"Il ne peut pas y avoir de liberté pour une grande Nation avec une dette excessive", a affirmé le ministre de l'Économie lors d'une audition à l'Assemblée nationale, mercredi 26 avril. Le désendettement ne passera cependant pas, selon Bruno Le Maire, par une politique d'austérité.
Assumer des objectifs de désendettement plus ambitieux, sans rogner sur les investissements structurels de la France. Telle est la feuille de route que sont venus présenter aux députés de la commission des finances, le ministre de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, ainsi que le ministre délégué chargé des Comptes publics, Gabriel Attal, mercredi 26 avril.
"Cette volonté d'accélérer le désendettement est un choix politique de liberté", a expliqué Bruno Le Maire, y voyant une "affirmation de notre souveraineté et de notre liberté". Le ministre a confirmé un objectif de déficit public réduit à 2,7 % à l'horizon 2027, alors qu'il était fixé à 2,9 % à cette échéance l'année dernière. Même chose concernant la dette publique, avec une cible portée à 108,3 % du PIB, soit quatre points de moins que l'objectif précédemment fixé. Ces objectifs "plus exigeants" sont affichés sans toucher aux prévisions de croissance, qui restent à 1,35 %, a indiqué Bruno Le Maire.
Le ministre de l'Économie a justifié la nécessité de mener cette politique par la transformation du paysage économique mondial. "Les conditions de financement de notre dette ont radicalement changé. Nous sommes dans un nouvel univers monétaire", a-t-il souligné, dressant le tableau de la "fin de toute politique monétaire accommodante", avec une hausse des taux d'intérêt inédite depuis de nombreuses années.
En l'espace d'un an, "nous avons pris 200 points de base sur les taux d'intérêt", a-t-il constaté, rappelant l'effet dévastateur qu'a cette hausse sur la charge de la dette. "Un point d'intérêt en plus, c'est 15 milliards d'euros en plus à horizon 2027", a-t-il rappelé, déplorant cet argent "jeté par les fenêtres", qui pourrait servir à financer des dépenses de santé ou d'éducation.
En outre, Bruno Le Maire a mis en relief la nécessité de reconstituer les "marges de manœuvre" de la France en vue d'affronter d'éventuelles crises à venir. Tout comme il a souligné qu'il serait difficile pour le pays de continuer à mener une politique du "quoi qu'il en coûte" alors que les partenaires de la zone euro ont tous commencé à s'engager dans le rétablissement de leurs finances publiques.
Dans cette optique, le ministre de l'Économie a confirmé l'extinction progressive des boucliers tarifaires d'ici à début 2025. "Nous commencerons par le gaz, puisque les prix sont revenus à ceux d'avant-crise", a précisé Bruno Le Maire. La fin du bouclier tarifaire sur l'électricité sera plus progressive, puisqu'elle nécessite également une production électrique nationale plus importante et l'entrée en vigueur de la réforme du marché européen de l'électricité.
La politique de protection des ménages contre l'envolée des prix de l'énergie a coûté 44 milliards d'euros, a relevé Bruno Le Maire. Une dépense qui s'inscrit dans la foulée du "quoi qu'il en coûte" : 240 milliards d'euros destinés à affronter les conséquences de la pandémie de Covid-19. "Cette protection a eu un impact : les dépenses publiques ont fortement augmenté."
Devant les députés, le locataire de Bercy a également martelé un message : cette accélération du désendettement de la France ne passera pas par une politique d'austérité, qui a laissé de mauvais souvenirs dans le sillage de la crise économique mondiale de 2008. "Nous ne voulons pas de l'austérité", a affirmé le ministre de l'Économie. "Lorsque la France a joué l'austérité, elle a tout perdu sur la croissance, sur le chômage et, au bout du compte, sur les finances publiques."
Selon Bruno Le Maire, il s'agit de ralentir la dépense publique en limitant son évolution pour la maintenir en dessous du niveau de l'inflation. Ce qui n'a pas convaincu le président de la commission des finances, Éric Coquerel (LFI), qui voit bien dans cette stratégie "une politique d'austérité". "Ce n'est pas une politique d'austérité. La dépense publique va baisser en volume. Mais en chiffres bruts, elle va augmenter de 219 milliards d'euros entre 2022 et 2027", a rétorqué le ministre de l'Économie.
"Nous voulons une dépense qui croît moins vite que la richesse nationale, mais cela ne veut pas dire que nous voulons réduire la dépense", a-t-il conclu, indiquant qu'il était possible de conjuguer rétablissement des finances publiques et maintien d'un haut niveau d'investissement dans l'innovation, l'industrie verte, les nouvelles technologies, ou encore l'intelligence artificielle. "Tout ce qui fera de la France une grande Nation."