Les députés ont adopté, lundi 17 janvier, une proposition de résolution qui "condamne les actes de torture et de répression systématique commis par le régime biélorusse". Tous les groupes ont soutenu le texte, à l'exception des députés communistes, qui se sont abstenus.
L'Assemblée nationale "exige l’organisation de nouvelles élections libres" en Biélorussie "sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe". Lundi, les députés ont adopté une proposition de résolution "invitant l’Assemblée nationale à condamner solennellement le régime illégitime d’Alexandre Loukachenko" (pour 34, contre 0).
Le texte, signé par les groupes MoDem, LaREM, Agir ensemble, mais aussi par des députés "UDI et indépendants", "Libertés et Territoires", "Socialistes" et "Les Républicains", dénonce les conditions dans lesquelles s'est déroulée l'élection présidentielle biélorusse d'août 2020.
"Elle vise aussi à des actions internationales non-gouvernementales, et en particulier à une coopération parlementaire et citoyenne avec les représentants du Bélarus démocratique", a expliqué le premier signataire du texte, Frédéric Petit (MoDem). Le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a lui aussi dénoncé "la dérive autoritaire du régime biélorusse", jugeant "opportune" la résolution du député de la majorité.
Selon la résolution, "le Président biélorusse non reconnu mène une politique de répression systématique d’arrestations et de tortures des citoyens biélorusses ayant manifesté pacifiquement pour défendre leur droit à la liberté, à la démocratie et à la dignité". Les signataires condamnent le régime, responsables selon eux, depuis le mois d'août 2020, de plus de 35.000 arrestations et 900 prisonniers politiques.
Les députés "condamnent [aussi] solennellement les actes de torture et de répression systématique commis par le régime biélorusse" et regrettent que "la politique menée par Alexandre Loukachenko menace la stabilité de l’Europe".
Le texte apporte, par ailleurs, le "soutien" et la "solidarité" de l'Assemblée à la Pologne et la Lituanie "qui accueillent et protègent les opposants au régime exilés". De plus, ces deux pays "se retrouvent en première ligne face à l’arrivée de nouveaux migrants instrumentalisés par le régime d’Alexandre Loukachenko." "On a assisté à une véritable tentative de déstabilisation des frontières de l'Union européenne en utilisant les flux migratoires organisés et coordonnés par un Etat qui a pu s'apparenter à une forme de conflit hybride", a expliqué à la tribune le député "Socialistes" Alain David.
L'élue "Les Républicains" Constance Le Grip a pour sa part évoqué la nécessité de "maintenir la pression" et a dénoncé le "cynisme" et la "honteuse manipulation qui s'apparente à la traite d'êtres humains".
L'Assemblée nationale dénonce l’utilisation de migrants comme arme de déstabilisation par le régime d’Alexandre Loukachenko. Extrait de la proposition de résolution
Face à ces actes, l'Assemblée nationale demande donc "une action de la France et de l’Union européenne pour soutenir le peuple biélorusse et les opposants au régime d’Alexandre Loukachenko". Elle demande surtout "l’organisation de nouvelles élections libres et démocratiques en Biélorussie" et "la libération immédiate de tous les journalistes et prisonniers politiques".
"En mai dernier, le régime a détourné un avion de ligne civil, un vol reliant deux villes de l'Union européenne, Athènes et Vilnius, dans le seul but d'arrêter et d'emprisonner un journaliste présent à bord", a rappelé Stéphanie Kerbarh (Libertés et Territoires). L'élue a par ailleurs estimé qu'une "évolution positive de la situation passe[ra] nécessairement par une négociation ou un rapport de force avec la Russie pour que celle-ci diminue son soutien au régime". Selon elle, "l'Union européenne doit parler d'une voix forte et unie".
"Cinq paquets de sanctions ont été adoptés, qui désignent 183 individus et 26 entités en lien avec la falsification du scrutin d'août 2020, avec la répression de la société civile, avec le détournement du vol Ryanair et avec l'instrumentalisation des migrants", a expliqué Jean-Yves Le Drian. Des "sanctions sectorielles" ont également été prises, a rappelé le ministre, qui a salué la réaction "unie, solidaire et très ferme" de l'Union européenne.
En plus de ces sanctions, Dimitri Houbron (Agir ensemble) a déclaré lundi que la France devrait "militer pour des sanctions complémentaires" afin d'"accentuer la pression et assécher les apparatchiks du régime de Loukachenko".
Dans leur résolution, les députés proposent enfin "la création d’un groupe d’études à vocation internationale appelé à engager et nouer des relations avec les représentants de la Biélorussie démocratique".
Les débats ont été l'occasion pour Clémentine Autain (La France insoumise) de dénoncer le manque "d'engagements forts" du gouvernement "pour soutenir les partisans de la démocratie au Qatar, aux Émirats arabes unis ou encore pour empêcher l'annexion du Haut-Karabakh par l’Azerbaïdjan". La députée a dénoncé une "complicité aveugle avec des régimes autoritaires" et la vente de "millions d'armes".
Les députés "La France insoumise" ont voté en faveur du texte, tout en mettant en cause sa rédaction, qui "passe complètement sous silence les décisions prises par le gouvernement polonais qui sont indignes des principes fondateurs de l'Union européenne et de la convention européenne des droits de l'Homme". "Nous ne serons jamais solidaires de ceux qui érigent des murailles de fils barbelés pour empêcher ceux qui fuient la guerre et la dévastation de venir demander asile", a ajouté l'élue.
Le député communiste Jean-Paul Lecoq (Gauche démocrate et républicaine) a pour sa part dénoncé la proposition de résolution, qualifiée de "piège grossier". Le député, qui a rappelé que son groupe ne soutenait pas le régime biélorusse, a questionné les "intérêts extrêmement divergents" des "opposants" que le texte propose de soutenir : "Ils vont de l'extrême droite violente au mouvement ouvrier progressiste, en passant par les ultra-libéraux européistes".
Selon lui, la majorité et le gouvernement ne se tournent que vers "le camp ultra-libéral, pro-européen et favorable à l'intégration de la Biélorussie dans l'Otan". Les députés communistes sont les seuls à n'avoir pas voté en faveur du texte : ils se sont abstenus.