La ministre de la Transition écologique, auditionnée vendredi matin par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, a affirmé que les entreprises françaises pourraient continuer à payer leurs importations de gaz russe en euros. L'approvisionnement énergétique de la France "n'est pas un sujet d'urgence immédiate", a-t-elle expliqué.
Il n'existe pas, "à ce stade", de risque de rupture d'approvisionnement de gaz russe en France : tel est le message rassurant adressé par la ministre de la Transition énergétique Barbara Pompili, ce vendredi matin. Auditionnée par les députés de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, la ministre a, par ailleurs, réaffirmé le refus des pays occidentaux de payer en roubles le gaz russe, comme le demande Moscou.
"Cela constituerait une rupture de la plupart des contrats, a expliqué Barbara Pompili. Les contrats qui sont passés par les entreprises françaises notamment avec Gazprom sont libellés en euros et donc elles sont parfaitement légitimes à refuser un changement de devise." De plus, si le paiement était effectué en roubles, la banque centrale russe serait en capacité de fixer le taux de change qu'elle souhaiterait, ce qui "reviendrait à fixer de manière unilatérale le prix du gaz et consisterait en un détournement des sanctions".
Pas question donc de céder aux demandes russes. Une solution pourrait avoir été trouvée, a expliqué la ministre : selon les dernières informations en provenance de Russie, "les entreprises pourront continuer à payer en euros auprès de banques [comme Gazprombank] qui elles-mêmes devront les convertir en roubles". Si bien qu'"à ce stade", il n'existe pas "de risque de rupture de ces contrats".
Barbara Pompili s'est voulue rassurante : "Notre approvisionnement énergétique n'est pas un sujet d'urgence immédiate." Mais la situation reste précaire : la ministre de la Transition écologique a prévenu que la France et l'Europe feraient face à des "difficultés importantes dès l'hiver prochain" si la Russie décidait de couper totalement l'approvisionnement de l'Europe. Les turbulences surviendraient même "beaucoup plus vite" s'agissant du pétrole "et notamment du diesel".
Dans l'immédiat, "la hausse des prix de l'énergie risque de peser sur l'activité des entreprises en augmentant les coûts de production". Avec, en bout de chaîne, une conséquence sur le pouvoir d'achat des Français. La tension sur les prix de l'énergie est d'autant plus grande que le parc nucléaire français fait face à des "indisponibilités imprévues compte tenu de la détection de défauts sur certaines tuyauteries".
Face à cela, le gouvernement multiplie les mesures d'aides : blocage des prix des tarifs réglementés du gaz, bouclier tarifaire sur les prix de l'électricité, indemnité inflation de 100 euros pour certains Français ou encore chèque énergie de 150 euros à l'automne dernier. Le tout représentant pour l’État un coût de "plus de 20 milliards d'euros", a précisé Barbara Pompili. Le gouvernement a également annoncé le déploiement d'un "plan de résilience coordonné et évolutif" qui "s'inscrit dans le cadre d'une réponse européenne" mais aussi la "remise carburant à la pompe" de "15 centimes hors taxes par litre" appliquée depuis ce vendredi.
Au niveau européen, "les chefs d’État et de gouvernement ont acté le principe d'une obligation commune de stockage de gaz pour assurer un niveau de remplissage minimal avant l'entrée dans la période hivernale à 80% cette année puis à 90% en 2023", a expliqué Barbara Pompili. Cela devra permettre de "mutualiser les capacités de stockages" mais aussi de "limiter la nécessité de construire de nouvelles infrastructures".
Ces politiques ne doivent pas faire oublier la nécessité "d’accélérer résolument notre transition énergétique", a encore expliqué la ministre. Le gouvernement souhaite continuer à déployer des énergies renouvelables d'ici 2050 "en multipliant par 10 nos capacités solaires", "en multipliant par deux nos capacités d'éolien terrestre" et "en atteignant 50 parcs d'éoliennes en mer".
"Nous devons voir loin", a affirmé Barbara Pompili, qui a prôné une diversification du mix énergétique et évoqué la relance du nucléaire en France. La ministre a également reconnu que la centrale à charbon de Saint-Avold, qui a fermé jeudi 31 mars, pourrait être redémarrée dès l'automne et l'hiver prochains : "Les travaux de RTE pourraient conclure à la nécessité d'autoriser le redémarrage ponctuel de cette centrale." Deux conditions devront être respectée : l'absence d'approvisionnement en charbon russe et "une compensation intégrale des émissions de gaz à effets de serre". Mais une telle décision ne "remettrait pas en cause la trajectoire globale de sortie du charbon en France", a promis la ministre.