La ministre du Travail a reçu cette semaine un courrier signé par plus de 50 parlementaires des Républicains appelant à "faire évoluer le Code du travail afin de reconnaître que la boulangerie est une activité essentielle et que son exercice ne peut être suspendu un jour férié". Mercredi, Catherine Vautrin s'était dit favorable à "faire bouger la loi" et évoqué une proposition de loi en cours de préparation.
Une cinquantaine de parlementaires membres des Républicains, emmenés par le député du Rhône Alexandre Portier, ont écrit à la ministre du Travail, Catherine Vautrin, le 15 avril. Leur demande ? Que les boulangers qui souhaitent travailler le 1er-Mai puissent employer des salariés ce jour-là sans être sanctionnés. Car, à leurs yeux, la règle actuelle "heurte le bon sens". "Travailler le 1er-Mai ne doit plus être le motif de sanction pour ceux qui, par choix, veulent simplement faire leur métier et servir leurs clients", peut-on lire dans ce courrier.
A quelques jours de la Fête du Travail, le sujet est cette année au cœur de l'actualité, après des contrôles inopinés dans des boulangeries de Vendée, le 1er mai 2024, par l'Inspection du travail. "Jusqu’à l'an dernier, personne ne s'était posé la question. On avait toujours travaillé, les gens sont payés le double, tout le monde était content, et les clients consomment ce jour-là", explique à l'AFP Dominique Anract, président de la Confédération nationale de la boulangerie, qui s'est ému ces derniers jours d'une législation trop contraignante.
Concrètement, l'article L3133-4 du Code du travail stipule que le 1er-Mai est un "jour férié et chômé". Des exceptions existent "dans les établissements et services qui, en raison de la nature de leur activité, ne peuvent interrompre le travail" – comme les hôpitaux ou les transports par exemple. L'amende encourue est de 750 euros par salarié concerné, 1.500 euros quand celui-ci est mineur. Dans les entreprises de boulangerie-pâtisserie, la possibilité d’employer des salariés le 1er mai reposait jusqu'à présent sur une position ministérielle du 23 mai 1986. Mais cette dérogation est devenue obsolète après une décision de la Cour de cassation en 2006.
Dans leur lettre, les députés et sénateurs LR demandent, "en toute urgence", de "faire évoluer le Code du travail afin de reconnaître que la boulangerie est une activité essentielle et que son exercice ne peut être suspendu un jour férié". Ils souhaitent également que des "consignes claires" soient passées à l'inspection du travail cette année, afin qu'elle "ne verbalise pas les boulangers qui emploient des salariés volontaires le 1er mai".
Interrogée sur France 2, Catherine Vautrin a expliqué qu'aujourd'hui un boulanger, qui est entrepreneur, est autorisé à travailler le 1er-Mai, mais pas à faire travailler ses salariés. La ministre s'est toutefois dit favorable à une évolution législative. "Mon engagement, c'est de travailler avec les parlementaires pour qu'on puisse faire bouger la loi, parce que ça fait partie de ces contraintes qui méritent d'être desserrées", a-t-elle déclaré, car le pain est "une tradition française". Et d'ajouter : "Ce qu'une loi a fait, seule une loi peut le défaire. Evidemment, je regarderai de façon extrêmement proche la proposition de loi qu'un certain nombre de députés est en train de préparer."
"L'application de cette loi est aujourd'hui difficilement compréhensible", a également admis sur BFMTV Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du Travail et de l'Emploi. "Ce sont des métiers importants. Si, sur une base volontaire avec des compléments de salaire, les gens ont envie de s'organiser, on doit pouvoir laisser [faire] avant de pouvoir clarifier les choses dans la loi", a-t-elle indiqué. "Laissons ceux qui veulent travailler le faire librement", a abondé sur X l'ex-ministre du Commerce et députée Olivia Grégoire (Ensemble pour la République).
Plusieurs députés ont également apporté leur soutien à une modification de la loi. C'est le cas de Marine Le Pen, leader du Rassemblement national, qui s'est interrogée sur X : "Pourquoi priver les salariés volontaires de gagner deux fois leur salaire ? Quand ce gouvernement va-t-il laisser les Français travailler ?" Ou encore d'Eric Ciotti, son allié de l'UDR, qui demande "au gouvernement de revenir sur cette mesure absurde et anti-économique".
Les boulangers ne sont pas les seuls à faire part de leur mécontentement des règles en vigueur à l'approche du 1er-Mai. Dans un communiqué publié le 16 avril, la fédération française des artisans fleuristes s'émeut que ce jour-là, "tout le monde peut vendre du muguet… sauf les fleuristes !".