atteindre un coût total d'environ 600 millions d'euros. Mais Bruno Le Maire a indiqué qu'elle ne sera accordée en 2024 que si les prix des carburants "explosent" et approchent les 2 euros le litre

La prorogation de la "contribution temporaire" du secteur pétrolier a, quant à elle été écartée, le gouvernement soulignant l'engagement de Total à plafonner à 1,99 euro le litre de carburant pour toute l'année 2024. En revanche, la taxation des profits exceptionnels réalisés par les producteurs d'électricité a été reconduite. Le gouvernement espère en obtenir 500 millions d'euros en 2024. L'exécutif pourra rehausser par arrêté les prix de l'énergie - avec un plafond - afin de sortir progressivement des boucliers tarifaires. Bercy s'est engagé à ce que les prix de l'électricité début 2024 n'augmentent pas de plus de 10% par rapport à août 2023.

Concernant les grands équilibres, l'exécutif reste tiraillé entre ses promesses d'investissements et celle de faire passer le déficit public à 4,4% du PIB l'an prochain, et sous les 3% d'ici 2027, repoussant ainsi à ce stade une baisse d'impôt de 2 milliards d'euros qui avait été évoquée par le président de la République. 

Justice, intérieur, armées... Plus des moyens pour le régalien 

Retranscrivant trois lois de programmation votées en un an, le texte prévoit des budgets en hausse dans le régalien, notamment ceux des Armées (47,2 milliards d'euros de crédits hors pensions), de l'Intérieur et des Outre-mer (33,6 milliards) et de la Justice (12,1 milliards). 

Afin de participer à cet effort, l'épargne des livrets A pourra servir à financer - de façon encadrée et sans rogner sur la part dévolue au logement social - des entreprises de l'industrie de défense, notamment petites et moyennes. La loi de finances prévoit aussi des embauches de fonctionnaires dans la sécurité intérieure (dont plus de 2 000 policiers et gendarmes supplémentaires), et dans la justice (avec plus 1 925 équivalent temps plein).

L'Education nationale va, quant à elle, bénéficier de revalorisations pour les enseignants, mais certaines sont critiquées par des syndicats et des oppositions, car conditionnées à de nouvelles missions.

Des efforts pour l'écologie, mais pas d'ISF vert

Le budget 2024 est plus vert que le précédent, avec 7 milliards d'euros supplémentaires affectés à la transition écologique. Il prévoit aussi des crédits d'impôts pour soutenir les secteurs des panneaux photovoltaïque, de l'éolien ou encore des pompes à chaleur.

Mais la copie est jugée largement insuffisante à gauche. "Le budget ne répond pas aux besoins du moment", a notamment critiqué le président de la commission des finances de l'Assemblée, Eric Coquerel (La France insoumise), estimant qu'il "faudrait avoir le courage d'aller toucher aux recettes". Mais le gouvernement a rejeté l'idée d'instaurer dans ce texte un ISF vert ou une taxe sur les superprofits pour financer la transition écologique.

Quelques mesures face à la crise du logement 

C'est "une bombe qui va exploser", a alerté la vice-présidente de l'Assemblée, Valérie Rabault (Socialistes). Dans l'opposition comme dans la majorité les parlementaires appellent à des mesures fortes face à la pénurie de logements.

Au cours de la procédure législative, au grand bonheur de la gauche, le gouvernement a maintenu - par erreur - un article voté au Sénat pour couper dans la niche fiscale "Airbnb" et faire ainsi baisser l'abattement sur les locations de meublés touristiques à 30% (50% dans les zones rurales) au lieu de 71% dans les zones qui rencontrent des difficultés d'accès au logement, avec un plafond de recettes abaissé à 15 000 euros.  L'exécutif comptait initialement réduire l'abattement de 71% à 50% sur les revenus des meublés touristiques (type Airbnb) en zone tendue, avec un seuil à 77 700 euros. L'exécutif a fait savoir que cette erreur devrait être modifiée à l'occasion d'un projet de loi de finances rectificative ou, au plus tard, dans le budget 2025 . 

Par ailleurs, le coup de rabot initialement prévu sur le prêt à taux zéro a été réduit. Finalement, le gouvernement se félicite d'avoir étendu le dispositif avec de nouvelles villes classées "zones tendues" et des seuils d'éligibilité élargis pour les ménages. Mais dans les faits, l'opposition critique un PTZ réduit à l'achat d'un appartement neuf en "zone tendue" ou d'un logement ancien avec travaux en "zone détendue". L'exécutif table d'ailleurs sur une économie 400 millions d'euros par rapport à 2023 sur cette enveloppe.

Entre logement et écologie, le budget prévoit aussi 40 millions d'euros de plus pour la rénovation énergétique des logements sociaux, par un redéploiement de crédits.

Taxe streaming et niche Fifa

Une taxe sur les plateformes de streaming et des plateformes gratuites de partage de contenus va être instaurée pour financer le Centre national de la musique. Et contre l'avis des oppositions, le budget prévoit des mesures fiscales avantageuses pour les fédérations sportives internationales, dont le but principal est d'essayer d'attirer en France la puissante Fifa, grande instance du football mondial.

(Avec AFP)